23/05/2008
Ecologie : réponse navrée à un prêtre français
qui croit devoir dire le contraire de deux papes et de la conférence épiscopale :
Père,
Vous m'envoyez coup sur coup deux professions de foi anti-réchauffement, rédigées sur un ton douloureux comme si les analyses écologiques vous blessaient.
D’où vous vient cette douleur ?
Visiblement d’opinions séculières, puisque vous me recommandez comme parole d’évangile un média qui véhicule ce type d’opinions.
Je ne publie pas votre message, parce que vous le signez de votre nom - et que voici ma réponse (je suis gêné de devoir vous tenir ce langage):
- Permettez-moi de vous dire que le pape Jean-Paul II, le pape Benoît XVI et la conférence épiscopale française, après mûre réflexion, ont dit - et disent - des choses qui ne coïncident pas avec votre conviction. Je vous suggère de lire La Documentation catholique du 6 février 2000, pages 117 et suivantes : sous le titre Le respect de la création, c'est un célèbre document de la commission sociale, signé de sept évêques dont le futur cardinal Barbarin.
En ouverture de ce document, le président de la commission, Mgr de Berranger, écrit que la pollution atmosphérique risque "de compromettre l'avenir même de l'espèce humaine", qu'il faut soutenir "le principe de précaution" et que c'est même "un sursaut vital" pour l'humanité. Mgr de Berranger valide les recommandations du Sommet de la Terre de 1972 qui a mis à l'ordre du jour la lutte mondiale contre l'échauffement.
Dans le corps du document, qui fait le point sur les atteintes à l'environnement, on lit entre autres ceci : "Les gaz à effet de serre (spécialement le gaz carbonique) sont accumulés dans la haute atmosphère : leur durée de vie estimée à 70 ans en fait un lourd héritage à long terme. Des changements climatiques importants sont à craindre : réchauffement de la terre, montée générale des eaux, inondations, modifications des régimes des pluies…"
L’annexe IV est un texte de Pax Christi, dont voici un passage : "Deuxième certitude : notre consommation excessive d’énergie est devenue incompatible avec le fonctionnement normal de la planète. Deux conséquences principales :
a - des phénomènes de pollution de l’air de plus en plus variés : oxydes d’azote, métaux lourds, pics d’ozone, anhydride sulfureux (entraînant la dispartion de forêts), méthane, avec les impacts que l’on connaît sur la santé humaine et le fonctionnement des milieux naturels.
b - à moyen terme, on va vers un réchauffement de l’atmosphère, à cause de l’augmentation des gaz à effet de serre (gaz carbonique...), et des changements climatiques aux conséquences imprévisibles mais certainement désastreuses : élévation du niveau des mers, modification du régime des pluies…"
Respectueusement vôtre
P.P.
09:48 Publié dans Ecologie | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : christianisme, réchauffement climatique
Commentaires
MELANGE
> Le problème numéro 1 dans une partie du catholicisme français, c'est le mélange entre la foi religieuse et les opinions politiques. On a le droit d'avoir des opinions quand on est prêtre, mais on n'a pas le droit de dire le contraire de l'Eglise à laquelle on appartient, y compris sur des questions économiques et sociales (l'écologie en fait partie) qui concernent le domaine de la doctrine sociale ! Ou alors on se retrouve dans une drôle de position ! Intenable moralement et intellectuellement !
Écrit par : Amicie T. | 23/05/2008
L'INFORMATION DE L'EGLISE
> Tous ces débats sur l'écologie font naître en moi une interrogation. Si le Pape nous dit quelle éthique de vie nous devons avoir, par responsabilité et par respect envers la Création de Dieu, nous catholiques devrions en être reconnaissants, et devrions 1) chercher à bien comprendre la position magistérielle et 2) chercher à l'appliquer concrètement dans nos vies.
Mais si le Pape, ou l'Eglise enseignante en général, nous parle avec autorité en matière scientifique, est-elle compétente? Comprenez-moi bien : vu de l'extérieur, le Pape et les évêques ne sont pas des chercheurs et scientifiques, quelle est donc leur compétence dans le domaine de la science ?
