23/05/2007
Le cardinal Martini présente le livre du pape : "La joie que j'ai eue..."
Ce matin à l'Unesco, à Paris, lancement de l'édition française de Jésus de Nazareth. Compte-rendu direct (nous y étions) :
< Le cardinal Martini.
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Devant plusieurs centaines de journalistes, d’universitaires et de diplomates, une table ronde a eu lieu ce matin à la Maison de l’Unesco, à Paris, autour du livre de Benoît XVI. Intervenants : le cardinal Carlo Maria Martini, exégète, archevêque émérite de Milan ; et Mgr Joseph Doré, théologien, archevêque émérite de Strasbourg. Le point de vue du cardinal était attendu avec d’autant plus de curiosité, que la presse, en 2005, avait présenté « Martini » comme incarnant – « contrairement à Ratzinger » – l’aile libérale et « anti-dogmes » de l’Eglise…
Or le cardinal Martini, ce matin, a fait un éloge chaleureux du livre de Josef Ratzinger : « Je pensais écrire à la fin de mes jours un livre sur Jésus-Christ, je ne l’ai pas fait, et je suis très content du livre dont nous parlons ici. Il répond à mes désirs et à mes attentes. Je vous souhaite la joie que j’ai eue en le lisant… »
CARLO MARIA MARTINI : « LE THÈME LE PLUS PROFOND… »
À cette enquête ratzingérienne sur Jésus de Nazareth, le cardinal Martini reconnaît des mérites particuliers : notamment celui de montrer que Jésus n’est pas un mythe mais un être de chair et de sang, réellement présent dans l’histoire, et dont l’influence et la crucifixion ne s’expliquent que par ce qui s’est passé de mystérieux (ou d’inacceptable, selon les points de vue) durant sa vie publique : la manifestation par Jésus du « thème le plus profond de sa prédication », de « son propre mystère », le mystère de son union au Père. Mystère « toujours présent » dans ses faits et gestes, et qui est la clé de tout, a résumé le cardinal ; soulignant que cet angle décisif est la pointe de l’argumentation de Ratzinger.
Martini a souligné une autre des leçons du livre : l’appel à lire la Bible « comme une unité et une totalité, la parole de Dieu cohérente dans toutes ses strates historiques ».
Il a également souligné la modernité de la démarche intellectuelle de Josef Ratzinger, qui utilise pleinement les acquis de la recherche historico-critique… tout en niant à celle-ci le droit d’envahir tout le champ de la réflexion (et de détruire l’objet de son étude en le rendant incompréhensible)*.
JOSEPH DORE : LA STRUCTURE DU LIVRE
Après quoi Mgr Doré a exposé la structure du livre Jésus de Nazareth : une enquête montrant
- que Jésus situe sa propre personne dans une position « centrale » (il se présente comme étant la nouvelle Torah) ;
- centralité ancrée dans le caractère totalement unique de sa relation personnelle avec le Père ;
- unicité de Jésus qui appelle une réponse radicale de la part de ses disciples (il leur dit : « suis- moi » : c’est ce mot « moi » qui paraît une prétention blasphématoire aux grands-prêtres)…
- Ce total (centralité + unicité + radicalité) est le fait, quasi-tangible, à partir duquel la personnalité de Jésus devient intelligible et cohérente sur le plan historique et sur le plan du mystère de foi : tout ce que l’on prend pour des énigmes ou des contradictions, dans le Nouveau Testament, se résoud si on le regarde à partir de ce « point ».
Mgr Doré a souligné la profonde originalité de cette enquête : ici Josef Ratzinger ne s’en remet pas à l’enseignement du Magistère de l’Eglise, ni à la science historique, ni à la psychologie humaine (désirs-attentes) ; il part du donné néotestamentaire, transmis par des rédacteurs objectivement certains de ce qu’ils relataient, puis reçu par toutes les générations chrétiennes. Et il explique pourquoi on peut faire confiance à ce donné, prendre au sérieux le récit des disciples, comprendre pourquoi l’événement Jésus était révolutionnaire.
