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29/01/2011

Le christianisme est une conversion radicale – à l'essentiel – et pour l'avenir

christianisme...donc une révolution,

   en chacun et à tout instant :


 

 

Le monde change de plus en plus vite ; populations, mentalités, l'Europe de 2050 n'aura inéluctablement rien à voir avec celle de 1950. C'est un fait. Aucune posture, en 2010, ne saurait l'exorciser. Cette réalité sans précédent est le terrain que Dieu donne à évangéliser : et cette évangélisation est la tâche à laquelle chaque chrétien est tenu.

Le « chrétien » a foi en la personne de Jésus Christ. Cette foi unique vient par des sources diverses (transmission ou conversion), mais son effet est toujours et constamment la conversion : un mot qui veut dire « retournement ». Rencontrer la conversion à l'âge adulte, c'est rompre radicalement avec ce que l'on croyait être.  Ensuite le chrétien est appelé à se « convertir » à chaque instant : à recentrer continuellement sa façon de penser et sa façon de faire. La recentrer sur quoi ? Sur l'Evangile, leçon de vie. Convertir nos actes et nos pensées, c'est voir s'ils sont dans l'esprit de l'Evangile : s'ils apparaissent difformes dans cette lumière,  nous devons les modifier.

Cette voie est la seule, pour des chrétiens. Nous avons tous du mal à la suivre. Aucun de nous ne peut donc avoir bonne conscience.

Chacun de nous doit se convertir tous les jours. Dans l'évangile de ce dimanche, le Christ donne la charte du témoignage chrétien : les Béatitudes, la façon d'anticiper sur terre la lumière éternelle. Ce sont neuf voies : pauvreté, douceur, compassion, obéissance, miséricorde, pureté, paix, persécution [1], patience. A chacun de suivre ces voies, dans l'Esprit, s'il veut être en harmonie avec le Père par le Fils.

Inverse des valeurs du paganisme antique, les Béatitudes sont aussi l'inverse des valeurs du paganisme moderne. Elles carbonisent nos petits arrangements avec lui. Se convertir, c'est opter pour les Béatitudes et essayer d'en vivre au moins une, à la grâce de Dieu – et ne pas laisser les vieux réflexes (le paganisme sociologique) brouiller la voie.

Ceux qui veulent être chrétiens, vous et moi, n'ont pas d'autre feuille de route. Le malheur est de lui être infidèles : mais ce n'est pas un malheur irréversible puisque la conversion s'ouvre à chaque instant.

Le chrétien doit suivre cette route non seulement pour lui-même, mais pour y convier les contemporains qui n'en ont pas idée. S'ils s'en font une idée fausse, c'est que le chrétien suit mal la route. Sa responsabilité est grande.

 

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[1]  "Supporter avec douceur et sérénité toutes les attaques, quand nous ne gardons au coeur que le pardon, un pardon total qui nous fait prier pour nos persécuteurs et les aimer réellement."   (P. Thomas Philippe, o.p.)

 

Commentaires

RESPONSABILITE

> C'est exactement ça. La responsabilité du chrétien est grande. 100% d'accord.
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Écrit par : Henrik/ | 29/01/2011

UNE SEULE ?

> Conversion, oui, et conversion permanente, mais pourquoi suivre une seule des Béatitudes? Je crois que se laisser conduire par l'Esprit, c'est à chaque instant savoir reconnaître à quelle Béatitude les circonstances nous appellent. Choisir "sa" Béatitude, ne serait-ce pas se substituer à l'appel de Dieu ?

HH


[De PP à H. - Je ne veux évidemment pas dire qu'il faille "choisir", mais simplement que c'est déjà beau d'arriver à en vivre une. Les vivre toutes est la sainteté : et même plus que ça - car beaucoup de saints répertoriés ont eu du mal à se désencombrer de leur propre caractère ! ]

réponse au commentaire

Écrit par : Hubert Houliez / | 29/01/2011

NOTRE BLOG

> Cher PP, je trouve que vous venez, par ce billet, d'écrire ce qui fait l'essence de votre blog qu'un ami m'a fait découvrir il y a quelques mois. Continuez votre travail, inspiré par l'Esprit, qui m'aide beaucoup à 'carboniser' nos vieux réflexes païens, sociologiques ou ataviques. C'est toute ma vision du monde et d'autrui que je suis en train de revoir: ce n'est pas toujours de gaieté de coeur et la tâche paraît immense.
A propos de vision du monde, je discutais avec mon épouse autour du repas familial, du livre d'Amin Maalouf qu'elle est en train de lire: "Le dérèglement du monde". Ce qu'elle m'en dit me semble correspondre à beaucoup d'idées rencontrées sur votre blog et dans les commentaires de lecteurs, d'ailleurs presque toujours de très bon niveau. Que pensez-vous de ce livre ?

HvdV

[ De PP à H. :
- Merci de votre appréciation. Elle me me touche beaucoup. Une communauté de non-conformistes se forme autour de notre blog, et j'en suis heureux.
- La thèse de Maalouf est excellente, c'est l'anti-Huntington. Son livre désigne la globalité systémique de la crise, qui affecte à la fois l'Orient et l'Occident. Puisse-t-il aider à la prise de conscience de cette globalité par les catholiques. Certains se libéreront ainsi de l'idée d'antinomie Orient-Occident (idée fausse dont ils restent encore souvent prisonniers) et d'une vision pessimiste de l'avenir : pessimisme pathologique qui les dissuade de participer à à l'évangélisation. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Hendrik Van de Velde / | 29/01/2011

UN CRI A CHACUN

> Je dois dire que votre réflexion est absolument "renversante" ("convertissante" au sens premier du terme) et elle intervient à un moment où le thème de l'évangélisation est - c'est le moins que l'on puisse dire - passionnément défendu par un bon nombre des prêcheurs que j'écoute régulièrement. C'est une sorte de cri qui est lancé à chacune des congrégations pour inviter sous une forme ou une autre les chrétiens à rejoindre les "lost" (ceux qui ne connaissent pas le Christ et son évangile) où ils se trouvent. Les initiatives sont diverses et prennent des formes variées : prière, distribution d'invitation... la Church of the Highlands a même proposé pendant plusieurs semaines à ses membres de payer le repas de la personne les suivant dans la file dans les fast-foods. Le résultat a été surprenant, l'église recevant des dizaines de témoignages de remerciement de personnes profondément touchées par le geste et - c'était surtout cela l'objectif - désireuse d'en apprendre plus sur le Christ.
Je ne nous (Français) vois pas en France agir ainsi, je pense même que ce genre de geste de générosité serait perçu comme une sorte d'ingérence intolérable par les personnes concernées... mais cela donne toujours un début de commencement d'idée qu'en fait, lorsqu'il s'agit de répandre la bonne nouvelle du Christ (car c'est bien de cela dont il s'agit : une BONNE nouvelle) toutes les idées sont les bienvenues.
A nous de faire preuve d'un peu plus de courage. Distribuer le journal paroissial dans son immeuble peut paraître un geste trivial mais cela peut très bien entraîner un début de commencement de conversion. L'Esprit souffle là où il veut... encore NOUS faut-il le laisser agir, lui donner toute sa place...
Mon nouveau blog où il est possible de retrouver certains de ces prêches en plein accord (dans le fond des choses ... je passe ici très rapidement sur les questions théologiques, je ne suis pas là pour polémiquer) : http://calvaryandmore.blogspot.com/
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Écrit par : Pierre-Aelred / | 29/01/2011

BONNE NOUVELLE ! BONNE NOUVELLE ! BONNE NOUVELLE ! BONNE NOUVELLE !

