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05/12/2008

Le patriarche Alexis est mort – Quelles conséquences pour les relations Vatican-Moscou ?

arton268-b55e4[1].jpgSuccesseurs possibles : le métropolite Cyrille, ou le métropolite Clément...

 

 

 

 

 

< Alexis II et le cardinal Vingt-Trois.


 

 

Alexis II, patriarche de Moscou, est mort ce matin dans sa résidence de Peredelkino.  Elu en 1990 à la tête de la plus grande Eglise orthodoxe du monde, il avait été le premier patriarche de l’ère postsoviétique : un homme de transition, pour tourner la page de soixante-dix années de régime totalitaire « athéiste ». A l’annonce de sa mort, le Vatican (par la voix de Mgr Brian Farrel, secrétaire du conseil pontifical pour l’unité des chrétiens) a déclaré : « Il est revenu au patriarche Alexis II de guider l’Eglise dans une période de grandes transformations. Il a su assumer cette tâche avec un grand sens des responsabilités et l’amour de la tradition russe. »

 

Contrairement à ce que répète la presse parisienne, les relations entre le Vatican et Moscou s’étaient réchauffées depuis l’élection de Benoît XVI, même si Alexis II se sentait tenu d’exprimer, à intervalles réguliers, la réprobation de son Eglise devant les activités de « prosélytisme » prêtées aux catholiques dans la Fédération de Russie. La réalité du problème est plus nuancée :  si l’Eglise catholique a pris une initiative discutée sous Jean-Paul II  - pape polonais -  en créant des diocèses en Russie, le véritable prosélytisme en terre russe est le fait des missionnaires protestants évangéliques, dont le « conversionnisme » ne connaît pas de frontières et s’exerce envers tout chrétien – allant jusqu’à considérer le baptême orthodoxe (ou catholique) des enfants comme invalide.

 

Qui peut succéder à Alexis II ? Deux « concurrents » sont connus.

 

- D’une part, le métropolite Cyrille de Smolensk, 62 ans, très populaire en Russie (ses prédications télévisées battent les records d’audience). Seul hiérarque orthodoxe russe à aborder les questions de la modernité, seul à tenir des positions sociales[1], il possède aussi l’atout d’être originaire de Saint-Pétersbourg comme Vladimir Poutine et Dmitri Medvedev. Du point de vue du Vatican, son élection au patriarcat serait un événement décisif : Mgr Cyrille fut le seul hiérarque religieux étranger reçu par le cardinal Ratzinger la veille des funérailles de Jean-Paul II. Il est un ami du cardinal Christoph Schönborn, maître d’œuvre du rapprochement Rome-Moscou depuis des années. Son ouverture spirituelle et son envergure intellectuelle font de lui l’interlocuteur idéal dans une démarche œcuménique.

 

- D’autre part, le métropolite Clément de Kalouga, qui fut le chancelier d’Alexis II et que celui-ci « poussait » mais qui vient de perdre cet atout. On sait qu’il s’entend mal avec Cyrille. On sait aussi qu’il est moins ouvert aux changements.

 

Samedi dernier à Paris, au colloque de la revue Kephas, le P. Bédouelle, recteur de l’Université catholique de l’Ouest, déclarait qu’un prochain concile (s’il devait avoir lieu) devrait réunir les évêques catholiques et les évêques orthodoxes. Ce vœu est largement partagé dans le monde « romain »[2]. Le monde orthodoxe russe est-il prêt à faire un pas en avant dans le dialogue avec Rome ?

 

 



[1]  Il est l'initiateur de la doctrine sociale de l'Eglise orthodoxe russe. (version française du livre : Cerf 2007).

[2]  A l’exception peut-être de catholiques américains de droite, pour des raisons étrangères au reste du monde.

