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27/10/2008

Propos sur la crise, le capitalisme et les nouvelles responsabilités des Etats

Devinez de qui viennent ces réflexions ?


 

 

 << La chute du mur de Berlin, en 1989, et l'éclatement de l'Union Soviétique avaient provoqué l'euphorie des capitalistes. Reagan et Thatcher, désormais débarrassés du contre-exemple socialiste, en profitèrent pour radicaliser les « valeurs » du capitalisme, spécialement les vertus du marché, lequel allait tout résoudre.
Pour rendre le travail plus facile, ils commencèrent par dénigrer l'Etat, déclaré le plus mauvais des gestionnaires, et par diffamer la politique dépeinte comme la sphère de la corruption.
Bien entendu, il y avait et il y a encore des problèmes dans ces instances-là, mais nous ne pouvons pas nous désintéresser de l'Etat ni de la politique si nous ne voulons pas retourner à la barbarie intégrale.
On devait leur substituer, disait-on, les agencements mis sur pied au sein des organismes nés à Bretton Woods et les grands conglomérats multilatéraux.
Chez nous, au Brésil, on couvrait de ridicule quiconque osait parler de projet national. Désormais, avec la globalisation, répétait-on, ce qui se renforçait c'était le projet-monde et le Brésil devait s'y insérer, quand bien même ce ne serait que pour y occuper une position de second rang. L'Etat devait être réduit au strict minimum et il fallait laisser le champ libre au marché pour qu'il fît ses affaires.

Nous qui, comme tant d'autres, sommes engagés dans le combat pour la défense des Droits de l'Homme, spécialement des plus vulnérables, très vite nous avons compris que le principal violeur de ces droits, désormais, c'était l'Etat lui-même, l'Etat marchand et néolibéral car, en effet, ces droits cessaient d'être inaliénables et devenaient de simples besoins humains dont la satisfaction devait être recherchée dans le marché. Et seuls ceux qui peuvent payer et consommer ont des droits. Ce n'est plus l'Etat qui va garantir les minima vitaux. Et comme la grande majorité de la population ne participe pas au marché, ses droits ont été ignorés.

Nous pouvons et nous devons discuter le statut de l'Etat-Nation. Dans la nouvelle phase planétaire que connaît l'humanité, les limites des Etats apparaissent avec de plus en plus d'évidence et grandit l'urgente nécessité d'un centre mondial de régulation politique qui aurait pour mission la gestion des demandes collectives de l'humanité en nourriture, eau, santé, logement, sécurité. Mais en attendant que soit instauré un tel organisme, c'est à l'Etat qu'il revient de gérer le bien commun, d'imposer des limites à la voracité des multinationales et de proposer un projet national.

La crise économique présente nous révèle la fausseté des thèses néolibérales et la nocivité du combat contre l'Etat.
Effrayé, un journal patronal a imprimé, en énormes caractères : « Le marché se conduit de manière irrationnelle » comme si le marché s'était jamais conduit de manière rationnelle, ce marché qui exclut les deux tiers de l'humanité.
Une célèbre analyste des sujets économiques, véritable adoratrice du marché et de l'Etat minimum, a écrit, pleine de suffisance : «Les responsables états-uniens se sont trompés en matière de régulation et de fiscalisation, ils se sont trompés dans l'appréciation des dimensions de la crise, ils se sont trompés quant à la dose de la potion à administrer et ils se trompent encore lorsqu'ils ont un comportement contradictoire et hésitant ». Et j'ajoute, moi, qu'ils se sont encore trompés en ne l'appelant pas, elle, la pythonisse qui vous aurait deviné, les doigts dans le nez, la bonne solution à la crise actuelle des bourses.

La leçon est claire : si on avait laissé faire le marché et la voracité du système financier spéculatif, la crise se serait transformée en une tragédie aux dimensions planétaires et aurait mis en grave danger tout le système économique mondial. Logiquement, les victimes seraient les éternelles victimes : ceux qu'on appelle les « zéros économiques », les pauvres, les laissés-pour-compte. C'est l'Etat vilipendé qui a dû intervenir avec presque deux milliards de dollars pour éviter, à la dernière minute, le pire.