> BONNE NOUVELLE nous faut-il hurler, crier, soupirer, murmurer... mais dans tous les cas il ne faut pas garder cette bonne nouvelle pour nous seuls. Malheureusement depuis une trentaine d'années le système (comprenez ce que vous voulez par ce terme) nous a appris à ne pas ne serait-ce "qu'avouer" que nous sommes Chrétiens. Cela fait tache, c'est une sorte de malformation congénitale qui est d'une part difficile à cacher (mais nous faisons tout pour y parvenir...), dont parfois nous avons honte et qui aujourd'hui bien souvent nous fait nous sentir mal à l'aise lorsque notre voisin, notre collègue de travail, le chauffeur de bus ou le cafetier nous en sort une bonne sur le Saint Père ou le Christ. Surtout nous n'allons pas nous mettre à dos Gérard ou Raoul en lui disant qu'un minimum de respect pour les personnes - si ce n'est pour le message - serait bienvenu. Non, nous préférons nous taire et le lendemain nous commandons à nouveau un café au même comptoir là où la veille Benoît XVI était désigné comme un pédophile néo-nazi... alors quant à "défendre" le Christ et annoncer la Bonne Nouvelle... là c'est vraiment trop demander.
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Écrit par : Bébert / | 29/01/2011

A P.P.

> Compris comme cela, oui, bien sûr! Et, s'il vous plaît, d'où vient cette belle citation du Père Thomas Philippe ?
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Écrit par : Hubert Houliez / | 29/01/2011

