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29/03/2007

Foi et "problèmes de société" : malaise chez les catholiques français ?

Une réunion décevante. Récit par un participant, « laïc en responsabilité » dans son diocèse :


gNDB -  

[Le nom du diocèse et les précisions ont été effacés, pour ne pas créer de polémiques. Le but est (simplement) de réfléchir sur un type de situation qui existe en plusieurs points du territoire. Nous ne parlons pas souvent de ce problème, pour ne rien envenimer ; mais la période "citoyenne" que l'on vit en ce moment incite à ne pas masquer cet aspect de la réalité.]

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<<  Le 20 mars dernier, l’évêque [d’un diocèse français] invitait les paroissiens d’un de ses doyennés à réfléchir et débattre sur le thème « Pour  une  société  plus  juste  et fraternelle ». Il s’agissait (à partir d’un document de la conférence des évêques de France) de tirer quelques propositions à transmettre aux hommes politiques en vue des élections.  Ma paroisse,  chargée de l’atelier Famille, m’avait demandé de bien vouloir présider celui-ci. J’ai la conviction que les catholiques ont le devoir impérieux de s’engager dans la vie publique, et qu’il  n’ont pas le droit de mettre en sourdine leurs convictions sur l’homme et sa nature en raison d’une laïcité mal comprise qui leur fait souvent penser que les idées chrétiennes relèvent de la vie privée. C’est donc bien volontiers que je me suis engagé dans la préparation de cette soirée.

Passons sur l’auditoire  composé essentielle-ment des équipes paroissiales… après tout, il ne tient qu’à nous [les associations familiales] d’occuper un terrain lorsque nous y sommes invités ! 

Le travail de notre atelier, dans la seconde partie de la réunion, s’est déroulé dans une ambiance houleuse. Des participants ont commencé par rejeter les conceptions de l’Eglise sur la famille et le respect de la vie, en assurant que « la réalité sociale » est « très éloignée des grands mots »*…

Le plus surprenant n’est pas que des membres de l’auditoire se soient opposés à une conception de la famille qu’on sait attaquée au sein même de l’Eglise : mais, plutôt, que presque personne n’ait été en mesure de leur répondre, à l’exception des membres du groupe d’animation…

Une telle rencontre appelle plusieurs réflexions.

>  Des débats « politiques » au sein de l’Eglise sont nécessaires, parce que l’Eglise est mère et maîtresse (Mater et Magistra) et qu’elle a une parole à nous donner : des règles de discernement, de pensée et d’action conformes aux exigences évangéliques. C’est pour cela qu’elle a développé depuis plus d’un siècle une doctrine sociale, dont ne nous pouvons pas nous affranchir sans contredire notre foi et l’Evangile ! Doctrine qui nous laisse libre, ensuite, de choisir entre diverses options, en subordonnant toujours ce choix au respect de quelques biens supérieurs « non négociables ». La question européenne ou les 35 heures n’en font pas partie. Le respect de la vie ou de la famille, si !

>  Il n’est pas possible de se satisfaire d’une litanie de bonnes intentions, dont certaines relèvent, au mieux d’un vague humanisme, au pire d’une conception radicalement insuffisante des exigences évangéliques (voire opposée aux principes fondamentaux).  Accepter, au nom de la « tolérance », une remise en cause totale des fondements de la famille naturelle, ou du respect de la vie en toutes circonstances, ne peut pas se justifier. La légitime expression d’opinions différentes ne peut jamais se confondre avec un relativisme moral, contradictoire avec les enseignements conjugués de la raison et de la foi.

C’est bien là que se trouve la difficulté : le relativisme philosophique est profondément ancré au cœur même des catholiques ! Ce fléau pervertit la pensée chrétienne pour la réduire à une opinion comme une autre. Il n’est pas, et ne pourra jamais être, compatible avec une religion qui se réjouit devant la Splendeur de la Vérité (Veritatis splendor).  Soyons cohérents !

Face à une telle pauvreté de la réflexion, limitée à un consensus mou et politiquement correct, les catholiques se doivent de réagir avec force et vigueur. Ils disposent pour cela d’un corpus dense, accessible, admirablement résumé dans le Compendium de la Doctrine Sociale de l’Eglise qu’il faut lire et relire, parce qu’on y trouve les éléments de discernement indispensables pour exercer nos responsabilités d’électeurs et de citoyens, en contribuant à la réalisation du « meilleur possible » (Fr. J-M. Garrigues).

Mais surtout, ils sont en droit de demander à leurs pasteurs de les enseigner sur ces sujets : non en vue de l’immixtion du pouvoir spirituel dans les affaires temporelles, mais parce que ce devoir de cohérence leur impose des choix qui peuvent aller jusqu’à l’objection de conscience. Ils ne peuvent plus se contenter d’un vote centré sur les vieux réflexes des années 70, quand les enjeux moraux sont devenus si déterminants ! Faut-il rappeler que la Note  sur l’engagement des chrétiens en politique  (passée sous un profond silence en France), signée du cardinal Ratzinger et publiée à la demande de Jean-Paul II en novembre 2002, pose des exigences sévères et incontournables en matière de choix éthiques fondamentaux… Ce devrait être le but de telles rencontres !

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Véritablement nécessaire, ce débat a été profondément décevant parce qu’il n’aboutissait pas à éclairer les catholiques soucieux de conjuguer participation démocratique, réalisme social et fidélité aux enseignements de l’Eglise (dont ils sont membres, et pas seulement le dimanche de 11 h à midi). Il ne tient qu’à nous de relever ce défi d’un engagement dans la cité, et de répondre à l’appel de l’Eglise au cœur du monde où nous vivons.  >>

 

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(*) NDB  /  Il y a donc en France des laïcs membres d’équipes paroissiales qui considèrent l’enseignement de l’Eglise comme « des grands mots ». On le savait, mais en voilà un témoignage éloquent.

