27/09/2013
Le bien commun, une idée révolutionnaire
50e anniversaire de l'encyclique Pacem in terris :
Vatican – Présentant les célébrations du 50e anniversaire de l'encyclique de Jean XXIII Pacem in terris, le cardinal Peter Kodwo Appiah Turkson, président du Conseil pontifical Justice et Paix, a souligné que ces journées comporteront un colloque universitaire (le 2 octobre) sur les catholiques en politique : "l'engagement politique est une expression qualifiée et exigeante de l’engagement chrétien au service des autres, il est engagement pour le bien commun."
Mgr Mario Toso, secrétaire du Conseil, a précisé notamment que Pacem in terris "peut aider à vaincre les nouveaux colonialismes : l’asservissement financier et spéculatif, les délocalisations nuisibles, l’exploitation de terre ou de ressources de la part de pays étrangers, en polluant l’environnement des populations locales ..."
Il faut prendre ces paroles au sérieux.
La liste de maux dénoncés par Mgr Toso est est une charge sabre au clair contre le libéralisme: les maux en question viennent tous de la mondialisation ultralibérale, et ce sont les maux que dénoncent aussi, de leur côté, des courants anti-libéraux extérieurs – ou même hostiles – à l'Eglise catholique. C'est donc une perspective dérangeante, que l'engagement du catholique en politique doit faire sienne.
D'autant que le cardinal Turkson donne à l'engagement politique une signification précise : c'est, dit-il, le "service du bien commun". Le terme "bien commun" n'est pas neutre. Il est même révolutionnaire aujourd'hui. Selon la doctrine sociale de l'Eglise, le bien commun devrait subordonner l'activité économique et financière au service des "conditions sociales permettant, tant aux groupes qu'à leurs membres, d'atteindre leur perfection" (Vatican II, Gaudium et spes) ! Les mots "sociales", "groupes", "membres" », "perfection", n'ont rien à voir avec l'hyper-individualisme et le réductionnisme consumériste actuels.
Quant à l'outil supérieur qui garantit le bien commun, c'est l'autorité politique (non le chaos des intérêts privés) : "A la vie en société manqueraient l'ordre et la fécondité sans la présence d'hommes légitimement investis de l'autorité et qui assurent la sauvegarde des institutions et pourvoient, dans une mesure suffisante, au bien commun", déclare Pacem in terris. L'encyclique ajoute : "Toute communauté humaine a besoin d'une autorité qui la régisse. Celle-ci trouve son fondement dans la nature humaine. Elle est nécessaire à l'unité de la Cité. Son rôle consiste à assurer autant que possible le bien commun de la société..." Définition évidemment incompatible avec le slogan des libéraux : "l'adversaire c'est l'Etat."
Dans la France de 2013, l'Etat est devenu un théâtre d'ombres : ce fait oblige donc à réinventer le politique, sans quoi le bien commun ne sera plus assuré.
Le bien commun est également celui de toute l'humanité : c'est pourquoi Benoît XVI prône (dans Caritas in veritate) la création d'un gouvernement politique mondial de l'économie, subsidiaire mais doté de véritables pouvoirs.
Sur ces sujets on consultera avec profit le Document d'Aparecida* supervisé par le futur pape François.
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* Cliquer Document d'Aparecida dans la fenêtre RECHERCHER, colonne de droite ici.
18:10 Publié dans Eglises, Idées, Pape François, Planète chrétienne | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : christianisme, vatican, paix
Commentaires
PEU DE MONDE
> euh....peu de monde pour mettre un commentaire sur une encyclique? la "clique" catholique est-elle meilleur sur les problèmes politiques, que sur les "ency-clique" textes fondateurs de notre religion catholique.
je suis très étonné de ce constat.
merci cher PP de nous en avoir parlé. A relire ce texte
euh, mon commentaire est aussi un commentaire pour ne rien dire dessus, non plus....