LE CHOIX : CONVERSION EN CHRIST OU APOSTASIE LIBERALE-LIBERTAIRE

> « Le démon l’emmena alors plus haut, et lui fit voir d’un seul regard tous les royaumes de la terre. Il lui dit : « je te donnerai tout ce pouvoir, et la gloire de ces royaumes, car cela m’appartient et je le donne à qui je veux. Toi donc, si tu te prosternes devant moi, tu auras tout cela. » Jésus lui répondit : « il est écrit : Tu te prosterneras devant le Seigneur ton Dieu, et c’est lui seul que tu adoreras. » » (Tentations de Jésus au désert. Luc 4, 5-8).
Le monde chrétien, éprouvant les ruses séductrices propres à notre temps, est tenté de succomber aux sirènes de la puissance feutrée, sans même s’en apercevoir de prêter l’oreille à l’esprit de Lucifer qui depuis sa rébellion n’a qu’une obsession dans l’histoire humaine : entraîner l’homme avec lui dans sa chute, le détourner de l’humilité Dieu en lui suggérant d’être grand et fort pour mieux l’empêcher d’être sauvé en se reconnaissant petit et vulnérable.
Le monde chrétien est travaillé en profondeur par la tentation de se soumettre aux richesses et plaisirs chimériques, à la culture du moi-triomphant de l’ordre libéral libertaire. Nous sommes invités de toute part à poliment fermer l’œil sur l’injustice et l’égoïsme fondamental qu’il constitue et plus que tout sur sa contradiction intrinsèque avec l’esprit de pauvreté évangélique.
Un discours rampant comme Satan, menaçant de toujours un peu plus imprégner l’Eglise, est subtilement distillé, lentement digéré, appelant en filigrane les chrétiens à accepter le monde tel qu’il est, à faire avec, et finalement de se contenter de lui apporter un supplément d’âme. Nous sommes invités à apporter notre pierre à sa moralisation, tâche si noble et si flatteuse qu’elle nous ferait oublier que nous voilà ainsi menacés de devenir ses idiots utiles.
Un lent travail de sape est à l’œuvre, consistant à décomplexer les chrétiens quant à leur pleine participation aux mots d’ordre de la croissance économique et de l’idéologie du bien-être. Comme une imperceptible et omniprésente force hypnotique qui nous commanderait de préserver en douceur et en toute bonne conscience notre place dans le monde douillet des bien-portants, en rien contradictoire, sifflote gentiment cette force en nos oreilles, avec ce « petit plus » qui consiste à être chrétien.
Ca en deviendrait presque « vendeur » sur un CV : j’ai fait de l’humanitaire, 3 sauts en parachute et chui chrétien. Un grand cœur, un corps robuste et une morale d’enfer.
Je vais en retraite spirituelle le week-end en famille dans de beaux et verdoyants monastères pour y recevoir un enseignement plein de sagesse et de profondeur, m’en trouver ressourcé pour, dès le lundi matin, plonger à nouveau, le sourire aux lèvres et les chouquettes sous les bras pour les collègues (le fameux petit plus !) dans l’impitoyable arène de la compétitivité, de la lutte effrénée pour sauvegarder ma réputation sociale d’homme convenable. Tout va bien. Ce soir je remplis le bulletin d’inscription pour l’école de management de mon fils. La rentrée approche…
Dans nos belles églises de nos jolis et propres centres ville, où sont les pauvres, les fêlés, les désespérés, ceux qui n’ont plus rien à perdre, ceux qui ressemblent à notre Seigneur crucifié ? Vers quels prometteurs et douloureux chemins de rupture le chrétien a-t-il vocation à s’engager ?
« Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans les cieux. Puis viens, suis-moi. (…) Et Jésus dit à ses disciples : amen je vous le dis, un riche entrera difficilement dans le royaume des cieux. Je vous le répète : il est plus facile à un chameau de passer par un trou d’aiguille qu’à un riche d’entrer dans le royaume des cieux. » (Evangile de Saint Matthieu 19, 21-24).
Heureusement que les médias chrétiens sont là pour nous rassurer. Le coup de l’aiguille et du chameau ? Une image ! Il faut savoir interpréter ! Du troisième, du sixième, du quatre centième degré !
Les médias, que l’on continue par habitude à qualifier de catholiques, jouent un rôle majeur dans ce tragique détournement en cours. Un « journal catholique », c’est un lieu où l’on dit « le pape, le pape, le pape » pour mieux faire semblant de ne pas entendre et de ne pas faire part pour ce qu’elles sont, des interventions de plus en plus radicalement anti-capitalistes, des incessants et prophétiques appels au renoncement lancés par Benoît XVI, notre admirable pape, haï comme il se doit par la cohorte des anti-catholiques fidèles aux consignes officielles de canal + ou de charlie-hebdo, acclamé par simple convenance d’appartenance identitaire par de si nombreux catholiques, réellement écouté et lu par si peu d’entre nous.
Un « journal catholique » c’est un lieu où entre des articles sur la vie des monastères, sur la charité chrétienne au travail, sur « ces bénévoles admirables qui travaillent auprès des pauvres », on fait glisser un papier sur le dernier salon de l’automobile et le dernier modèle («plus sûr » et «plus écologique » !) de la voiture électrique, puis un autre papier sur les nécessaires mesures du gouvernement pour « doper » la croissance économique et la compétitivité de nos entreprises. N’oublions pas de signaler aussi ses courageuses, impopulaires et évidemment incontournables décisions pour réduire la dette publique… En toute logique avec ce qui précède, on y fait part des mesures gouvernementales pour « s’adapter » infra structurellement au réchauffement climatique, relayant ainsi dans une soumission idéologique pitoyable, la thématique désormais en vigueur de l’adaptation à la catastrophe, ultime dérobade des lâches qui refusent de poser les enjeux de sa courageuse conjuration, de la confrontation au réel qu’elle suppose.
Lamentable déni, qui vient d’autant plus pernicieusement contaminer les esprits, qu’il est distillé en un langage soft, douceâtre et tellement inoffensif en apparence.
Un « journal catholique », c’est un lieu où l’on succombe à tous les conformismes éditoriaux, à tous les lieux communs en vigueur sur le développement durable, la croissance verte, et la moralisation du capitalisme, afin de mieux éluder la question de son alternative radicale, du tournant vital des sociétés humaines de l’abondance vers la sobriété, de la puissance vers l’humilité.
C’est un lieu, comme un tranquillisant, où l’on apprend sagement, sans se l’avouer, à subordonner sa foi aux injonctions du monde…
Les "journaux catholiques" : comme un signe des temps de la grande apostasie qui vient, l'épreuve ultime que traversera notre Eglise à la fin des temps, où la grande majorité d'entre nous catholiques, l'abandonnerons et avec elle ses vérités exigeantes. Annonciateurs et acteurs d'un christianisme light, poli et convenable, en phase avec les objectifs de l'idéologie du bien-être et de la croissance, avec le tampon "catholiques" sur le front, nous serons devenus les alibis parfaits.
Il m’est si souvent arrivé d’entendre un « discours » d’Eglise posant l’enjeu de la pauvreté évangélique en termes purement symboliques et spirituels que cela finit par en devenir suspect, expression récurrente d’une forme de déni de sa dimension matérielle, des choix de vie, des ruptures parfois radicales, qu’elle est susceptible d’appeler pour chaque chrétien. Certes il s’agit de se méfier d’une compréhension de la pauvreté évangélique qui serait purement matérielle. Oui, certes et une bonne fois pour toutes, l’on peut être riche matériellement et doté d’un vrai esprit de charité, et être démuni et rempli de haine et d’envie. Oui, le dépouillement de nos biens matériels et de notre réputation sociale, s’il n’est pas vécu dans la justesse de la conversion du cœur, n’est pas en soit un gage d’humilité ou une voie de salut. Il peut même devenir une manifestation aiguë de notre orgueil : regardez moi dans ma pauvreté comme je suis un saint homme, un vrai disciple du Christ, détaché des biens de ce monde ! Mais ne s’en tire-t-on pas à très bon compte en ressassant ce genre de contre argument ? Ne devient il pas le prétexte complaisant à notre bonne conscience de chrétiens bien intégrés socialement, bien sous tout rapport ?
Peut-on le matin se gargariser de sa pauvreté en esprit et l’après-midi, remplir en toute bonne conscience le réservoir de son 4x4 glouton en ces agro carburants qui sont (ouvrons les yeux !) synonymes entre autre de dépossession de terres agricoles vitales pour des centaines de millions de petits paysans et pour leur famille ? Pauvreté du cœur, charité chrétienne que de faire semblant de ne pas voir le lien intrinsèque entre la perpétuation de notre confort, de notre mode de vie douillet, et l’imperceptible assassinat à feux doux de la partie la plus humble, la moins « utile », la moins productive de l’humanité, précisément celle qui incarne en ce monde la voie des béatitudes, celle qui est le signe des temps du Christ crucifié ?
Le choix des agro carburants, c’est le choix qui ne dit pas son nom : celui du sacrifice d’une partie de l’humanité, de la catastrophe alimentaire annoncée, du massacre des sols et de la biodiversité, de la désertification, d’une accentuation accélérée du réchauffement climatique, pour que continuent de rouler, de polluer et de tuer, nos si jolies petites et grosses bagnoles repeintes en vert pomme!
Peut-on le dimanche, en toute tranquillité, communier au corps et au sang du christ, et le lundi matin, tout naturellement, sous hypnose, aller déposer son argent dans une de ces banques qui n’ont d’autre fonction que de financer les projets les plus délirants, les plus polluants, les plus destructeurs, les plus inhumains des grandes multinationales, d’alimenter jusqu’à la folie la spirale infernale de la spéculation et de la dette, croissance économique oblige ?
Basta !!! J’en ai un peu marre d’être un gentil catho. On a beau être catho on a quand même des dents, et les dents c’est aussi fait pour mordre. Rrrrrrrrrrr !
Je ne veux pas devenir un chrétien conforme à ce que l’idéologie libérale-libertaire rêve qu’il devienne : un cocktail particulièrement peu explosif à base de niaiserie, d’hypocrisie, et de lâcheté…
Il y a peu, le journal La Croix nous expliquait très sérieusement que la fibre écologiste des français ne cessait de grandir, pour preuve : l’augmentation en deux ans de 103% de l’énergie produite par les agrocarburants !
Niaiserie, hypocrisie, lâcheté…Rrrrrrrrrrrr !
Sans doute le même journal expliquera-t-il bientôt au bon catholique (si ça n’est déjà fait, ce dont il n’y a guère de raisons de douter…) que non seulement il s’agit de s’adapter au plus vite au réchauffement climatique, mais que de surcroît il faut positiver et y voir une « formidable opportunité en termes de dynamique économique et technologique, une source de nouvelles richesses et d’emplois ». Une augmentation moyenne de 4° des températures : en voilà une idée qu’elle est bonne pour «relancer la machine économique et pour résoudre enfin -!- l’épineux problème du chômage ».