Quant à l’aspect parfois polémique du livre, Mgr Doré l’explique et le justifie : s’il y a des passages « cinglants » contre telle ou telle tendance interprétative des cinquante dernières années, c’est, de la part de Josef Ratzinger, l’élan de l'homme qui aime Jésus ; c’est aussi la réaction du spécialiste, indigné que l’on ampute l’histoire ou les textes ; et c’est « la sollicitude du pasteur, qui veut rendre aux gens l’accès à l’essentiel » : un accès qui avait été obstrué par certains. Avec Jésus de Nazareth, Josef Ratzinger fournit à chacun les moyens d’évaluer le sujet, et de prendre personnellement position…
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(*) Effet dont on a eu l’exemple caricatural avec les séries télévisées de Prieur et Mordillat.
17:10 Publié dans Témoignage évangélique | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : Benoit XVI, "Jésus de Nazareth", évangiles, christianisme, catholicisme
Commentaires
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Écrit par : Hugo | 23/05/2007
FAUSSE CITATION DU "CORRIERE"
> Voulez-vous savoir comment, le "Corriere della Sera" a résumé l`intervention du cardinal Martini?:
" J`admire le Jésus de Ratzinger mais il n`est pas le seul."
Phrase que le cardinal n`a bien-sûr pas prononcée , mais qui montre à elle seule, quels sont les sentiments qui animent nos chers médias à l`encontre du Saint Père et aussi ce qu`ils veulent induire dans l`esprit du lecteur avec une constance admirable!
Oui,il nous est définitivement demandé de devenir des consommateurs de médias adultes, lucides et formés.
Écrit par : Luisa Buhler | 24/05/2007
LA PRESSE ITALIENNE ET LE CARDINAL MARTINI
> Sachant que vous étiez présent à la présentation du livre , j`aimerais connaître votre avis sur ce que le cardinal Martini a dit. En Italie à quelques exceptions près on fait plutôt ressortir les critiques, du style: "J. Ratzinger n`est pas exégète mais théologien", on titre aussi: "le cardinal corrige le Pape en français,en soulignant quelques erreurs", etc.... je passe sur les détails, mais je serais curieuse de connaître vos impressions au delà de ce qui a été dit.
Certains ont même fait une relecture...et traduction de l`intervention de Martini , sachant que c`était un jésuite qui parlait !
Bref, vous qu`en avez-vous pensé?
En Italie , certains intellectuels catholiques progressistes et ceux qui se font appeler catholiques-démocratiques ne manquent pas une occasion de dénigrer Benoît XVI, même quand cette occasion leur est fournie par une réunion qui se passe à l`etranger, mais il faut dire que c`était celui qu`ils considèrent le porte-drapeau de leurs idées qui parlait!
Merci de me répondre ,si vous en avez le temps!
Grazie!
Luisa Buhler
[De PP à LB - Le cardinal Martini a dit exactement ce que je retranscris dans ma note du 23 ! Relisez-la : Martini a fait un éloge chaleureux du livre. C'est cela la trame de son intervention à l'Unesco. Et c'est dans ce contexte qu'il faut replacer les petites critiques que vous citez, et qu'ont privilégiées la presse italienne... Critiques de détail, très légères, que Martini a énoncées avec humour pour aller au devant de ce que demande le pape dans l'avant-propos de son livre : "Chacun est libre de me contredire" ! Si la presse monte en épingle ces toutes petites critiques en faisant croire : a) qu'elles sont graves, b) qu'elles constituaient le coeur du propos de Martini, c'est honteux. Vous pouvez le dire aux lecteurs de ces journaux, de la part de quelqu'un qui assistait à la table ronde.
Cela dit, tout le monde comprend que l'attitude de ces journaux s'explique par les polémiques politiques actuelles en Italie.]
