Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

07/07/2012

Le contrôle anti-immigrés s'en prend à l'Eglise

 logo.gif

Au Japon, les évêques catholiques demandent que les policiers cessent de faire intrusion sur les lieux de culte :



 

Site de la conférence épiscopale japonaise : 

http://www.cbcj.catholic.jp/eng/

 

Eglises d'Asie (MEP) 05/07/2012 :

Mgr Ikenaga Jun, archevêque d’Osaka et président de la Conférence épiscopale du Japon, a demandé au gouvernement japonais de ne plus faire procéder à des contrôles d’identité visant les étrangers dans ou autour des églises.

<< Le 2 juillet dernier, Mgr Ikenaga Jun, archevêque d’Osaka et président de la Conférence épiscopale du Japon, a remis une lettre au gouvernement japonais lui demandant des précisions sur les instructions données à la police en matière de respect de la liberté de religion dans le pays. La requête de l’épiscopat japonais, inédite dans la forme, fait suite à l’incident du dimanche de Pentecôte du 27 mai dernier, où des policiers ont pénétré sur le terrain d’une paroisse catholique du diocèse de Yokohama pour contrôler l’identité des étrangers présents sur le lieu de culte. Soupçonné d’être en situation irrégulière, un catholique philippin avait été arrêté.

Le président de l’épiscopat japonais a remis sa lettre à Matsubara Jin, président de la Commission nationale pour la sûreté publique (Kokka Koan Iinkai), instance gouvernementale qui supervise la police nationale et dont la mission est d’assurer l’indépendance de cette dernière vis-à-vis des pressions politiques comme d’y faire respecter les principes démocratiques. Dans son courrier, signé au nom des évêques japonais, Mgr Ikenaga appelle la police à ne pas perturber les activités de l’Eglise et à s’abstenir de pénétrer sans mandat sur ses propriétés. L’archevêque demande également aux forces de l’ordre de ne pas faire suivre les étrangers jusque dans les lieux de culte qu’ils fréquentent ni de procéder à des contrôles d’identité dans les propriétés d’Eglise ou aux alentours immédiats.

En recevant la lettre des mains de Mgr Ikenaga, Matsubara Jin n’a pas indiqué si son administration y donnerait une réponse écrite. Il a simplement déclaré que l’action des policiers à Kawasaki le 27 mai dernier était « contraire au bon sens » et a ajouté qu’il « serait fait en sorte qu’un tel incident ne se reproduise pas ».

Si l’engagement des évêques japonais dans la défense des droits des populations immigrés est ancien (en 1994*, ils demandaient justice pour ceux qui venaient en aide aux travailleurs immigrés en situation irrégulière), c’est la première fois que l’Eglise entreprend une démarche publique à un aussi haut niveau de l’Etat.

L’incident du dimanche 27 mai a eu lieu à la paroisse Kaizuka de la ville de Kawasaki, dans le diocèse de Yokohama. Dans ce diocèse, les catholiques d’origine étrangère représentent les deux tiers de la communauté. Comme dans les autres églises catholiques au Japon, des messes en anglais y sont célébrées afin de répondre aux besoins pastoraux des populations d’origine étrangère. A Kaizuka, où la messe dominicale en anglais est célébrée à 13h30, c’est précisément en début d’après-midi le 27 mai que six ou sept policiers d’un poste de police voisin ont pénétré sur le terrain de la paroisse, sans s’être auparavant annoncés ni produire de mandat judiciaire. Après avoir contrôlé les papiers de plusieurs personnes présentes sur les lieux, ils ont arrêté un homme de nationalité philippine. Celui-ci n’avait pas son passeport sur lui et les policiers l’ont arrêté afin de l’interroger, le soupçonnant d’avoir outrepassé la durée légale de son séjour au Japon.

Egalement présent, le curé de la paroisse, le P. Motoyanagi Takashi, avait protesté, contestant l’action de la police et arguant du fait que les officiers de police n’avaient pas le droit de pénétrer sur le terrain de l’église paroissiale sans mandat. Selon de nombreux témoins, Japonais comme Philippins, les policiers avaient fait montre d’une attitude autoritaire et arrogante.

Dès le 5 juin, le P. Motoyanagi s’est présenté au poste de police d’où étaient venus les officiers de police. Accompagné d’un avocat, il était porteur d’une lettre de son évêque, Mgr Umemura Masahiro, lequel exprimait son étonnement et son inquiétude face au comportement de la police. Dans son courrier, l’évêque de Yokohama expliquait que, selon lui, procéder à des contrôles d’identité et à des interpellations sur un terrain d’Eglise allait à l’encontre de l’exercice de la liberté de religion, et que mener de telles actions sans mandat judiciaire constituait en outre une violation des procédures légales, représentant par conséquent une menace pour la société.

L’évêque demandait également que la police présente des excuses pour l’interpellation du Philippin et donne l’assurance qu’une telle intervention ne se reproduirait plus. Il demandait enfin que, dans sa lutte contre l’immigration irrégulière, la police ne s’autorise pas à « pister » les étrangers fréquentant les églises ou circulant à proximité des lieux de culte.

C’est à la demande de l’évêque de Yokohama que l’incident de Kawasaki a été ensuite inscrit à l’ordre du jour de l’assemblée annuelle de la Conférence épiscopale, laquelle s’est tenue du 19 au 22 juin derniers. Les évêques avaient alors décidé collectivement de prendre position en interpellant la Commission nationale de la sûreté publique.