Ce sont là des faits qui nous invitent à procéder à des révisions profondes ou, pour le moins, et pour ce qui est de certains, à être moins arrogants. >>

 
source : http://www.michelcollon.info/articles.php?dateaccess=2008-10-17%2022:27:21&log=invites

 

 

 

Ce que vous venez de lire est marqué au coin du bon sens. Or ces lignes viennent de… Leonardo Boff, l’ex-franciscain christo-marxiste des années 1980. Cela prouve quoi ? Que nul n’a tort sur tous les points. Et que le vrai reste vrai, d’où qu’il vienne. Cela prouve aussi qu’on ne doit jamais désespérer de personne, et qu’un jour viendra peut-être où l’ex Père Boff sera de nouveau en communion avec son Eglise…

 

 

Commentaires

L'INJUSTICE

> Merci de ce point de vue très intéressant par les temps qui courent.
Son analyse semble imprégnée des valeurs évangéliques et, donc, sur ce plan, il a la même vision que Rome.
Proche de ce sujet, il y a un film très intéressant à voir : "carnets de voyage" (un film réalisé par un brésilien, sélection officielle du festival de Cannes en 2004 ) qui raconte le voyage fait par deux étudiants en 1952 à moto dans toute l'Amérique du Sud (plusieurs milliers de kms de l'Argentine en passant par la Patagonie et en remontant jusqu'au Venesuela). Ce film est tiré de leurs écrits. A cette occasion, ces deux étudiants découvrent la beauté de leur continent et la misère de ceux qui y vivent. Cette révélation les transforma à jamais : l'un deux issu de la bonne bourgeoisie argentine, étudiant en médecine, s'appelait Ernesto Guevara de la Serna, surnommé "le Che". S'il s'est trompé sur les moyens d'action contre cette injustice, cela n'enlève rien au scandale de cette injustice et à la pertinence de son regard sur elle .
Sous forme de documentaire, c'est un très bon film et très instructif.

Écrit par : olivier le Pivain | 26/10/2008

JE DEMANDE BEAUCOUP

> Il est logique que les analyses les plus lucides sur la crise et le système qui l'a engendrée viennent de ceux qui le critiquaient et pas des thuriféraires de celui-ci. Ceci étant dit, si l'on est un tant soit peu honnête intellectuellement, il est certain que Marx, le Che et d'autres sont partis de constats réels d'injustice, de misère, de cupidité et d'orgueil observés là où ils vivaient. C'étaient des situations réelles. L'Angleterre du XIXe était un enfer pour tous ceux qui n'avaient rien (propriété, culture, métier etc.), idem pour l'Amérique du sud des années 50 ou l'Asie actuellement. Le problème est la voie marxiste choisie pour résoudre tout cela. L'événement extraordinaire que j'attends est la proclamation de la doctrine sociale de l'Eglise comme seule voie à suivre par Boff, Besancenot, Laguiller et autres. Là, je demande beaucoup à le vertu d'espérance.

Écrit par : vf | 27/10/2008

A CONTRE-COURANT

> Chez nous, et avec une "arrogance" sans limites, nos responsables continuent sur le registre du toujours moins d'état.
Je fais partie des RASED qui seront supprimés dans les écoles d'ici trois ans et, même si on peut trouver à redire sur l'efficacité de cette structure d'aide aux enfants en difficulté, je sais qu'elle ne sera remplacée par rien d'autres que par deux heures de soutien scolaire.
Il y avait déjà bien peu dans l'école primaire laïque, il n'y aura plus rien dautre qu'un SEUL enseignant devant une classe où les élèves se retrouveront bien SEULS.
Ce soir, à 19h20 sur France Inter, l'émission "le téléphone sonne" sera consacrée aux RASED.

Écrit par : sombre héros | 27/10/2008

DIFFERENCE

> Simplement rappeler le "N'ayez pas peur" de Jean Paul II et la belle encyclique "Spe Salvi" de Benoît XVI. L'espérance nous sauve et il faut savoir raison garder (Fides et Ratio). Très belle explication de Christine Lagarde. Elle est quand même utile...
Bon courage à tous. C'est le moment de faire entendre notre différence.

Écrit par : Annie | 27/10/2008

DOCTRINE SOCIALE

> j'ai l'impression que la Doctrine Sociale de l'Eglise ressemble beaucoup à ce que l'on pourrait appeler un "capitalisme à visage humain " et je ne suis pas sûr que le capitalisme ait réellement un visage ni qu'il soit capable d'auto-controle . Ou alors il faudrait que les activités financières soient exercées par des gens vertueux . Vous comprenez l'étendue de mon scepticisme .