En disant cela, je ne dis pas qu'ils n'en ont aucune. Mais peut-être justement serait-il bon de parler des différentes commissions qui existent et qui regroupent théologiens, philosophes et scientifiques, et qui, apportant leurs lumières aux évêques, leur donnent compétence pour parler de ces sujets...
La plupart des gens, catholiques compris, ignorent l'existence et le travail de ces commissions.
Cherchons toujours plus à être convaincants, non par esprit de chapelle, mais par esprit de service : "Soyez toujours prêts à rendre les raisons de votre foi".
Pema S
[ De PP à PS - J'essaie de parler le plus souvent possible des travaux des académies pontificales (sciences, sciences sociales). Contrairement à ce que l'on croit, le pape est l'une des personnes les mieux informées de la planète ! ]
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Écrit par : Pema S | 23/05/2008
ON NE ME FERA PAS ENTRER DANS CETTE QUERELLE
> Un lecteur, agissant pour un certain site, m’envoyait hier un message à propos de ce site (et de l’écologie). Visiblement il s'agissait d'obtenir de moi une réponse. J’ai répondu ce que je pense être exact à ce sujet, et sans mentionner le nom du site afin de ne pas créer de querelle de personnes.
Ce matin, le site fulmine qu’il s’est reconnu et me couvre de reproches. Soit.
Mais je n’entrerai pas dans cette querelle.
Ma vision des choses et celle de ce site divergent sur des points importants : non seulement sur les problèmes de société, mais sur les tâches catholiques les plus urgentes.
Écrit par : PP | 23/05/2008
" PLUS "
> D'autant que ce site vous a joué un tour assez petit il y a 15 jours, en reproduisant sans vous mentionner le rapport des parents d'élèves de St JB de La salle à Rouen qu'ils avaient forcément trouvé publié chez vous (il vous avait été envoyé, ainsi que vous l'aviez dit). Un message a été envoyé à ce site pour donner la source (votre blog) ; ils l'ont publié mais en le modifiant, pour lui faire dire qu'il y avait "plus" d'informations chez eux (une courte note) que dans le long rapport du parent d'élèves figurant sur votre blog.
Marcela
( De PP à M - Ah ? Vous me l'apprenez. Mais ce n'est pas grave et ça ne change rien à ce que je dis ci-dessus. ]
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Écrit par : Marcela | 23/05/2008
> Ce site est-il celui qui vous a rayé de ses liens ce jour ?
Barbara
[ De PP à B. - Il paraît. ]
Écrit par : Barbara | 23/05/2008
DE PP À TOUS
> Je vous remercie de vos commentaires concernant la querelle cherchée à ce blog par un autre. Mais toute polémique serait inutile. Donc, changeons de sujet !
Écrit par : De PP à TOUS | 23/05/2008
@ PEMA S.
> Non pas : "Soyez toujours prêts à rendre les raisons de votre foi"... mais "à rendre les raisons de votre espérance" ! (1 Pierre 3, 15)
Écrit par : Michel de Guibert | 23/05/2008
@ P. de Plunkett
Savez-vous si le Pape ou la conférence épiscopale française ont également produit un texte concernant les OGM ?
Il serait utile de pouvoir s'y référer.
Blaise
[ De PP à B. - Lez Compendium de la doctrine sociale évoque le problème de façon très générale : "Les interventions de l'homme sont blâmables quand elles nuisent aux êtres vivants ou au milieu naturel, alors qu'elles sont louables quand elles se traduisent par leur amélioration. La licéité de l'emploi des techniques biologiques et biogénétiques n'épuise pas toute la problématique éthique: comme pour tout comportement humain, il est nécessaire d'évaluer soigneusement leur réelle utilité ainsi que leurs conséquences possibles, en termes de risques également. Dans le cadre des interventions techniques et scientifiques, qui ont une forte et large incidence sur les organismes vivants, et considérant la possibilité de répercussions importantes à long terme, il n'est pas licite d'agir avec légèreté et de façon irresponsable."