Au Japon, l’Eglise catholique présente un double visage. Si l’on compte quelque 450 000 catholiques japonais, l’ouverture – assez récente et plutôt limitée – du pays à l’immigration a entraîné l’arrivée dans les églises de fidèles d’origine étrangère, venus des Philippines, d’Amérique latine et d’autres pays. Ces étrangers catholiques sont aujourd’hui aussi nombreux sinon légèrement plus nombreux que les catholiques japonais.

Dans le diocèse de Yokohama, Mgr Umemura a pris comme devise épiscopale : Communio communionum (‘la communion de toutes les communautés’), exprimant ainsi son désir « de voir les communautés japonaise et étrangères faire corps dans une seule et même Eglise. »

 


* Le problème dure depuis près de vingt ans :

<< Eglises d'Asie (MEP), 01/02/1994 -  Les évêques demandent justice pour ceux qui aident les travailleurs immigrés - À la suite de l'arrestation d'un enseignant chrétien inculpé d'assistance à des étrangers en situation illégale, les évêques rappellent le pouvoir civil au respect des droits des travailleurs immigrés.

Un catholique de Fukuoka, M. Yukinobu Aoyagi, qui aidait bénévolement les travailleurs étrangers, a été arrêté par la police le 27 septembre 1993, inculpé d'infraction à la loi sur l'immigration et d'assistance à des étrangers en situation irrégulière. Son arrestation a vivement ému les milieux catholiques (1).

Au nom de la conférence des évêques du Japon, Mgr Takeo Okada, président de la commission Justice et Paix, et Mgr Fumio Hamao, président de la commission pour la coopération internationale, ont adressé le 4 octobre un message "à tous les catholiques du Japon et à toutes les personnes de bonne volonté", dans lequel était rappelé le point de vue de l'Eglise sur le soutien aux travailleurs immigrés (2).

Si les raisons sont manifestes qui incitent les chrétiens du Japon à aider des immigrés qu'ils regardent comme des frères et des soeurs en Jésus Christ, il arrive, notaient les évêques dans leur message, "que nous soyons confrontés, sans pouvoir les éviter, avec des problèmes posés par la structure et les restrictions des lois actuelles de la société du Japon".

L'Eglise pense que ces problèmes sont de ceux que les chrétiens doivent assumer et travailler à résoudre. Le concile du Vatican l'a affirmé : "Nous devons améliorer l'ordre temporel de ce monde avec l'esprit de l'Evangile" (3). Le pape Jean Paul II y a spécialement incité les fidèles du Japon : "Vous ne devez pas avoir peur d'accepter un rôle actif dans la construction d'une société plus humaine" (4). Les porte-parole de la conférence épiscopale concluent, en s'adressant spécialement aux personnes qui exercent une responsabilité publique, à "notre responsabilité pour réexaminer la législation japonaise du point de vue des droits humains des travailleurs étrangers immigrés".

Mgr Okada et Mgr Hamao ont insisté sur ce dernier point dans une lettre du 27 novembre 1993 au président du tribunal de Fukuoka auquel avait été déférée l'affaire de M. Aoyagi. Voici en traduction des extraits de leur lettre, publiée dans l'hebdomadaire catholique Katorikku Shinbun :

"Dans cette affaire, ce n'est pas seulement M. Aoyagi, chrétien fervent qui a voulu vivre avec les plus faibles de la société : qui est mis en cause, c'est la société japonaise, la responsabilité du gouvernement et de son administration. A l'époque où l'on avait besoin de main d'oeuvre, les autorités ont favorisé la venue d'ouvriers étrangers et ont aménagé pour eux l'application de la loi sur l'immigration. Mais depuis qu'il y a récession économique, les mêmes ouvriers subissent inspections et enquêtes sans considération de leurs droits fondamentaux, et sans que la réglementation sur le travail soit respectée à leur égard. Le gouvernement en est venu à traiter tous les travailleurs étrangers comme des individus en situation illégale. La loi sur l'immigration est appliquée de telle façon qu'aujourd'hui plus de trois cent mille travailleurs étrangers ont dépassé la date limite de leur séjour autorisé. Le gouvernement ne fait que prolonger la situation de ces travailleurs dont les droits les plus fondamentaux ne sont pas respectés."

Les évêques ont conclu leur lettre en demandant que M. Aoyagi soit relâché et équitablement jugé. >>

Notes

(1) EDA 164<br />

(2) Point de vue déjà exposé dans une déclaration de la Conférence épiscopale de décembre 1992 sur les problèmes de l'immigration (EDA supplément 153)<br />

(3) Concile Vatican II, décret sur l'apostolat des laïcs, 5.<br />

(4) Message à l'épiscopat du Japon, dont le document n'indique pas la date.<br />

 

 

Commentaires

PLANETE CHRETIENNE

> "planète chrétienne" effectivement. Elle ne ressemble pas à ce que les cathophobes nous racontent sur l'Eglise.
______

Écrit par : rosamunda / | 07/07/2012

EN ISRAÊL AUSSI

> Intéressante info japonaise, surtout si on la rapproche de ce qui se passe en Israël : des dizaines de milliers de travailleurs immigrés philippins y développent une présence catholique massive qui change la donne religieuse dans ce pays.
______

Écrit par : edmond campion / | 08/07/2012

Les commentaires sont fermés.