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Écrit par : jean-christian / | 28/09/2013
DEUX POIDS ET DEUX MESURES
> Donner un commentaire de l'encyclique elle-même c'est sans doute possible, mais commenter constructivement à partir d'elle c'est plus délicat puisqu'elle ne propose aucune solution toute faite. Et c'est justement de solutions dont nous avons besoin. D'où son intérêt juridique et spirituel: engageons-nous, cherchons concrètement la voie du "bien commun". "Res publica", le souci de la chose publique n'est pas non plus une expression anodine ou à balayer d'un revers de la main, même si Aurélie Filipetti nous explique que Manuel Valls peut tenir valablement des propos ouvertement et objectivement xénophobes sur les Roms, un peuple en lui-même incapable de s'intégrer selon lui, et que nous ne pouvons par conséquent pas garder chez nous (pour résumer), au prétexte que ce brave Manuel est "ministre" et "républicain" (encore une forfanterie moraliste éhontée). N'Importe lequel d'entre-nous ici, sur ce même blog, tiendrait ce genre de propos sur les roms ou toute autre catégorie ethnique ou religieuse, ou sexuelle (;-) ), pourrait non seulement faire l'objet de poursuites pénales pour incitations à la haine raciale, mais valoir de très sévères ennuis à Plunkett (responsable de ce qui y est publié). C'est hallucinant de voir avec quelle aisance depuis les élections victorieuses, le discours de gauche a glissé sous l'égide de Manuel Valls vers un fascisme larvé sans soulever les torrents d'indignation et de bonne conscience auxquels j'ai assisté comme vous lorsqu'il s'agissait de propos du même ordre (quoiqu'infiniment plus mesurés en général), chez Marine Le Pen, ou de Villiers. Et ce monsieur Valls s'indigne de la véhémence de Cécile Duflot (dont le républicanisme est lui-même à géométrie variable)! Pourtant, hélas, fascisme, nazisme, extrême droite c'est très exactement un socialisme nationaliste, populiste, xénophobe, et particulièrement démagogique dont le glissement inévitable se fait vers un régime autoritaire de type dictatorial. Nous avons eu bien des exemples de frénésie criminelle dans cette veine politique là. Mais le pire dans tout ça, ce fut et ça reste le silence des gens de bonne volonté, et des responsables politiques: Monsieur le Président de la République, sortez de votre silence !
Christophe Barbanneau, toujours conseiller municipal républicain de Loches, toujours homo, toujours catho.
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Écrit par : christophe b / | 30/09/2013
LA SEULE
> L'Eglise est la seule institution (à ma connaissance) à promouvoir le bien commun.
Les autres préfèrent l'intérêt général qui autorise tous les arrangements possibles puisqu'il décrète au nom du plus grand nombre d'en sacrifier quelques uns (dont le volume est à géomètrie variable).
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Écrit par : franz / | 30/09/2013
> Santo mox !
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Écrit par : spooner / | 30/09/2013
PAIX ET BIEN COMMUN
> Le bien commun peut se confondre avec l'intérêt général, puisque concrètement il vous est impossible de m'en donner une définition explicite et factuelle, et ce de manière "plus absolue" que pour la "res publica".
L'intérêt général se heurte à notre propre limitation en matière de sagesse, même s'il serait parfois objectivement possible de "faire mieux" au regard du droit naturel (droit naturel que rejettent les positivistes, les marxistes, les philosophies relativistes de tous poils). Dans le même temps, le message évangélique est atteint par notre propre vision de ce qu'aurait fait Jésus ou tel apôtre, ou tel saint, nous enfermant insidieusement dans la certitude d'être au fond le meilleur.
S'engager, c'est donc prendre le risque de se tromper et d'être critiqué, surtout dans un monde globalisé et fondé sur la diversité.
Si l'unité ne veut pas pour autant dire uniformité, il est, premièrement, utile de se le rappeler constamment, et secondement, à souligner que cette unité dans la diversité ne peut se faire sans laïcité (oh le gros mot si souvent déformé pour masquer d'autres intolérants !).
Une société, aspect politique de la vie en commun, son objet, le bien commun, ne peut donc se forger sans recourir chaque fois au consensus sur cette notion de bien commun ou d'intérêt général, moyennant des "outils" conceptuels, des "outils" techniques, ou juridiques et toujours sur des choses auxquelles nous accordons communément du prix (des valeurs).
Avec tout ça, on n'a pas beaucoup avancé certes, et de toute évidence le principal problème reste celui de la fluctuation des valeurs même des plus "puristes" (toutes catégories de croyants confondues), fonction des intérêts qui nous rongent. M. Montebourg avait un mot très juste, juridique: celui d'impétrant. Nous votons souvent en France, et chaque fois c'est le même ballet des valses-hésitations pour ne serait-ce qu'avoir une investiture-à-la-candidature. On touche-là au comble du pathétique.
Bref! Petite citation utile, à l'occasion de l'encyclique: "M. Vittorio Alberti a présenté « Le concept de paix », un volume de plus de 600 pages, préparé par le dicastère sous le pontificat de Benoît XVI. "La paix est un nouveau nom de la laïcité car pour atteindre la paix il faut avant tout fixer le primat de l’homme et de la dignité libre de sa conscience", a-t-il notamment souligné."
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Écrit par : christophe b / | 01/10/2013
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