 

 

Commentaires

L'UNITE

> Alexis II a fait un pas de géant pour l'avenir du christianisme, certes tout ce qu'il a dit ou fait n'est pas parfait, mais son ouverture aux autres chrétiens du monde n'a cessé de grandir au fur et à mesure des années;
pour nous autres français, sa venue dans la cathédrale de Notre Dame fut un moment grandiose d'unité et de rapprochement manifeste :
pourvu que tout ceci perdure, mes prières vont à chaque fois dans ce sens. c'est même la première de mes prières, dès que je commence une prière, ça ne me quitte pas!
nous tous chrétiens, devons résoudre définitivement nos divergences théologiques, non seulement parce qu'il le faut, mais surtout parce que le Christ Lui-Même a prié pour l'unité de son Eglise!
nos divisions abiment ce que nous avons tous reçus lors de notre baptême.
Seul l'Esprit Saint le peut, Seul l'Esprit du Père envoyé par le Fils, chargé des biens donné par le Fils (jean 16,15) éclairera nos esprits embourbés dans nos péchés et dans nos vues parfois sommaires ou encerclées sémantiquement, de manière à produire un feu étincelant de Vérité et d'Amour du prochain, d'abord et avant toute chose dans l'Eglise militante (celle des baptisés vivant sur terre...), puis à la face du monde tout entier !
je reste dans une espérance démesurée pour ce retour à une unité intérieure et extérieure de notre Eglise. Seigneur exauce ce voeu pour que nous soyons tous des témoins de ton Amour sur cette terre : d'autant plus par notre capacité à se réconcilier malgré l'histoire, et malgré nos compréhensions parfois divergentes à première vue, de ta Parole!

Écrit par : jean christian | 05/12/2008

L'UNITE

> Autant que je sache les véritables freins à la réunion de l'Eglise Catholique et de l'Eglise orthodoxe sont à chercher dans la diversité du monde orthodoxe et des relations pas toujours aimables entre toutes ces églises.
Mais le poids dominant de l'orthodoxie russe peut faire penser qu'elle arrivera à ses fins si elle veut vraiment la réunion des deux églises, Catholique et Orthodoxe.

Écrit par : Jean Michel Roulet | 05/12/2008

UN CHOC

> L'annonce de sa mort m'a fait un choc.
Depuis l'accession de Benoît XVI au trône pontifical, il semblait résolu à intensifier le dialogue oecuménique qui s'était quelque peu étiolé. Sa venue à Paris reste à cet égard un moment inoubliable. Et le voilà brisé dans son élan!
Nous n'avons plus qu'à espérer de tout notre coeur que son successeur continuera dans la voie qu'il lui aura tracée.
Rendons aussi hommage au pasteur qu'il était et qui a eu pour tâche de relever une église moribonde après la chute du régime communiste athée. Travail gigantesque où il a fallu tout reconstruire. La résurrection de l'Eglise russe malgré des répressions systématiques étendues sur presque un siècle ne témoigne-t-elle pas de la présence active de l'Esprit?

Écrit par : Blaise | 05/12/2008

AUX MUSULMANS

> Ce décès, peu de temps après le premier forum catholiques/musulmans, m'a amené à me pencher sur la réponse qu'Alexis II fit à la Lettre Ouverte musulmane à l'origine de la rencontre du Vatican. Un texte très instructif ( http://blogren.over-blog.com/article-25505185.html )

Écrit par : Ren' | 06/12/2008

NE PAS COMPRENDRE

> J'avoue ne pas comprendre le Père Bédouelle dont l'affirmation doit reposer sur la théorie dite "des branches". Les questions dogmatiques qui opposent les deux églises demeurent non résolue. N'oublions pas que pour l'Orthodoxie c'est l'Église latine qui est schismatique... L'historien ne peut que constater la justesse des opinions orthodoxes... progressivement les latins se sont éloignés de la foi et des tradition des Pères affirmées dans les 7 Conciles...