« Les Béatitudes révèlent le mystère du Christ lui-même, elles nous appellent à entrer dans la communion avec le Christ(…) elles sont des signes qui indiquent aussi la voie à l’Eglise qui doit reconnaître en elles son modèle ; elles constituent pour chaque fidèle des indications pour suivre le Christ, même si c’est de façon différente, en fonction de la diversité des vocations(…)
Le sermon sur la montagne en tant que tel n’est pas, il est vrai, un programme social. Mais la justice sociale ne peut croître que là où la grande orientation qu’il nous donne reste vive dans nos convictions et dans notre façon d’agir, là où la foi procure la force de se déposséder soi-même et de se sentir responsable de son prochain comme de la société. Et l’Eglise tout entière doit rester consciente du fait qu’elle doit être reconnaissable aux yeux de tous comme la communauté des pauvres de Dieu. » (Joseph Ratzinger – Benoît XVI, Jésus de Nazareth, pages 95-99)
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Écrit par : serge lellouche / | 29/01/2011

à Serge Lellouche

> Serge Lellouche, je n'ai pas attendu votre permission expresse pour faire suivre vos commentaires à certains de mes proches, j'espère que vous n'y verrez pas d'inconvénient et pardonnerez ma témérité : vous y exprimez totalement ce que je vis et ressens, et ai parfois tant de mal à formuler.
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Écrit par : PMalo / | 30/01/2011

CHARLIER ET FOLLEREAU

> Pour rebondir sur les propos de Serge Lellouche, "Un lent travail de sape est à l’œuvre, consistant à décomplexer les chrétiens quant à leur pleine participation aux mots d’ordre de la croissance économique et de l’idéologie du bien-être."
J'ai été extrêmement frappé, cet été, en lisant l'excellent "Lettres aux Capitaines" de André Charlier, et un petit recueil de citations de Raoul Follereau trouvé par 'hasard', de voir qu'il y a encore quelques décennies, la critique catholique du matérialisme mercantile et du confort mollasson/compétition violente était virulente, juste, équilibrée, prophétique, pourtant en plein boom des Trente Glorieuses !
Certains blogs, dont celui-ci, en sont la continuation. Mais quelle capitulation, quelle trahison, entre temps !
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Écrit par : PMalo/ | 30/01/2011

VATICAN II PARLE DU RISQUE DE CONTRE-TEMOIGNAGE DE LA PART DU CHRETIEN

> 'Gaudium et spes', 19, § 3 :

"Certes, ceux qui délibérément s’efforcent d’éliminer Dieu de leur cœur et d’écarter les problèmes religieux, en ne suivant pas le « dictamen » de leur conscience, ne sont pas exempts de faute. Mais les croyants eux-mêmes portent souvent à cet égard une certaine responsabilité. Car l’athéisme, considéré dans son ensemble, ne trouve pas son origine en lui-même ; il la trouve en diverses causes, parmi lesquelles il faut compter une réaction critique en face des religions et spécialement, en certaines régions, en face de la religion chrétienne. C’est pourquoi, dans cette genèse de l’athéisme, les croyants peuvent avoir une part qui n’est pas mince, dans la mesure où, par la négligence dans l’éducation de leur foi, par des présentations trompeuses de la doctrine et aussi par des défaillances de leur vie religieuse, morale et sociale, on peut dire d’eux qu’ils voilent l’authentique visage de Dieu et de la religion plus qu’ils ne le révèlent."
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Écrit par : Luça / | 30/01/2011

Et pendant que je suis occupée à relire Vatican II, constitution dogmatique 'Lumen Gentium' § 31 :

> Le caractère séculier est le caractère propre et particulier des laïcs. En effet, les membres de l’ordre sacré bien qu’ils puissent se trouver engagés dans les choses du siècle, même en exerçant une profession séculière, restent, en raison de leur vocation particulière, principalement et expressément ordonnés au ministère sacré ; les religieux, de leur côté, en vertu de leur état, attestent d’une manière éclatante et exceptionnelle que lemonde ne peut se transfigurer et être offert à Dieu en dehors de l’esprit des Béatitudes. La vocation propre des laïcs consiste à chercher le règne de Dieu précisément à travers la gérance des choses temporelles qu’ils ordonnent selon Dieu. Ils vivent au milieu du siècle, c’est-à-dire engagés dans tous les divers devoirs et travaux du monde, dans les conditions ordinaires de la vie familiale et sociale dont leur existence est comme tissée. À cette place, ils sont appelés par Dieu pour travailler comme du dedans à la sanctification du monde, à la façon d’un ferment, en exerçant leurs propres charges sous la conduite de l’esprit évangélique, et pour manifester le Christ aux autres avant tout par le témoignage de leur vie, rayonnant de foi, d’espérance et de charité. C’est à eux qu’il revient, d’une manière particulière, d’éclairer et d’orienter toutes les réalités temporelles auxquelles ils sont étroitement unis, de telle sorte qu’elles se fassent et prospèrent constamment selon le Christ et soient à la louange du Créateur et Rédempteur."
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Écrit par : Luça / | 30/01/2011

@ Luça

> Il suffit - malheureusement - pour cela d'aller tester "l'accueil" des nouveaux arrivants dans certaines paroisses ou l'ouverture des équipes présentes aux compétences nouvelles qui peuvent leur être proposées ou tout simplement écouter cinq minutes les conversations sur la parvis à la fin de l'office. Si vous êtes saisi par le Christ, prêt à tout donner... cela peut faire très mal.
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Écrit par : Pierre-Aelred / | 30/01/2011

@ Serge Lellouche et PMalo,

> Sur le fond, je suis bien d'accord avec vous. Sur la forme, vous me faites froid dans le dos, vraiment.
Cessons de taper sur les autres cathos, ceux qui n'ont pas compris les implications sociales de leur foi, (ou qui les comprennent autrement avec autant de sincérité que nous) sinon nous allons dégouter les non-chrétiens de nos querelles internes "voyez comme ils ne s'aiment pas" et nous allons crisper des chrétiens sur leurs positions "sociologiques".
Vous avez raison de dénoncer certaines positions sociologiques mais, justement, un peu d'indulgence ne serait pas de trop.
On peut avoir été un scout facho, Saint-Cyrien, être passé par les bonnes facs privées thomistes, avoir cru voir en Hayek un penseur de la tradition dans la ligne de Saint Thomas et évoluer pour rejoindre des positions proches des vôtres. C'est mon cas. Si je m'étais arrêté aux insultes que je lis ici ou là contre les cathos bourgeois, je n'en serais pas où j'en suis.
Nous tombons dans un moralisme nouveau, ne devenons pas à notre tour des pharisiens, proposons une autre voie sans pour autant insulter ou critiquer des frères dans la foi, nous ne connaissons pas le secret des consciences.
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Écrit par : Hubert Houliez | 30/01/2011

