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22/09/2007

"Modernisation de la société" : le prophète Amos n'est pas d'accord

...s'il s'agit de l'argent-roi :


 

 

Les lectures liturgiques de ce dimanche mettent en cause l’argent : thème que les catholiques de droite* préfèrent souvent contourner, cf. notre note d’hier.

 

> Amos 8, 4-7. Ce prophète (VIIIe siècle avant JC) dit que l’avenir de son peuple « est conditionné par les accomplissements de la justice, de la tsedaqa, exigence fondamentale de la tora de YHWH » (André Chouraqui) – plus que par les rites. « Entendez cela, vous qui gobez le pauvre / pour faire chômer les humiliés de la terre » : cette traduction de Chouraqui est plus « économique » que celle de la pastorale française (« …pour anéantir les humbles du pays »), mais le sens est le même : le pays est prospère et cette richesse ne profite qu’aux riches, qui vendent trop cher aux pauvres « le pain et les sandales » (v.6). Leur seul souci est de faire de l’argent, à tel point que les jours de fêtes (religieuses) les irritent… Ceci me rappelle – je l’ai déjà dit ailleurs – ce confrère RPR et bon paroissien qui militait pour l’ouverture des commerces le dimanche ; il ne voyait pas que cette réforme de « modernisation de la société » allait en bloc contre le judéo-christianisme. Tel les riches interpellés par Amos, il pensait : « Quand donc le sabbat sera-t-il fini, que nous puissions vendre ? »  (Le sabbat étant le jour de la gratuité, en hommage au Créateur)…  

Amos fait dire par Dieu à ces obsédés du rentable : « Jamais je n’oublierai aucun de vos méfaits ». Ce qui veut dire, non que Dieu ne pardonne pas, mais que les hommes feraient bien de ne pas oublier d’être justes.

 

 

>  L’évangile (Luc 16, 1-13) est celui du gérant malhonnête. Jésus a l’air de le citer en exemple. Ce n’est qu’un procédé de parabole. Le message est : utilisez l’argent comme un moyen, non comme un but. Autrefois ce précepte passait pour une pieuseté sans conséquence et faisait bien rire les grands révolutionnaires de 1968  (avant qu’ils ne deviennent de grands publicitaires). Mais aujourd’hui, l’argent est devenu mondialement le seul but de l’argent : la spéculation démolit l’économie réelle, les divagations des banquiers plongent tout le système dans des convulsions cycliques. Et le vieux conseil de Luc 16 (maintenir l’argent dans sa vocation de moyen, non de but) prend une résonance non-conformiste radicale.

 

A condition toutefois de l’écouter, et de sortir de la pénombre où sommeille le bourgeoisisme.

 

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(*) Mais si, ils existent, et mieux vaut les appeler par leur nom si l’on ne veut pas fuir les réalités..

 

 

 

Commentaires

MATERIALISME MERCANTILE AU QUEBEC ?

> Cela fait des années que les commerces sont ouverts le dimanche au Québec. Presque tous les commerces sont également ouverts jusqu'à 21h00 les soirs de semaine. A vrai dire, on a coupé tous les liens familiaux afin de se réunir dans les centres commerciaux. Les gens consomment, consomment et consomment comme jamais. Société d'emprunt également, endettée jusqu'à l'os.
Dire cela ici est perçu comme une attaque à leur liberté de consommer et la peur du retour de l'obscurantisme de l'Eglise catholique!!!

Écrit par : folliculaire | 22/09/2007

PAROLES DIFFICILES

> La Parole de Dieu est d'une infinie richesse. Aussi, parfois, son sens nous échappe, provocant ainsi notre intelligence à chercher plus loin. Pour moi, je n'arrive pas à comprendre, dans l'Evangile d'aujourd'hui, les paroles de Jésus nous invitant à se faire des amis avec l'argent trompeur, pour qu'eux même nous accueillent dans la vie éternelle. Si quelqu'un a des lumières sur le sens de l'Evangile qui fait écho à Amos, je suis preneur. Merci !

Écrit par : Abbé Dominique Rimaz | 23/09/2007

L'ARGENT

> Je voudrais juste rajouter une petite histoire que j'ai entendue lors de l'homélie de ce dimanche :
Quand tous les animaux auront étés chassés, que tous les fleuves auront été asséchés et que tous les poissons auront été pêchés, alors l’homme se rendra compte que l’argent ne se mange pas !
Je suis assez d’accord, l’argent n’est pas qu’un moyen, pas un but.
Dans le livre de la jungle, l’argent est ainsi défini : cette chose dorée qui passe de main en main sans les réchauffer.
L’argent est froid et sans vie, comment voulez vous en faire le but de votre vie ?

Écrit par : loic | 24/09/2007

PAROLES DIFFICILES

@ Abbé Dominique Rimaz

Il me semble que ce verset difficile, voire incompréhensible (Luc 16, 9) s'éclaire par les versets suivants :
"Celui qui est digne de confiance dans une toute petite affaire est digne de confiance aussi dans une grande. Celui qui est trompeur dans une petite affaire est trompeur aussi dans une grande. Si vous n'avez pas été dignes de confiance avec l'argent trompeur [qui est une fausse valeur], qui vous confiera le bien véritable ? Et si vous n'avez pas été dignes de confiance pour des biens étrangers [l'argent, qui est étranger à votre nature et à votre fin], le vôtre [celui pour lequel vous avez été créés : le bien spirituel que vous sacrifiez à la conquête de l'argent], qui vous le donnera ? (...) Vous ne pouvez servir deux maîtres (...) Vous ne pouvez servir à la fois Dieu et l'argent."