Léo

[ De PP à L. - Vous êtes catholique français devenu orthodoxe... Pardon de vous le dire, mais le type de propos que vous tenez ne s'entend plus de la part de mes interlocuteurs russes.
ps : un concile sert précisément à dénouer les quiproquos. Est-ce que vous souhaitez les voir durer, un peu comme ceux qui regrettent le temps des guerres de religion ? Navré, mais une Eglise n'est pas un parti. Quelque fantasme personnel que l'on projette sur elle...]

Cette réponse s'adresse au commentaire

Écrit par : Leo | 07/12/2008

> Désolé vous faites erreur sur la personne...

Leo

[ De PP à L. - Votre argument est pourtant caractéristique. Est-ce un Ovni ? ]

Écrit par : Leo | 08/12/2008

LE SCHISME

> Il me semble, mais peut-être que je me trompe et que quelqu'un rectifiera, que les catholiques ont eu des torts dans le schisme.
On a envoyé un cardinal discuter à Constantinople, alors qu'à l'époque c'est un évêque qu'on aurait dû envoyer, en raison des perceptions du rôle de l'évêque à l'époque. Ce cardinal s'est montré maladroit, et a finalement posé en catimini l'acte d'excommunication sur un autel, avant de s'esquiver sans prévenir...
Malheureusement depuis 1052 les orthodoxes et les catholiques ont évolué différemment sur bien des points. En voyant (ici même) le pointillisme de certains en matière notamment de liturgie, je crains pas mal de difficultés pour un rapprochement.
De ce chemin de rapprochement, nous avons à faire une partie, mais laquelle ?
Prions.

Écrit par : Martine | 08/12/2008

SOUFANIEH

> Je recommande à ceux qui sont interessés par la réunion de l'Eglise catholique et de l'Eglise orthodoxe de se renseigner sur les apparitions de Soufanieh (faisant l'objet d'un avis positif de la part de l'évêque de Damas), où la vierge Marie a montré un désir ardent de voir les deux Eglises soeurs réunies.

Écrit par : Gilles T | 08/12/2008

@ Martine

> Dans un schisme, les torts sont toujours partagés, et, pour parvenir à l'indispensable unité, des pas doivent être faits des deux côtés.
A vrai dire, au-delà des clichés, des formulations différentes et de divergences somme toute secondaires, il n'y a plus guère que l'ecclésiologie qui nous sépare encore vraiment.
Et sur ce plan, les choses progressent à grand pas avec Benoît XVI, et sans doute aussi avec Cyrille de Smolensk s'il est élu Patriarche de Moscou.
La levée du contentieux de Moscou avec Constantinople à propos de l'Eglise d'Estonie sera un premier test.

Écrit par : Michel de Guibert | 09/12/2008

@ MdG

> Si par "écclesiologie" vous entendez "définition, conception de l'Eglise", je confirme : mon épouse roumaine orthodoxe et moi n'avons pas la même conception de l'Eglise. Il y a chez les Orthodoxes (qui ont des églises nationales) un sentiment fort d'appartenance à une communauté partageant la même croyance et la même culture, la même langue, les mêmes traditions, qui de plus en plus fait défaut chez les catholiques (sauf chez les catholiques de tradition). En revanche, il y a chez nous un sentiment fort d'appartenance à l'Eglise universelle ; et ce sentiment d'appartenance, qui dépasse et transcende tout le reste, y compris nos pauvretés liturgiques, personne ne pourra jamais nous l'enlever.

Écrit par : Frédéric Ripoll | 09/12/2008

QUESTION

> Après la lecture du dernier commentaire de M. de Guibert, puis-je me permettre une question: pouvons-nous y voir l'accomplissement du message de Notre-Dame à Fatima, relatif à la conversion de la Russie?
Certes, aujourd'hui, la formule peut paraître hégémonique, comme si Rome avait raison et Moscou tort... et M. de Guibert, vous avez rappelé justement que les torts étaient partagés.
Mais venant d'en-haut, dicté par la Vierge Marie elle-même, que penser alors de la "conversion de la Russie" pour laquelle les catholiques sont invités à prier? Merci pour vos éclaircissements.