REPONSES

> Merci beaucoup PMalo ; cette communion d’esprit entre nous me touche vraiment. J’aimerais être capable de l’humilité dont vous faites preuve dans vos interventions.
Sur Paul Ariès (je vais écouter l’entretien sur terre à terre), je vous envoie le lien vers son intervention passionnante dans le cadre de « chrétiens et pic de pétrole ». Il y explique notamment ce qui se trame derrière le discours en apparence neutre sur l’ « adaptation » au réchauffement climatique : le choix non-dit d’orienter notre cheminement collectif vers l’horizon cauchemardesque du transhumanisme, plutôt qu’une réorientation profonde de notre civilisation vers la sobriété. Mais il évoque aussi ce bol d’air et cette espérance que constitue le mouvement du « buen vivir » venu d’amérique latine. 4 parties :
http://www.dailymotion.com/video/xgn675_webcam#from=embed
http://www.dailymotion.com/video/xgnmz9_paul-aries-l-homme-dans-la-decroissance-2_webcam#from=embed
http://www.dailymotion.com/video/xgnjg1_webcam#from=embed
http://www.dailymotion.com/video/xgnjgo_webcam#from=embed
A lire bien sûr aussi ses articles si stimulants et vivifiants tous les mois dans La Décroissance, malgré le conformisme anticlérical auquel ce journal veut bien, trop souvent, succomber.
Le vent de l’Esprit souffle là où on ne l’attend pas. Comme le dit Anne Josnin, c’est parfois du côté des plus athées (au-delà de leur sempiternelle répulsion anti-papale) que l’on redécouvre le sens du cheminement chrétien, que l’on est touché par cet esprit vivant qui nous aide à nous relever, à libérer notre désir de témoigner de notre foi. Notre Eglise se trouve parfois là où on l’attend le moins et on s’en réjouit, absente là où l’on pourrait attendre qu’elle se trouve et l’on s’en afflige. Le Seigneur est déroutant. Alléluia !
A propos du texte de Vatican II proposé par Luça,
La tiédeur catholique est un contre témoignage chrétien. A partir de quel point, à l’aune de quel critère, un certain excès de zèle catholique risque-t-il de devenir à son tour une autre forme de contre témoignage chrétien ? Cette question me taraude d’autant plus profondément que je me sens directement exposé, dans bien des traits de ma personne, à cet écueil, notamment à travers la dureté et l’intransigeance que peuvent parfois revêtir mes mots. Cette dureté est-elle chrétienne ou anti-chrétienne ? Dans le combat, d’abord spirituel et en second lieu politique, auquel le chrétien est appelé, je crois qu’il est vraiment fondamental de se poser la question : rester alerté par cette part de doute en nous-même quand le souffle de la colère et de l’ironie risque de nous faire déraper, de nous éloigner du Seigneur quand l’on veut lui rendre témoignage ; mener aussi loin que possible un discernement, prier le Seigneur pour nous aider à trouver la justesse dans ce domaine. Où est la justification chrétienne de la colère ? Comment dans la colère faire la part entre le pêché et le pêcheur, entre le discours faux et celui qui le porte ? Comment désigner l’ennemi, le reconnaître en soi et à l’extérieur de soi, sans l’enfermer, tout en laissant toujours une porte ouverte, par delà laquelle nous touche la lumière de la compassion et du pardon.
Colère, fermeté, dureté, intransigeance. Autant de mots, autant de questions devant lesquelles je suis si souvent renvoyé à la faiblesse de ma foi, face auxquelles je mesure la profondeur du chemin de conversion à accomplir.
La conversion est abandon et transformation dans la grâce de Dieu. On risque de s’en détourner et d’y résister autant dans la tiédeur que dans une colère close sur elle-même. Ce tiraillement m’habite et me torture l’esprit.

A Hubert Houliez,
Les quelques lignes qui précèdent contiennent déjà une bonne part de la réponse que je tiens à apporter à votre commentaire. Sachez que j’entends et que je comprends ce que vous nous dites. Même si vos mots me « piquent », ils sont vraiment importants pour moi, m’appellent à trouver une justesse, et font écho à ce tiraillement dont je viens de parler.
Je suis convaincu que notre temps est celui de la clarification et de la radicalisation, de nos positionnements, de nos choix, malgré le risque de dureté verbale ou d’un excès de volontarisme. Ma sensibilité personnelle me pousse spontanément à la radicalité, tout en étant constamment « titillé » par l’intuition de tous les travers « moralisant » vers lesquels cette radicalité peut si vite mener. Mais je suis ce que je suis, je l’assume autant que j’en souffre.
Je crois qu’aucun de mes mots n’appelle à une «pureté » de nos actes et de nos pensées, mais bien plutôt au choix résolu et urgent d’entamer un cheminement jusque dans le concret de notre réalité sociale, avec évidemment, accrochées à nos basques toutes nos vieilles casseroles et avec le poids de nos fardeaux sur les épaules. Je pêche peut-être par excès de radicalité, pas par puritanisme, croyez-moi ! Par ailleurs, combattre avec virulence l’idéologie mensongère véhiculée par les médias catholiques n’équivaut pas à juger du secret des consciences et des cœurs des personnes portant ce discours. Convenez en.
Si certains de mes mots ont pu vous blesser de par votre histoire personnelle, je m’en excuse fraternellement. En tout cas, je vous remercie de ce que vos mots m’interpellent et me bousculent. Aimer son prochain, n’est-ce pas aussi parfois le bousculer ?
Je reconnais la part de vérité et de charité que votre appel à la tempérance exprime. Reconnaissez la part de vérité et de charité qu’une forme de radicalité dans les mots peut aussi exprimer.
Vous vous êtes rapproché de nos positions, je me suis rapproché des votres. Je n’étais pas un scout facho, mais un bon libéral-libertaire de gauche persuadé d’être en tant que tel forcément du côté du bien. On n’en guérit pas du jour au lendemain.
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Écrit par : serge lellouche / | 30/01/2011

@ Serge

> La radicalité de l’expérience de la conversion entraîne un complet retournement, une réorientation de tous les pans de son existence. Et cette radicalité peut causer des excès :
- Voir tous les autres (ou presque) comme des « endormis » et/ou des « tièdes ».
- Basculer dans une forme d’intransigeance.
A partir de là peut se glisser l’obsession qu’on ne peut faire, pour être vraiment chrétien, aucun compromis d’aucune sorte. Donc, sous peine de «coopération formelle avec le mal », de collusion avec des « structures de péché », on ne peut pas travailler dans telle entreprise multinationale, exercer telle profession, consommer tel produit, posséder tel bien matériel, professer telle opinion, on ne peut pas ne pas dénoncer radicalement ceci ou cela, ne pas lutter concrètement pied à pied contre telle injustice etc. Et voilà qu’un catalogue d’interdits et d’obligations tombe comme un couperet : alors, tu es vraiment chrétien ou non ? Choisis !
Il y a peut-être là un désir de pureté et de perfection excessif et une tentation de réduire la foi à la mesure de sa propre expérience personnelle. À mon avis, il faut se garder d’accabler les âmes, de vouloir leur faire porter un fardeau trop lourd. La Croix est pour tous, mais elle est différente pour chacun (sa forme, son poids, son « format » en quelque sorte).
Je suis frappé par l’enseignement de saint Josémaria qui expose simplement que le plus grand nombre des chrétiens est appelé à sanctifier une existence ordinaire qui diffère peu en apparence de celle de nos contemporains ; appelé à exercer honnêtement sa profession, à faire progresser sa vie de couple, à éduquer correctement ses enfants, à semer la paix et la joie dans sa vie sociale et amicale etc. En orientant toutes ces choses ordinaires vers Dieu, elles deviennent un chemin de sanctification. J’aime la simplicité et le côté concret de cet enseignement qui, à titre personnel, me fait rejeter la tentation du fanatisme et de l’intransigeance. Cela peut être, sur le plan de la vie intérieure, une chose tout à fait «radicale » que de s’engager sur un tel chemin. Je suis convaincu que beaucoup de personnes vont au ciel après avoir mené une vie très ordinaire et fait beaucoup de bien autour d’eux sans jamais s’engager radicalement dans quoi que ce soit, sinon leur vie intérieure.
Amitiés,
Guillaume
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 31/01/2011

A PROPOS D'EVANGELISATION...