horus


[ De PP à H. - Je ne crois pas qu'on puisse parler de "capitalisme à visage humain" à propos de la DSE. Elle met au centre un souci qui est étranger au capitalisme: ce qui la mène à des positions (explicites ou implicites) non compatibles avec le capitalisme que nous avosn sous les yeux. Raison pour laquelle on reproche d'ailleurs à la DSE d'être "un voeu pieux" !
Mais on ne peut être "sceptique" envers la DSE que si on la prend pour ce qu'elle n'est pas, et si on attend d'elle ce qu'elle n'est pas faite pour donner : des coups de force contre le système.
Or seuls des coups de force peuvent concrétiser l'esprit de la DSE ! (Si on attend que les multinationales le mettent spontanément en pratique, on n'est pas à pied). Ces coups de force sont à concevoir et à réaliser, non par le Magistère, père de la DSE, mais par le monde laïc inspiré de son esprit.
Quand Mgr Migliore parle à l'ONU contre la main-mise de multinationales sur l'eau potable, ça ne fait pas trembler les multinationales, vous avez raison. Mais qu'attend-on pour mettre sur pied des opérations de lutte politique dans ce domaine ? Et ça, ce n'est pas la vocation de Mgr Migliore... ]

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Écrit par : horus | 28/10/2008

SOUTENONS LES RASED

> Je vous invite à retrouver la page suivante sur mon blog où vous pourrez vous informer sur cette structure nommée "RASED", dispositif en voie de disparition qui correspond à la vulgate gouvernementale actuelle et qui se trouve en contrepoint de ce billet : Toujours plus moins d'Etat !

http://isostome.wordpress.com/2008/10/28/tableaux-dune-explosition/

Écrit par : sombre héros | 28/10/2008

DSE

> Une grande différence entre le capitalisme et la DSE, c'est que le capitalisme est une doctrine d'organisation globale, alors que la DSE qui voit d'abord les personnes, parle d'abord de comportements individuels.
Le capitalisme propose de changer le monde.
La DSE vise à le transformer par une somme de petits comportements individuels, mais sans annoncer le paradis sur terre.
Bien sûr il y a des considérations générales dans la DSE, liées à la vision de la justice et du bien commun que l'Eglise promeut, mais ceux-ci laissent en fait une grande marge de manoeuvre à la liberté humaine donnée par Dieu.

Écrit par : Ludovic | 31/10/2008

CAPITALISME

> "Le capitalisme propose de changer le monde." (sic) ?
Vous croyez vraiment, Ludovic ? Vous n'avez pas le sentiment qu'il s'agit plutôt de perpétuer, au nom de la liberté, la loi du plus fort ?
Je crois au contraire que c'est la DSE qui propose de changer le monde, ou plus précisément de le remettre à l'endroit en cherchant à promouvoir le bien commun plutôt que les égoïsmes individuels.
"Entre le fort et le faible, c'est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit." (Lacordiare)

Écrit par : Michel de Guibert | 31/10/2008

> cher Patrice de Plunkett
Je lis toujours avec beaucoup d'intérêt votre bloc note du Spectacle du Monde, la plupart du temps extrêmenent judicieux.
au plaisir de continuer à vous lire. bien sincèrement pierre le vigan

Écrit par : le vigan | 08/11/2008

Lu sur le blog de Bruno Frappat

> Nous avons mis quelques mois à nous en rendre compte: nous changeons d'époque. La récession est là. Et nul ne saurait dire pour combien de temps. La récession c'est l'inversion de la croissance. La fin du "toujours plus!" pour ceux qui avaient déjà beaucoup et, malheureusement, le début du "encore moins" pour ceux qui, déjà, n'avaient pas grand chose. Finalement l'année-clé de ce nouveau siècle, nous pensions que cela resterait 2001 et le déclenchement de la guerre du terrorisme. Mais, avec la récession, le mal est encore plus aveugle et sournois: ce sont les économies qui se rongent de l'intérieur, conséquence invisible de ce terrorisme d'un autre ordre qu'était la financiarisation, l'obsession du court terme. Moins de consommation, moins d'autos à construire, moins de déplacements lointains. Il y a de la "dépense sobre" dans l'air. La planète en sera-t-elle mieux protégée contre les assauts de l'homme? Ce serait un effet collatéral positif. Il peut, dans les difficultés qui s'annoncent, exister d'autres chances à saisir: réduction des inégalités, retour à l'essentiel en matière de consommation, atténuation de l'opulence et de ses obscénités, réduction du gâchis en tous domaines. Mais ces effets positifs ne vaudront que si la conscience humaine se fait collective et ne se mue pas en égoïsmes renforcés. C'est sur ce terrain que l'on attend les puissants de ce monde.

Bruno Frappat

http://blogfrappat.la-croix.com/2008/11/epoque.html

Écrit par : du blog de B. Frappat | 17/11/2008

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