À en juger par l'art dont usent Monsanto (et d'autres) pour ne pas opérer les tests de sécurité et d'innocuité nécessaires, on peut les accuser de "légèreté" et d'action "irresponsable". ]
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Écrit par : Blaise | 24/05/2008
LE PAPE ET L'ECOLOGIE
> le pape est tres savant et ses collaborateurs tres bien renseignés sur bien des sujets. Cependant l'infaillibilité qui est la sienne ne concerne que la foi les moeurs et la liturgie (expression de la foi ).
[ De PP à W - Etes-vous contre la doctrine sociale de l'Eglise ? ]
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Écrit par : de woillemont | 28/05/2008
Bonjour Monsieur de Plunkett
Sur le sujet du réchauffement climatique, il m'apparaît difficile de penser qu'il n'y ait pas un lien entre l'industrialisation et les difficultés rencontrées, le problème consiste à savoir quelle est réellement la part de l'action humaine dans tout cela.
Vous savez bien comme moi que les opinions, pour l'honnête homme qui veut réfléchir, évoluent suite à un travail de fond qui demande du temps. Fortement réservé sur le "catastrophisme", mon opinion évolue en me rapprochant de la vôtre, d'ailleurs je vais acquérir votre ouvrage. Mais j'avoue que j'y vais prudemment car j'ai une profonde méfiance sur le sujet suite à l'exaltation médiatique. J'ai quelques difficultés à admettre l'idée qu'il y ait deux camps bien distints, à savoir : celui de ceux qui seraient tous des imbéciles aveugles à la solde exclusive du libéralisme mondial sans foi ni loi et les autres en face qui seraient des anges de vertu dans le jugement est absolument scientifiquement sûr (par rapport aux autres qui n'auraient aucun jugement scientifique).
Quand pour ce qui concerne l'Eglise, il est certain qu'au delà de l'aspect de la foi, il y a en son sein de veritables sommités intellectuelles capables de raisonner sur bien des sujets. Mais il y a les vérités qui relèvent de la foi et les autres qui se discutent, parce que justement elles ne sont pas de foi. Et la réflexion et la discussion sont deux arts bien, bien, difficiles qui n'admettent pas l'invective. Dur, dur. Mais on est pas de bois et le tempérament des uns et des autres est ce qu'il est; mais même malgré ce dernier, on doit pouvoir avancer.
esoral
[ De PP à E. :
Vous avez mille fois raison d'être prudent, et tout autant raison d'évoluer. La lecture de mon livre (enquête) vous fournira quantité de données supplémentaires.
Bien sûr, il ne faut pas "idéologiser" le débat et en faire une question de personnes ou de clans. Je suis le premier à le dire.
En effet, les attitudes ne sont pas symétriques.
D'un côté il y a des gens qui s'obnubilent sur la politique partisane (ils récusent a priori tout ce qui vient de la gauche, ou de la droite) ; ce qui les empêche d'avoir une vision nette des enjeux, notamment écologiques. Ce sont eux qui rejettent - en l'appelant "catastrophisme" - toute prise en compte de dangers, et leurs mobiles sont loin d'être scientifiques : vous le sentez en les lisant.
De l'autre côté, il y a des gens qui n'ont pas d'oeillères et qui cherchent à comprendre les causes des problèmes actuels (écologiques mais aussi sociaux, etc).
Le fait est que ces causes sont, en premier lieu, le modèle économique "fou" (dixit le Nobel J. Stiglitz) qui domine le monde. Dire cela n'est pas diaboliser des gens : c'est accepter d'identifier le problème, seule manière de trouver une solution...