> et de toutes les bonnes raisons de ne rien faire :
What If I’m Not a Gifted Evangelist?
"I understand there are many obstacles to evangelistic practice; I know this because I’ve used them all as excuses avoid evangelistic opportunities. Given the opposition of the world, my clumsy or even failed attempts, and the challenge of my sinful heart, evangelism seems best left to winsome religious professionals who have silver tongues and the backing of large religious organizations. They just seem so . . . gifted at it. But what is being “gifted at evangelism,” anyway?"
http://thegospelcoalition.org/blogs/tgc/2011/02/01/what-if-im-not-a-gifted-evangelist/
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Écrit par : Pierre-Aelred / | 01/02/2011

LE MORAL

> le dernier paragraphe écrit par Guillaume de Prémare le 31/0111 m'a "remonté" le moral et j'ai pu me situer en tant que chrétienne au sein de ce monde en pleine transformation de toutes sortes. Les "chrétiens ordinaires" font, avec l'aide de Dieu, et leur volonté d'aller vers le Père, ce qu'ils peuvent dans leur vie quotidienne très perturbante. Mais je crois en la prière d'intercession afin que l'intelligence de l'humanité, s'ouvre, peu à peu, vers la vérité, celle d'où jaillira la lumière de la foi en Jésus-Christ.
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Écrit par : jouanneau léa / | 01/02/2011

POUR TOUS

> Oui Léa, la vie quotidienne peut être très perturbante, envahie par une forme de "frénésie" comme dit Pierre Rabhi. Et nous chrétiens vivons à peu près comme tout le monde, au coeur de cette frénésie, selon notre culture, notre milieu social, notre niveau socio-professionnel etc. A part un moine, quel chrétien peut dire qu'il a un mode de vie radicalement différent de ses contemporains ?
Il y a des chrétiens dans tous les milieux, sociaux ou professionnels. J'ai même connu une chrétienne qui était propriétaire de casino ! Dans chacun de ces milieux, le chrétien vit plein de choses identiques à ses semblables, rencontre les même difficultés, rythme sa journée de manière très similaire, a des aspirations humaines proches de celles des autres. Ses vacances et ses loisirs ressemblent aux vacances et aux loisirs des autres : le chrétien discute avec ses collègues du dernier film comique de Dany Boon, échange sur le dernier roman Marc Lévy, raconte son après-midi en famille à Disney Land ou ses trois jours à Center Parc etc.
Le chrétien est dans le monde, ce monde qu'il est appelé à aimer et à sanctifier. Et c'est justement parce qu'il est comme les autres que le chrétien peut évangéliser son mileu. Car Jésus est pour tous, pas pour une race marginale de bêtes curieuses que nos contemporains pourraient regarder en se demandant : qui sont ces gens qui ne vivent pas comme nous ? Le chrétien est un discret contemplatif dans le monde. C'est ainsi qu'il est dans le monde sans être du monde.
Alors, votre place en tant que chrétienne dans le monde ? Strictement la même place que n'importe quelle personne non chrétienne de votre milieu. Seulement, vous, vous aurez à coeur de hisser la croix du Christ au sommet de toutes vos activités humaines tout à fait semblables aux autres.
Voilà pourquoi, dans notre religion, sauf vocation spéciale, la personne qui se convertit ne quitte ni sa famille, ni ses amis, ni sa profession, ni sa sociologie, ni sa culture, ni ses goûts et préférences, ni ses opinions etc. Il donne à toutes ces choses qui sont bonnes un autre sens, il les convertit vers leur vraie finalité, vers le ciel, et devient le levain dans cette pâte quotidienne qui reste strictement la même.
On lit parfois dans les revues des témoignages de gens extraordinaires qui ont tout changé à leur vie après leur conversion, qui ont fait un choix radical etc. C'est très bien, mais je ne suis pas certain que ce type de témoignages touche un grand nombre de nos contemporains. Car 99% des gens ont une vocation très ordinaire, n'ont aucune intention de changer radicalement leur vie quotidienne et ils ont bien raison.
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 01/02/2011