J'ai bien conscience de ne pas répondre totalement à la question, mais il me semble que Jésus oppose [Et moi je vous dis...] à l'habileté de l'économe infidèle (parabole qui précède) celui qui est fidèle dans le service de l'argent trompeur, et le serviteur qui est fidèle dans le service de l'argent le sera aussi, en bon intendant des mystères, pour de plus grands biens.

Mais Jésus fait aussi l'éloge, ou plutôt constate l'habileté de l'économe infidèle qui sait se faire des amis avec l'argent trompeur (Luc 16, 4) ; transposant dans un sens spirituel (Luc 16, 9) la prévoyance de l'intendant infidèle, il nous incite à nous préoccuper dès maintenant des choses d'en-haut.
Peut-être un début d'explication se perçoit-il en rapprochant ce passage de Luc 14, 13-14 : "Mais quand tu fais une réception, appelle des pauvres, des estropiés, de boiteux, des aveugles. Et tu seras bienheureux, parce qu'ils n'ont pas le moyen de te rendre [l'invitation], et qu'alors cela te sera rendu à la résurrection des justes."

Ne s'agit-il pas de nous faire comprendre que les biens ne sont pas destinés à être accaparés pour soi seul, mais à être partagés.
Alors ceux qui "se font des amis avec l'argent trompeur", ne seraient-ce pas ceux qui partagent avec les pauvres, lesquels sont peut-être eux-mêmes ceux qui "nous accueillent dans la vie éternelle."

Jésus va plus loin ensuite pour expliciter en disant qu'on ne peut servir à la fois deux maîtres, Dieu et l'argent.
C'est évidemment la pointe du récit.

* Voir la "Bible chrétienne" Tomes II et II* (Ed. Anne Sigier/Desclée)

Écrit par : Michel de Guibert | 24/09/2007

> Merci cher Monsieur Michel de Guibert ! Jésus sait stimuler notre intelligence pour chercher la vérité. Saint Augustin dirait que c'est la foi qui cherche à comprendre. Bien à vous!

Écrit par : Abbé Dominique Rimaz | 24/09/2007

Merci cher Abbé Dominique Rimaz.

> Je ne saurais trop vous recommander l'ouvrage que je mettais en référence, un remarquable outil de travail exégétique dont je me suis largement inspiré ci-dessus :

La "Bible chrétienne" (Ed. Anne Sigier/Desclée).
Mère Élisabeth de Solms, de l’abbaye Sainte-Cécile de Solesmes
Dom Claude Jean-Nesmy, de l’abbaye de la Pierre-qui-Vire

Chaque tome comprend deux volumes.
Dans le volume 1, le passage biblique étudié, traduit par Mère Elisabeth de Solms, en page de gauche. En page de droite sont alignés les parallèles tirés de l’Ancien et du Nouveau Testament : c’est la Bible commentée par la Bible.
Dans le volume 2, le même passage est commenté par Dom Jean-Nesmy, les Pères de l’Église ou des exégètes.

Ont déjà parus :
- I : Le Pentateuque
- II : Les quatre Évangiles
- III : Les Actes des Apôtres et épîtres (Rm, 1 & 2 Co, Ga)
- V : Les psaumes

A paraître
- IV : Éphésiens à l'Apocalypse


Michel de Guibert


[De PP - J'en possède trois tomes, et je confirme : quel instrument de travail !]

Écrit par : Michel de Guibert | 25/09/2007

@ Monsieur l'Abbé Dominique Rimaz

> Commentaire de Benoît XVI lors de l'Angélus du dimanche 23 septembre à propos de Luc 16, 9 dans la parabole de l'intendant malhonnête :

"En racontant la parabole d’un intendant malhonnête, mais très astucieux, le Christ enseigne à ses disciples quelle est la meilleure façon d’utiliser l’argent et les richesses matérielles, c’est-à-dire les partager avec les pauvres en se procurant ainsi leur amitié, en vue du Royaume des Cieux.

« Faites-vous des amis avec l'Argent trompeur, afin que, le jour où il ne sera plus là, ces amis vous accueillent dans les demeures éternelles » (Luc 16, 9). L’argent n’est pas « malhonnête » en soi, mais plus qu’aucune autre chose, il peut enfermer l’homme dans un égoïsme aveugle. Il s’agit donc d’opérer une sorte de « conversion » des biens économiques : au lieu de les utiliser seulement pour l’intérêt personnel, il convient de penser aux besoins des pauvres, en imitant le Christ lui-même, lui qui, écrit saint Paul, « pour vous s'est fait pauvre, de riche qu'il était, afin de vous enrichir par sa pauvreté » (2 Co 8, 9). Cela semble un paradoxe : le Christ ne nous a pas enrichis par sa richesse, mais par sa pauvreté, c’est-à-dire par son amour qui l’a poussé à se donner à nous totalement."

Écrit par : Michel de Guibert | 26/09/2007

> La Bible Chrétienne se trouve en partie en ligne à l'adresse suivante : http://www.clerus.org/menu11_ita.html
Merci pour ce site génial

Écrit par : tab | 26/09/2007

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