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26/08/2013

L'objection de croissance et la foi

Jean Tauler[1].jpg 

 

En hommage à Jean Bastaire,

ce passage du dominicain Jean Tauler

(XIVe siècle) :

 


 

 

 

<<  ''Tout est prêt, venez aux noces... '' Mais les invités s'excusèrent : ''l'un s'en alla à son champ, l'autre à son négoce''. On ne le voit que trop dans le monde entier, cet étonnant affairement et cette continuelle agitation qui remuent le monde. La tête vous en tourne, tant est prodigieux ce qu'on a de vêtements, de nourriture, de constructions et de beaucoup de choses dont la moitié suffirait amplement. Nous devons de toutes nos forces nous arracher à cette exubérance d'activité et de multiplicité, à tout ce qui n'est pas besoin absolu, et nous recueillir en nous-mêmes, nous attacher à notre vocation, considérer où, comment, et de quelle manière le Seigneur nous a appelés, l'un à la contemplation intérieure, l'autre à l'action, et un troisième bien au-dessus des deux premiers au repos intérieur, dans le silence calme des divines ténèbres, dans l'unité de l'esprit. Mais si l'homme appelé intérieurement au silence noble et calme, dans le vide de la nuée obscure (Ex. 24,18), voulait à cause de cela s'abstenir continuellement de toute oeuvre de charité, ce ne serait pas bien ; cet homme aussi doit faire des oeuvres de charité selon que les circonstances les y invitent.  >>

 

wikipedia

Tauler_Predig_1522_Titel_von_Holbein[1].jpg< Tauler est né et mort à Strasbourg. Il fit partie de l'ordre des Dominicains, comme Maître Eckhart dont il fut l'élève. Son enseignement s'apparente à celui de Maître Eckhart, mais il fut aussi influencé par ses études approfondies des néo-platoniciens, tout particulièrement de Proclus et du Pseudo-Denys l'Aréopagite. Ses prédications se placent dans la droite lignée de Maître Eckhart. Elles développent surtout le thème du détachement et prêchent une ascèse apparemment austère, mais qui, au XIVe siècle, est nettement moins doloriste que les autres : c'est lui qui demandera au banquier Rulman Merswin, fondateur de la commanderie Saint Jean à Strasbourg (aujourd'hui ENA) de largement modérer son ascèse. Il a probablement fait ses études au studium (couvent possédant un centre de formation) à Cologne et a séjourné à Bâle, lors du conflit entre le pape et l'empereur, où les dominicains, ayant pris le parti du pape, furent expulsés de la ville ; mais à part quelques voyages il passa toute sa vie à Strasbourg. Il conseillait les « Amis de Dieu » orthodoxes, dont des béguines connues (Marguerite Ebner) qui vivaient librement dans la pauvreté dans une communauté retirée afin de s'entraider dans leur quête d'une voie intérieure. Ce fut un remarquable prédicateur. Il mourut au couvent de dominicains de Saint Nicolas in Undis, où sa propre sœur était religieuse. Il est cité parmi les réformateurs strasbourgeois de l'Ordre dominicain dans le manuscrit Liber reformationis ordinis praedicatorum in Germania, avec Maître Eckhart.

On ne connaît de l'œuvre de Tauler, avec certitude, que sesSermons, qui sont en fait des notes d'auditeurs. L'édition princeps des œuvres de Tauler, en allemand (Leipzig, 1498), contenait 84 sermons - elles ont également été traduites en latin par Surius et furent données la même année en un volume in-folio chez Quentel. Les versions manuscrites dispersés dans les bibliothèques européennes témoignent de la qualité de la transmission, et de sa portée.

C'est surtout dans ces sermons que l'on peut étudier la doctrine mystique de Jean Tauler, très proche de la mystique Maître Eckhart, dont il donne ce témoignage : « il parlait depuis l'éternité, et vous l'avez compris depuis le temps ». Par le détachement, la grâce divine toute puissante permet la naissance de Dieu dans l'âme. Tauler envisage à demi-mots la divinisation du sujet, en insistant sur le fond (Grund) de l'âme, qui, incréé et étincelle de l'âme, accueille Dieu et où est restituée l'Image divine perdue par le péché. Plus pratique que son maître Eckhart, Tauler insiste davantage sur l'importance d'un effort continu et patient : la croix prend plus d'importance dans ses écrits : c'est là un virage présent dans tous les textes, dans toute l'iconographie du XIVe siècle, que les pestes, les guerres, les schismes entre papes et antipapes, le tremblement de terre de Bâle en 1354 et un épisode climatique quasi glaciaire ont amené à surnommer : le siècle de fer. >