A Guillaume de Prémare,

> Merci Guillaume pour votre commentaire très stimulant. Vous soulevez des questions qui m’interrogent et me bousculent depuis longtemps, et apportez des réponses face auxquelles je me sens dans une grande ambivalence, dans un profond accord et désaccord à la fois.
Vous mettez l’accent sur deux points, qui en fait se complètent : Primo, la radicalité risque de mener vers un désir de pureté et de perfection excessif, un refus intransigeant du moindre compromis, de la moindre collaboration aux biens, aux structures et aux idées du monde. Du coup, l’on est tenté de porter un regard sur notre prochain à l’aune de sa pureté ou de sa tiédeur.
Secondo, notre vie chrétienne doit avant tout être vécue dans l’ordinaire de la vie. C’est d’abord ici que se joue la rencontre avec la grâce de Dieu, et ces cadres concrets de notre existence nous détournent de postures fanatiques et intransigeantes.
J’adhère profondément à cela, mais un complément me manque, ouvrant à une autre dimension de la foi et du cheminement chrétien. Celui-ci est je le crois intrinsèquement paradoxal, à la fois radical et relatif, à la fois extraordinaire et ordinaire, à la fois grandiose et simple. Le chrétien est dans le monde sans être de ce monde.
Je comprends ces excès que vous soulignez, vers lesquels la radicalité peut mener. Je m’effraie si souvent de cette part de moi-même tentée d’y succomber. Mais ne risque-t-on pas de jeter trop rapidement le soupçon sur des sensibilités chrétiennes radicales, d’identifier trop vite cette radicalité à du puritanisme et à du moralisme inquisiteur ? N’est-ce pas précisément une des caractéristique de l’idéologie du monde, qui travaillant à verrouiller les consciences, voudrait établir un lien dans les esprits entre aspiration spirituelle radicale et fondamentalisme ? A force de se méfier, à juste titre (!) d’un perfectionnisme spirituel orgueilleux, le monde chrétien de notre temps ne risque-t-il pas de succomber à un travers inverse, celui d’une forme de complaisance à l’égard de notre imperfection, de nos compromis ? Est-ce dresser un catalogue d’interdits, est-ce « accabler les âmes », que d’interroger notre rapport aux biens matériels, aux opinions, notre inscription dans les rapports capitalistes et productivistes de ce monde ? L’esprit de radicalité chrétienne, sur ces questions, nous appelle-t-il à procéder à des ruptures « pures » et immédiates, ou à témoigner au cœur de la vie sociale, de notre choix résolu de nous orienter, progressivement, au rythme qui nous est propre, selon nos réalités personnelles, familiales, vers un horizon de sobriété, pour nous, pour notre monde, pour notre Dieu ?
Certes avec tous les risques que cela comporte, la vie chrétienne ne comporte-t-elle pas aussi la dimension d’un combat, y compris frontal avec les idées et les formes d’organisations de ce monde ?
Respectons cette part de la sensibilité chrétienne radicale, combative et intransigeante. Je crois que trop la nier en soi et chez l’autre, trop la couvrir d’opprobre, risque précisément d’ouvrir un boulevard aux vrais fondamentalismes.
Il ne s’agit pas de décréter en juge qui est un bon ou un mauvais chrétien mais d’affirmer : non, être chrétien n’est pas compatible avec tout ! Et je crois que dans le monde qui est le notre, il faut plus que jamais l’affirmer et avec force.
Sur le second point, l’inscription de notre foi dans l’ordinaire de la vie. Lorsque j’ai entamé mon chemin de conversion, les jésuites qui m’ont accompagné spirituellement dans les premières phases balbutiantes de ma vie de foi, m’ont tout de suite ramené les pieds sur terre (j’en avais grandement besoin !) imprimant en moi l’exigence d’une expérience de Dieu ancrée dans cet ordinaire de la vie, relationnel, professionnel, etc…Je ne les remercierai jamais assez de m’avoir aidé à réorienter mes pas dans ce sens, plutôt que vers une spiritualité désincarnée, éthérée. Nous ne sommes pas des anges.
Pourtant la vie chrétienne trop unilatéralement vécue dans ces cadres peut avoir quelque chose d’étouffant pour les âmes. Notre monde n’étouffe-t-il pas sous le poids d’une idéologie de la vie quotidienne, de l’expérience concrète ?
L’Eglise aujourd’hui est beaucoup plus tournée vers l’ici et maintenant que vers les grandioses horizons eschatologiques. Sans doute n’en fut-il pas ainsi en d’autres temps. On parle plus dans les groupes de prière de la charité vécue au travail ou dans les cercles d’amis, que du salut de nos âmes, que du sens de notre vie orienté à la lumière des fins dernières. Ce n’est ni un mal ni un bien, ou les deux à la fois, en tout cas cela a sûrement du sens. C’est ainsi, nous en sommes là, et pour certains, dont je suis, la relative absence de cette autre face de la vocation chrétienne, est une souffrance.
Fraternellement.
serge
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Écrit par : serge lellouche / | 01/02/2011

@Guillaume de Prémare

> Merci de vos commentaires.
Ce qui a soutenu le christianisme pendant ses 2000 ans, c'est à côté des saints, ou mieux, dans leur sillage, tout un peuple de fidèles vivant au jour le jour les deux grands commandements: aimer le Seigneur de tout son coeur, de toute son âme et de toutes ses forces; aimer son prochain comme soi-même.
Toutes les conversions ne sont pas un chemin de Damas. La plupart prennent du temps, toute la vie peut-être. Les grands convertis nous inspirent par leur exemple, les petits convertis nous soutiennent par l'amour avec lequel ils vivent leur quotidien.
Merci encore de confirmer que nous avons tous notre (petit) rôle à jouer dans la communion des saints.
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Écrit par : Marie Flouriot/ | 02/02/2011

LES MÊMES QUESTIONS

> Croyez bien, Serge, que je me pose les mêmes questions que vous, dont celles bien sûr de « notre rapport aux biens matériels, aux opinions, notre inscription dans les rapports capitalistes et productivistes de ce monde ».
Le rapport aux bien matériels ? L’Evangile nous en dit : des talents, des dons reçus, à faire fructifier pour le bien de tous. Ceci à traduire concrètement par le chrétien dans sa vie de tous les jours, selon sa conscience, indépendamment de ses opinions (ou de son absence d’opinion) sur le système politique ou économique.
Le rapport aux opinions ? L’Eglise nous dit : liberté, donc responsabilité, donc conscience, donc former et éclairer sa conscience (c’est un devoir). Et toujours en dernier ressort : conscience.
« Notre inscription dans les rapports capitalistes et productivistes de ce monde ? » Vous et moi nous posons la question, d’autres non (et ils sont plus nombreux que nous). Opinion, liberté. Et liberté de ne pas se poser la question. Après, qu’on ait une tendance radicale ou modérée, c’est en soi moralement neutre, les deux tendances peuvent être bonnes, tout dépend ce qu’on en fait. Je suis comme vous assez radical sur cette question, mais si Tartempion est modéré, c’est très bien. Et cela peut m’aider à ajuster mes opinions.
Est-ce que je professe le relativisme en disant cela ? Oui, je défends le relativisme pour tout ce qui est… relatif, non essentiel (j’entends par essentiel : ce qui engage le Salut, le Christ).
L’Eglise ne veut pas créer un catholique certifié « catho 9002 ». Et elle se méfie toujours de la tentation du « catholicisme intégral », qui peut se résumer par : « Si on est catholique cohérent, on pense nécessairement ceci ou cela ». Par exemple, l’Eglise reconnaît toutes les formes de gouvernement, sans acception de légitimité, et n’en préfère aucune.
Alors, qu’est ce qui est intrinsèquement radical dans le christianisme ? A quelle « radicalité » le chrétien est-il invité ? Je voudrais évoquer deux points de la note de PP : 1. « La conversion, c’est rompre radicalement avec ce que l’on croyait être ». Ici, le retournement est profondément « existentiel », intérieur. Au plan externe, ce qu’on était (état de vie, profession, milieu, relations, goûts, opinions, etc.) ne change pas, pour peu qu’il s’agisse de choses nobles et honnêtes, mais le sens et la finalité de ces choses, qui étaient déjà bonnes avant la conversion, s’en trouvent radicalement retournés, orientés vers le Christ, vers le Ciel. 2. « Recentrer continuellement » toutes choses « sur l’Evangile, leçon de vie ». C’est l’aventure de la vie intérieure, et si on veut vraiment appliquer la « leçon de vie » de l’Evangile aux choses les plus ordinaires de notre vie quotidienne, ça brûle radicalement à l’intérieur.
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Écrit par : Guillaume de Prémare/ | 02/02/2011

