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09/04/2012

L'Eglise catholique et la campagne présidentielle

Le président des évêques français parle, clair et net :


 

En union avec le pape Benoît XVI et l'Eglise universelle, le cardinal André Vingt-Trois a souvent rappelé l'ampleur de la vision sociale catholique qui fixe de nombreux devoirs aux fidèles – et ne se limite pas à trois sujets, comme voudrait le faire croire un certain milieu.

Dans son entretien au Monde (8-9/04), le cardinal jauge aussi la campagne électorale actuelle. Les candidats, dit-il, ont « des timidités et des silences qui laissent apparaître une difficulté à exprimer un projet collectif pour la France » : « Osent-ils annoncer des restrictions dans le mode de vie auxquelles les Français vont être contraints ? Quel regard portent-ils sur l'Europe ? Et une même timidité apparaît à l'égard de l'avenir sur les grandes questions internationales ou environne-mentales.... » Cette campagne 2012 s'est enfermée dans le clientélisme, regrette le cardinal : « les déclarations sont censées satisfaire telle ou telle partie de l'électorat, alors que très peu d'électeurs ont la conviction qu'elles seront intégralement appliquées. »

Sur la « laïcité positive » (slogan sarkozyen pour l'électorat catho au début du quinquennat), le cardinal suggère que l'Eglise n'est pas dupe : « Notre préoccupation a toujours été de veiller à ce que la religion ne soit pas instrumentalisée dans les débats politiques, car cela ne correspond pas à une pratique saine de la laïcité ». Certes, dit-il, Sarkozy a « contribué » à faire bouger la notion de laïcité : « mais ce fut aussi le cas sous le gouvernement Jospin, lorsque fut créée l'instance de dialogue entre le gouvernement et l'Eglise catholique. »

Sur la question de l'islam en France, Mgr Vingt-Trois est net. Ce qu'il dit – au nom de la CEF – ne fera pas plaisir aux rabatteurs de la xénophobie :

« On n'arrivera pas à intégrer une partie de la population immigrée en lui menant une guerre religieuse. La question est de savoir si la République est capable d'accueillir des croyants ou si elle doit leur demander d'abjurer leurs croyances pour être intégrés à la société française... »

Le cardinal reconnaît que l'intégration implique aussi l'édiction de limites, mais il paraît mettre en garde  contre le risque de phobie antireligieuse appliquée notamment à l'islam.

Cette impression se renforce dans l'analyse qui suit. Le Monde tente de faire dire au cardinal que la France traverse une phase de tension autour « des religions ». Inexact, répond-il : le refus de principe envers l'enseignement catholique n'est le fait que de certains politiciens ; « l'avalanche d'interdits et de contrôles » envers les autres religions (qui vient des pouvoirs publics, non des religions) n'aidera pas au « vivre-ensemble » ; dans une laïcité sereine, l'école ferait découvrir aux jeunes « les richesses de toutes les religions » plutôt que de nier leur existence.

Quant aux catholiques eux-mêmes, voici ce que dit le président de la conférence épiscopale française et chacun de ses mots doit être pesé car il a force d'orientation1 :

« Nous avons une mission à l'égard du monde. C'est une mission, non pas de condamnation, mais d'espérance, de dialogue et de rencontre. Or, les jeunes d'aujourd'hui la portent inégalement ; cela dépend beaucoup de la manière dont ils ont été éduqués. S'ils ont été introduits dans la vie chrétienne comme une phalange de militants chargés de manifester sa superpuissance à l'égard de son environnement, ils ne sont pas dans cette perspective. S'ils ont été élevés dans la foi et la conviction que la communion au Christ change le regard sur le monde, ils le sont. »

Tout est dit. La perspective des ultras n'est pas celle de l'évangélisation.  Evangélisateur et  militant sont deux choses différentes. Foi et phalange sont incompatibles. La quête de communion n'a rien à voir avec le réflexe de condamnation... En ce dimanche de Pâques 2012, le cardinal a montré le chemin de la Nouvelle Evangélisation. C'est un chemin plus aventureux que la rue des parades : mais c'est le chemin du salut.

 

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1. Si l'on est catholique romain. (Pour leur part, les intégristes suivent une autre ligne qui n'engage qu'eux : et ils iront au bout de cet engrenage, si l'Esprit Saint ne leur ouvre les yeux à temps. On ne s'imagine pas impunément « suppléer » à l'Eglise de Pierre, sur le plan spirituel et sacramentel).