Cette réponse s'adresse au commentaire
Écrit par : Luisa Buhler | 25/05/2007
> Merci pour votre réponse que je prendrai soin de transmettre.
Écrit par : Luisa Buhler | 26/05/2007
TROUBLE
> Propos d'un journal suisse avec l'aide d'une agence de presse catholique du samedi 26 mai 2007:
" Livre de Benoît XVI: Le Cardinal Martini y jette un regard critique. Il s'est tout d'abord arrêté sur son "ambiguité". Est-ce un livre d'un professeur allemand et chrétien convaincu, ou est-ce le livre d'un pape, avec son poids magistériel ? Il ne sera pas facile pour un catholique de le contredire. Peut-être aurait-il été mieux d'omettre totalement la mention du pape dans la première page du livre. L'auteur n'est pas exégète mais théologien. Il n'a pas fait d'études de première main par exemple sur les textes bibliques du Nouveau Testament. Je vois que tous ne vont pas se reconnaître dans la description qu'il donne de l'auteur du quatrième Evangile. "
Voilà de quoi jeter un trouble. Comment le résoudre ?
Merci de vos informations toujours si précieuses.
Abbé Dominique Rimaz
[De PP - Je vous confirme ce que je disais à Luisa Buhler : Apic semble avoir fait un étrange travail, sortant quelques phrases de leur contexte et faisant dire au cardinal... le contraire de ce qu'il a dit dans l'ensemble.]
Cette réponse s'adresse au commentaire
Écrit par : Dominique Rimaz | 27/05/2007
MALGRE LUI ?
> J'avoue que lors des élections du Pape, d'après l'image que nous donnaient les médias du Cardinal Martini, j'étais tenté de me le représenter comme un nouveau Mgr Gaillot. Mais avec l'exemple d'une telle déformation de ses propos, je me prends à douter. Aurait-il été embrigadé malgré lui par les médias dans leur lutte contre "l'infame"?
Oui, comment les médias en sont venus à faire de lui leur chevalier pur et sans reproche, combattant avec détermination "les ténèbres du papisme"?
Écrit par : Blaise | 27/05/2007
MARTINI NE LE FAIT PAS
> Le cardinal Martini a toujours été , déjà du temps de Jean-Paul II, l"`icône" des catholiques progressistes , des intellectuels catholiques, que certains ont défini comme" ayant le porte-monnaie à droite et le coeur à gauche". Il est vrai que tout en étant retiré à Jérusalem, il revient régulièrement en Italie où à plusieurs reprises il s`est prononcé sur des sujets sensibles, comme l`euthanasie, les couples de fait , l`avortement, d`une manière qui se prêtait à une interprétaion dont les médias ne sont pas privés, bien sûr contre le pape Benoît XVI.
Ce que l`on peut reprocher au cardinal Martini ce sont ses silences, en effet jamais il n` a corrigé les interprétations des médias, se prêtant ainsi à ce jeu qui qui a fait de lui , auprès de certains, l`anti pape.
Son intervention à Paris a ainsi permis à Alberto Melloni, un de ces intellectuels "catholiques" dits progressistes, de se lancer à nouveau contre le pape qu`il a accusé d`aggraver la culture du clergé! Sì, sì, vous avez bien lu! Et il fait cela en s`appuyant sur Martini qui lui bien sûr est au contraire quelqu`un qui fait avancer l`Eglise!
Le cardinal Martini sait tout cela, sait que certains médias vont s`approprier ses paroles et les interpréter à leur guise, il serait donc souhaitable , qu`il en tienne compte lors de ses interventions, ou alors qu`il corrige ensuite la mauvaise foi évidente de certains, toujours les mêmes d`ailleurs!
Malheureusement il ne le fait pas, laissant planer le doute . Cela sème la confusion et la division, ce qui n`est vraiment pas bon pour l`Eglise!
Écrit par : Luisa Buhler | 27/05/2007
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