RADICALISATION

> Guillaume, ne confondons pas l’humilité d’une vie chrétienne simple et ordinaire et l’attiédissement d’une vie de foi qui se complait à se soumettre aux injonctions du monde.
Je me pose comme vous une multitude de questions en essayant de trouver la voie de la justesse, dans un équilibrisme toujours incertain. Je ne doute pas que de votre côté vous procédiez aussi à vos choix, radicaux ou non, selon votre réalité personnelle et familiale propre. Néanmoins, je crois vraiment que les signes des temps nous appellent à une radicalisation assumée. Redécouvrons dans notre façon de penser et d’agir le sens du mot « radical » : qui vient de la racine…
Comme nous y invite Patrice de Plunkett, il est temps de passer à l’offensive.
La grande diversité de nos personnalités, de nos sensibilités, et de nos choix chrétiens ne sont ils pas voués à être autant de « non ! » à la multiplicité des opinions et de modes de vie qui se caractérisent par un même déni fondamental de l’esprit évangélique ? Je crois qu’il ne s’agit pas d’y adhérer en chrétiens, mais de les combattre en chrétiens. Nos âmes assoiffées de beau et de vrai meurent en un monde qui réduit notre horizon existentiel à Dany Boon, à des boulots insensés et à des week-ends à center-parc. Que ce « non » combatif exprime et libère la possibilité d’un choix et d’un horizon de vie radicalement autre ; qu’il aide à ouvrir le coeur du monde au cri d’amour de notre Seigneur.
« Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans les cieux. Puis viens, suis-moi. » (Saint Matthieu 19, 21). Cet appel radical de Jésus au renoncement ne s’adresse pas à un être exceptionnel, doté d’une « vocation spéciale » comme vous dites. Non, en s’adressant à un simple jeune homme venu le questionner, il s’adresse à vous, à moi, à nous tous, à ce 99% dont vous parlez.
Merci Guillaume pour ce beau et vif dialogue qui en appelle d’autres.
Serge
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Écrit par : serge lellouche/ | 03/02/2011

@ Serge

> Voici un enseignement de Mgr Rouet que je lisais avec méfiance il y a encore quelques mois et qui me questionne aujourd’hui :
« Tant que l’Eglise va se contre-distinguer de ce monde, tant qu’elle va vouloir vivre dans une nébuleuse ou en état d’apesanteur, elle perd toute crédibilité. (…) La crédibilité ne se décrète pas. Par conséquent, la crédibilité ne se retrouvera que par l’humilité de partager la vie des hommes, en étant à leur écoute, que par le partage de leurs peines, que par le désir de partager avec eux notre espérance et de les aider à se mettre debout. Il n’y a pas d’autres moyens que Nazareth, que de cheminer comme le Christ sur les routes de Galilée. Il n’y a pas d’autres moyens que le partage de la fragilité humaine. C’est en devenant frères que les chrétiens deviennent crédibles. »
Une question : le chrétien peut-il être un frère crédible s’il se distingue radicalement des ses contemporains, au point qu’il ne soit plus pour eux un « semblable » mais quelqu’un de bizarre dont la vie et les préoccupations leur sont radicalement dissemblables et étrangères ? St Josémaria, que j’ai lu dans toutes les largeurs, nous invite à contempler la manière dont la sainte famille a vécu pendant 30 ans. A savoir comme les autres : une famille, une maison, un atelier de travail. Cette « vie cachée » n’est-elle pas pour nous un modèle ? Notre propre « vie cachée » n’est-elle pas, pour le plus grand nombre d’entre-nous, le seul moyen qui nous soit vraiment accessible de rejoindre, au milieu de nos frères (et avec eux) et du monde (et en l’aimant), le Christ au Thabor et au Golgotha ? N’est-ce pas cela ce « être contemplatif dans le monde » pour « sanctifier le monde » ?
Peut-être avez-vous personnellement reçu un autre appel ? Je ne sais pas. Pour ma part, vivre au milieu de monde sans marque extérieure particulièrement radicale de chrétienté m’apparaît comme un défi, un radical retournement. Voilà qui m’appelle à « tout quitter », bien davantage que de porter une peau de bête et manger des sauterelles. On raille parfois la supposée tiédeur de Mgr Rouet. À mon avis, il faut y réfléchir à deux fois : ce « partager la vie des hommes » qu’il nous propose n’est-il pas finalement beaucoup plus radical que tant de « radicalités chrétiennes » qui nous sont vendues comme autant de « rêves romantiques » très attirants mais hors du temps et de l’espace dans lequel nous sommes inscrits… et tellement loin de la vie concrète de nos frères les hommes ?
Je propose aussi à votre médiation cet extrait de l’homélie de Josémaria « Aimer passionnément le monde », qui rejoint à mon avis assez bien ce que Mgr Rouet essaie de nous dire dans un style très différent ;
« Nous célébrons la Sainte Eucharistie, le sacrifice sacramentel du Corps et du Sang du Seigneur, ce mystère de foi qui renferme en lui_même tous les mystères du christianisme. Nous célébrons donc l’acte le plus sacré et le plus transcendant que nous, les hommes, puissions par l’effet de la grâce de Dieu accomplir dans cette vie : communier au Corps et au Sang du Seigneur équivaut, d’une certaine manière, à nous délier de nos attaches avec la terre et avec le temps pour nous trouver déjà en présence de Dieu dans le Ciel, où le Christ lui_même sèchera les larmes de nos yeux et où il n’y aura plus ni mort ni sanglots, ni gémissements de fatigue, parce que le vieux monde aura pris fin.
Toutefois cette vérité si réconfortante et si profonde, cette signification eschatologique de l’Eucharistie, comme l’appellent d’ordinaire les théologiens, pourrait être mal comprise : elle l’a été chaque fois que l’on a voulu présenter l’existence chrétienne comme une réalité uniquement spirituelle — ou plus exactement, spiritualiste —, réservée aux personnes pures, extraordinaires, qui ne se mêlent pas aux choses méprisables de ce monde ou qui, tout au plus, les tolèrent comme quelque chose de juxtaposé par nécessité à l’esprit, aussi longtemps que nous vivons ici-bas.
Lorsque l’on voit les choses de cette façon, le temple devient par excellence le centre de la vie chrétienne ; et, dès lors, être chrétien consiste à fréquenter l’église, à participer aux cérémonies sacrées, à s’incruster dans une sociologie ecclésiastique, dans une espèce de monde à part qui se présente lui-même comme l’antichambre du Ciel, cependant que le commun des mortels suit son propre chemin. La doctrine du christianisme, la vie de la grâce, ne ferait de la sorte que frôler le cours mouvementé de l’histoire humaine sans jamais le rencontrer.
En cette matinée d’octobre, tandis que nous nous disposons à revivre la Pâque du Seigneur, nous répondons simplement non à cette vision déformée du christianisme. Réfléchissez un instant sur ce cadre qui entoure notre Eucharistie, notre action de grâces. Nous voici dans un temple singulier ; il a pour nef, pourrait-on dire, le campus universitaire ; pour retable, la bibliothèque de l’université ; là-bas, des machines élèvent de nouveaux édifices, et là-haut, le ciel de Navarre…
Cette énumération ne vous confirme-t-elle pas, d’une manière tangible et inoubliable, que le véritable champ de notre existence chrétienne, est la vie ordinaire ? Là où sont vos frères les hommes, mes enfants, là où sont vos aspirations, votre travail, vos amours, là se trouve le lieu de votre rencontre quotidienne avec le Christ. C’est au milieu des choses les plus matérielles de la terre que nous devons nous sanctifier, en servant Dieu et tous les hommes. »

Merci à vous aussi Serge pour ce dialogue agréable.

Guillaume
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 04/02/2011

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