Écrit par : Antonin | 09/12/2008

LE FILIOQUE

> en lien, les communiqués des différentes commissions oecuméniques catholico-orthodoxe à ce propos, jugez-en par vous même :
http://www.usccb.org/seia/filioque-French.shtml

Écrit par : jean christian | 09/12/2008

@ Antonin,

> Union ou unité ne sous-entend pas "conversion", il ne semble pas que les Orthodoxes est besoin de se convertir ... Ne sont-ils pas authentiquement chrétiens ? Je doute fort que que la Toute pure Theotokos ait pu suggérer la chose en ces "termes" ? La question écclesiologique est, en effet, la plus épineuse et ardue ... j'aimerais beaucoup avoir l'opinion d'un chrétien catholique autorisé sur les options envisageables ou envisagées "côté romain" ?
Spasiba

Thierry

[ De PP à T. - Sans nier les difficultés ecclésiologiques, le point central est que les deux Eglises partagent l'essentiel : présence réelle eucharistique (donc notion du sacerdoce) et succession apostolique. La question des dogmes postérieurs au schisme peut se résoudre entre théologiens, si Dieu veut.
Quant au reste, qui est le plus névralgique, c'est un ensemble de complications héritées de l'histoire humaine, mais dont la bonne volonté (humaine) pourrait se libérer, avec quelques efforts de part et d'autre... ]

Cette réponse s'adresse au commentaire

Écrit par : Thierry | 09/12/2008

@ Frédéric Ripoll

> Tout ce que vous dites est exact, mais à vrai dire quand je parlais de l'ecclésiologie qui nous séparait, je pensais plus précisément à la question de la primauté du siège de Rome (primauté d'honneur ou primauté de juridiction) et de la synodalité (Eglise hiérarchique ou Eglise comme communion).

@ Antonin

> Nous avons tous à nos convertir certes, mais il serait fou de vouloir "convertir" les orthodoxes ; le message de Marie à Fatima concernait peut-être la Russie soviétique, mais certainement pas la Russie orthodoxe, dont l'Eglise a, comme le rappelle justement Patrice de Plunkett la même foi que nous et la succession apostolique.

@ Thierry

> Nous sommes d'accord, il ne peut s'agir entre catholiques et orthodoxes de conversion de l'autre comme s'il s'agissait de païens, mais bien plutôt, je crois, de se convertir chacun pour dépasser le problème par le haut.
Benoît XVI a développé dans son premier discours après son élection une conception collégiale de l'exercice de son ministère pétrinien qui ne peut que satisfaire les orthodoxes.
La question de la primauté de Rome n'est pas remise en cause par les orthodoxes, mais elle se limite à leurs yeux à une primauté d'honneur et non à une primauté de juridiction sur les autres Eglises.
C'est une vraie question qui s'est rigidifiée au fil des siècles car dans les premiers temps de l'Eglise il y avait une conception moins centralisée de l'Eglise autour des 4, puis 5 grands Patriarcats (Rome, Alexandrie, Antioche, Jérusalem et Constantinople), Rome étant reconnu comme le premier des Patriarcats mais ne s'occupant pas de régler la vie interne des autres Patriarcats, ce qui n'empêchait nullement au Pape de parler avec autorité (on se rappelle l'exclamation des évêques réunis au Concile d'Ephèse après l'intervention du légat du Pape : "Pierre a parlé par la bouche de Léon").
Je crois que c'est à une telle ecclésiologie de communion (de koinonia, κοινωνία en grec) qu'il nous faut revenir pour dépasser nos querelles, c'est-à-dire à un juste équilibre, ou plutôt à une juste articulation entre la primauté et la synodalité.

Écrit par : Michel de Guibert | 10/12/2008

CHARISMES

> En effet Michel, en effet Patrice ...
Les imbrications culturelles seront les plus dures à dépasser, elles nourissent les incompréhensions mais elles sont aussi l'expression, qu'il faut chérir, de la diversité des charismes de l'Esprit ...

Écrit par : Thierry | 10/12/2008

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