21/09/2009
L'athéisme est une "oppression bourgeoise" (J. Milbank)
Message de Blaise : < Je ne peux m’empêcher de penser à cette déclaration lapidaire de John Milbank, dans une interview : "L’athéisme c’est l’oppression bourgeoise ; l’athéisme c’est l’opium du peuple." Quelques lignes plus haut, il affirmait : "Selon moi, la modernité c’est le libéralisme, le libéralisme c’est le capitalisme – l’économie politique – et le capitalisme c’est l’athéisme et le nihilisme. Ne pas voir cela, ou plutôt ne pas le voir suffisamment, c’est le déficit critique du marxisme." Autrement dit, l’athéisme est intrinsèquement lié à nos sociétés libérales. La nouvelle évangélisation doit par conséquent s’accompagner d’une remise en cause radicale de l’état présent des choses. Ce qu’a d’ailleurs fait Jean-Paul II lorsqu’il dénonçait les "structures de péché". >
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06:37 Publié dans Idées | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : christianisme
Commentaires
À LA RACINE
> Analyse lumineuse de Blaise, qui nous plonge à la racine du mal de ce monde.
Peut-être la même lucidité caractérisait déjà Maritain en son temps, et des positions comme celle qui suit ont largement contribué à le faire considérer par les catholiques bien-pensant(avec Léon Bloy, son parrain) comme un dangereux paria :
"C'est un paradoxe historique que la connexion qui, à une certaine époque de la culture occidentale, s'est établie pour un temps, [...] entre le "monde bourgeois" et, non pas la religion, mais ce qu'on peut appeler la "projection" sociologique ou le "phénomène" sociologique de la religion. Ce mot de "monde bourgeois" ou de "monde capitaliste", en usage dans le vocabulaire courant (fort insuffisant d'ailleurs), ne désigne qu'un des aspects du monde de l'humanisme anthropocentrique. A la vérité l'idée seule d'un lien ou d'une solidarité entre le christianisme et ce monde-là est une idée souverainement paradoxale. Que beaucoup de nos contemporains puissent croire de bonne foi, selon le plus efficace cliché de la propagande athéiste, que la religion et
l'Église sont liées à la défense des intérêts d'une classe, et de l'"éminente dignité" du capitalisme, du militarisme, etc., c'est bien le signe que la bonne foi n'est pas nécessairement l'intelligence, et que l'opinion des hommes se meut parmi des ombres où les
apparences des choses sont renversées.
Le monde issu des deux grandes révolutions de la Renaissance et de la Réforme a des dominantes spirituelles et culturelles nettement anti-catholiques ; chaque fois qu'il a pu suivre librement son instinct il a persécuté le catholicisme, sa philosophie est utilitaire, matérialiste ou hypocritement idéaliste, sa politique est machiavélique, son économie libérale et mécaniste. Le "monde bourgeois" a des pères qui ne sont pas les Pères de l'Église [...]. Ce monde est né d'un grand mouvement du coeur vers la sainte possession des biens terrestres, qui est à l'origine du capitalisme, du mercantilisme et de l'industrialisme économiques comme du naturalisme et du rationalisme philosophiques. Les condamnations de l'usure par l'Église demeurent au seuil des temps modernes comme une interrogation brûlante sur la légitimité de l'économie de ces temps."
(in : Religion et Culture, 1930 - IV- Un paradoxe historique)
Écrit par : Frédéric Ripoll, | 21/09/2009
LES PAUVRES DU SEIGNEUR
> Pour prendre la mesure de cette analyse de J. Milbank, peut-être faut-il l’éclairer très concrètement en examinant une figure qui me semble être exactement à l’opposé de la bourgeoisie mercantile et athée : celle des « pauvres du Seigneur », que l’on trouve dans l’Ancien Testament, et jusqu’à aujourd’hui parmi les chrétiens. Ces frères aînés de la Première Alliance, et ceux qui méritent aussi ce nom de « pauvres du Seigneur » dans la foi en Jésus-Christ, n’ont généralement pour principale richesse que la fidélité à la prière, à la Parole de Dieu et aux sacrements – et leur confiance en la Vierge Marie (1); et, parfois un peu plus encore (pour les meilleurs d’entre eux ?) : je veux parler de cette charité qui s’exprime dans une certaine forme de communauté des biens (« caritas in veritate » !). A cet égard, cela nous ramène à la discussion précédente, à la remarque de vf sur les membres de ces communautés vivantes où, il est vrai, les vocations fleurissent (Emmanuel, communauté Saint-Martin etc.)… tandis que dans nos paroisses bourgeoises et nos séminaires diocésains, on « crève de soif », comme dit l’un de mes proches. Athéisme et oppression bourgeoise, société dépressive d’un côté ; foi chrétienne et pauvres du Seigneur formant des communautés pleines d’espérance de l’autre. Alors, OK pour une « remise en cause radicale » : devenir des pauvres du Seigneur ? Et évangéliser en tant que tels nos frères et sœurs ?
(1) Extrait de « Lumen gentium » : « Elle [la Vierge Marie] est au premier rang de ces humbles et de ces pauvres du Seigneur qui attendent le salut avec confiance, et reçoivent de Lui le salut. » (Lumen Gentium, chap. VIII § 2,55)
Écrit par : Denis, | 21/09/2009
à Marius, de PP :
Si vous ne voulez pas être "censuré" (comme vous dites), abstenez-vous d'user du vocabulaire extrémiste. Par exemple : de traiter d' "hystérique" un penseur de l'envergure de Milbank, sous prétexte qu'il n'est pas libéral. Ce blog a une règle cent fois répétée : il ne publie pas ce qui sonne comme du rabâchage ultra. Vous me dites que vous n'êtes pas de ce genre-là ? Alors, permettez-moi de vous suggérer de ne pas en donner l'impression...
Écrit par : à Marius, de PP, | 23/09/2009
CQFD
> C'est une évidence. Jésus dit à Ses disciples : "Je vous le dis en vérité, un riche entrera difficilement dans le Royaume des cieux. Je vous le dis encore, il est plus facile à un chameau de passer par le trou d'une aiguille qu'à un riche d'entrer dans le Royaume de Dieu." (Matthieu 19 / 23 - 24)
Le matérialisme est contraire à la foi, et ses expressions politiques ou économiques le sont également.
La confusion de l'Eglise et d'un pouvoir conservateur - bourgeois - est un héritage du concordat. J'ai déjà cité le passage d'Ellul dans lequel il décrit les conditions financières pour devenir curé.
Voir Weber sur le capitalisme, la nature libérale de la révolution française et la situation de l'ouvrier livré à l'arbitraire de l'employeur en France (livret ouvrier)
Voir la convergence objective du mode de société américain et soviétique aboutissant à une même existence uniformisée, standardisée, kitsch et toc.
Etre un bourgeois n'est pas une tare en soit. Mais persévérer à ignorer que cela peut en être une et ne pas veiller à en corriger les défauts l'est. N'est pas chameau bourgeois qui veut. CQFD.
Écrit par : Annie, | 23/09/2009
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