Quant à l'Eglise et ses positions sociales : le catholicisme est une religion de l'incarnation, non une morale abstraite. Il s'adresse à l'homme tout entier, et il cherche le bien de tous, y compris les non chrétiens. C'est pourquoi il a une doctrine sociale. Cette doctrine n'est pas le Credo, certes. Mais elle répond à l'appel du Christ : nourrir les affamés, vêtir ceux qui sont nus. Comment cette doctrine sociale est-elle informée ? Excellemment : le pape est l'un des hommes les mieux informés de la Terre, dans le domaine scientifique, entre autres, et dans le domaine économique ! Donc, quand il parle des problèmes d'aujourd'hui, c'est : a) en connaissance de cause, b) à la lumière de l'évangile. Et il est bien placé pour porter la lumière de l'évangile sur les problèmes d'aujourd'hui... Les catholiques des pays riches, comme nous tous, auraient mauvaise grâce à nier cela et à préférer les théories de M. Allègre ou de M. Charasse : fervents ennemis de l'écologie (et aussi de la religion), pour des motifs qui ne doivent rien à la science, mais tout à leurs accointances philosophiques ! ]
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Écrit par : esoral | 29/05/2008
LA CAMPAGNE AMERICAINE
> Certes je comprends bien votre commentaire. Mais je ne vous parle pas d'Allègre ou de Charasse mais des organismes cités ci-dessous. [NDLR : ici la reproduction d'une note faisant écho à la campagne des bushiens aux Etats-Unis]. En somme,tous ces organismes ne seraient-ils donc que des machines chargées de détourner l'attention de la réalité ? Et tous ces scientifiques seraient-ils des idiots utiles ?
Je ne vous dis pas cela pour le plaisir de la contradiction,ou pour essayer de vous piéger, mais c'est tout de même étonnant de tels écarts d'opinion. Ecarts qui ne sont d'ailleurs peut-être qu'apparents en y regardant de plus près.
esoral
[ De PP à E.
Non, cher Monsieur, ces écarts - à propos de l'écologique - ne sont pas apparents...
Ils correspondent à deux démarches différentes.
a) Les uns posent en principe que l'écologie est un mal, et le réchauffement un mythe fabriqué par un complot contre l'Occident. Cet axiome est idéologique. Il fonctionne sous la dépendance de la colossale campagne anti-écologique actionnée aux USA depuis plus de cinq ans par des géants industriels et financiers. (L'agitation à laquelle vous faites référence en fait partie, et ne peut être prise pour autre chose que ce qu'elle est : une opération de marketing pré-électoral aux Etats-Unis). Voir ici ma note du 30 mai.
b) Les autres (dont moi) ne voient pas pourquoi il faudrait diaboliser le problème du réchauffement et considérer le GIEC comme un complot des Illuminati ; laissons à Dan Brown ce genre de théories.
Quand j'entends le Pr Rodriguez-Iturbe, (grand spécialiste récemment coopté à l'Académie pontificale des sciences) dire que "l'impact anthropique lié au réchauffement global est d'une évidence écrasante d'un point de vue scientifique", et quand je vois que l'immense majorité des climatologues le pensent aussi, je ne sais pas au nom de quoi je leur donnerais tort, moi !
Certains non-spécialistes s'accordent assez d'importance pour le faire ? Libre à eux, mais je ne suis pas de cette famille d'esprits.
Sur tout cela, je tente de faire le point dans mon livre sur l'écologie, la Bible etc; permettez-moi de vous suggérer d'y jeter un coup d'oeil...
Cordialement vôtre. ]
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Écrit par : esoral | 30/05/2008
JOURNALISME
> Merci beaucoup pour votre réponse claire et les informations concrètes que je ne connaissais pas. Le simple quidam que je suis a bien de idées, mais bien souvent elles relèvent de l'intuition - on ne peut pas tout vérifier - et gare aux pièges de l'imagination.
Il faut bien en arriver à un moment donné à nommer les courants de pensées identifiés avec leurs objectifs réels et ceux qui les pilotent.
Nous avons bien besoin d'un journalisme tel que le vôtre pour nous aider à y voir plus clair - ce qui ne nous exonère pas de faire des efforts personnels de recherche-, car c'est une véritable profession à plein temps très exigeante et qui ne s'improvise pas.
Encore une fois merci
Quand à votre livre, j'en pends livraison prochainement
bien cordialement
esoral
[ De PP à E. - Au sujet de votre post-scriptum : je suis exactement dans le même cas que vous ! Sauf le délai : 23 ans au lieu de 10 ! Idem pour les dix doigts. ]
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Écrit par : esoral | 31/05/2008
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