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(CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI

NOTE DOCTRINALE concernant certaines questions sur l’engagement et le comportement des catholiques dans la vie politique, novembre 2002.

<<  La liberté politique n’est pas fondée, et ne peut pas l’être, sur l’idée relativiste selon laquelle toutes les conceptions du bien de l’homme ont la même vérité et la même valeur, mais sur le fait que les activités politiques visent, pour chaque cas, à la réalisation extrêmement concrète du vrai bien humain et social, dans un contexte historique, géographique, économique, technologique et culturel bien déterminé(…). Si les chrétiens sont tenus «de reconnaître la légitime multiplicité et diversité des options temporelles»[15], ils sont également appelés à s’opposer à une conception du pluralisme marquée par le relativisme moral, qui est nuisible pour la vie démocratique elle-même, celle-ci ayant besoin de fondements vrais et solides, c’est-à-dire de principes éthiques qui, en raison de leur nature et de leur rôle de fondement de la vie sociale, ne sont pas négociables.... 

Quand l’action politique est confrontée à des principes moraux qui n’admettent ni dérogation, ni exception, ni aucun compromis, l’engagement des catholiques devient plus évident et se fait lourd de responsabilités. Face à ces exigences éthiques fondamentales auxquelles on ne peut renoncer, les chrétiens doivent en effet savoir qu’est en jeu l’essence de l’ordre moral, qui concerne le bien intégral de la personne. >> ]

 

 

 

Commentaires

TOUTES SAUF UNE ?

> On dirait une réunion de mon conseil pastoral paroissial... Je connais même des catho qui refusent de prier pour les femmes qui souhaitent avorter ( c'est leur droit disent-ils) !!! Je suis effrayé par le naufrage de la foi, même chez l'infime pourcentage de catho pratiquant chez moi. Comment remonter la pente chez des gens ouverts à TOUTES les opinions possibles et imaginables sauf celle qui est orthodoxe ?

Écrit par : Gégé | 29/03/2007

" TOUT REPARTIRA DE ZERO "

> Oui, Gégé, j'ai le même vertige que vous...
Dans certaines paroisses ou réunions ou mouvements ( pas partout, et il faut s'attacher à comprendre d'où vient la différence, c'est une question en soi purement sociologique à grande valeur instructive)...
On va payer des décennies de laissez-aller, d'absence de respect des directives romaines, sur la formation doctrinale ( les meilleurs au rancart: Maritain, Gilson, Daujat, Verneaux, etc. ; Lévinas ou Ricoeur qui remplacent saint Thomas), sur l'enseignement , sur la liturgie ( ne serait-ce que l'emploi d'un missel qui vous fait apprendre des prières variées, que vous finissez par savoir par coeur, qui fortifient votre foi, que vous glosez ensuite à l'âge adulte pour vous-même, que vous transmettez à vos enfants à la prière du soir, etc. )
C'est un exemple: on a lâché sur les moyens concrets aussi, plus même moyen d'avoir un prie-Dieu, de faire une action de grâce avec piété et d' y entrainer ses enfants, etc, etc.), sur la catéchèse, son sérieux...
Et que serions-nous sincérement s'il n' y avait pas eu le discret combat de la petite équipe de laîcs (souvent formés par l' IPC, tiens, tiens, ...) de Famille Chrétienne ?
Autre exemple, nous en sommes toujours dans l'enseignement catho (ça fait quinze ans que je les observe) aux grandes hypocrisies qui retardent le bilan et bloquent toute sincérité: absence du moindre décalage avec le programme (c'est tabou, du coup on ne parle même pas du contenu de l'enseignement, de la pensée des profs, de leur foi ou idées, ce qui est, a priori, quand même le principal), caté vide, absence de formation chrétienne des jeunes, etc...
Je vois partir de l' Eglise beaucoup des ados qui côtoient mes enfants...pas moyen d'en parler, de réfléchir sincérement,
Il faut bien que ça finisse par faire des fruits amers... on y est, Gégé, qu'en pensez-vous...
C'est quand on est faible qu'on devient fort... il est écrit que tout repartira de zéro. C'est notre espérance.

Écrit par : Vincenzo | 30/03/2007

" FRUITS EXCELLENTS "

> Merci à P.P de mettre en ligne ce type de réflexion. Il faut en effet se garder de toute polémique, qui serait stérile, et d'attaques ad hominem qui attentent à a charité fraternelle.
Mais les catholiques de la génération JP II, les prêtres et évêques de cette génération ont retrouvé le sens du courage, et ne pratiquent plus la politique de l'enfouissement chère à leurs aînés, dont on a vu l'échec. Ils osent dont s'affirmer catholiques, se montrer dans le monde, participer à des débats où ils sont durement malmenés. Il est absolument nécessaire que cette génération se place aux leviers de commande de l'Eglise de France, notamment pour les laïcs, en participant aux conseils paroissiaux et épiscopaux, afin de promouvoir cette vision des choses, dans le respect et la fermeté, avec douceur mais rectitude. Lorsqu'une de mes amies, qui anime un groupe "Mère de Miséricorde", vient se présenter à notre évêque, et s'entend répondre que c'est très bien ce qu'elle fait, mais qu'il ne peut pas soutenir une telle action, la première réaction est la colère, la seconde la tristesse. Osons être ce que nous sommes ! Et surtout, N'AYONS PAS PEUR ! Et voyons les fruits excellents de toutes les associations, communautés, paroisses qui proposent, comme le dit Vincenzo, une vraie formation, une vraie liturgie, une vraie vie spirituelle. Travaillons, prions, et restons dans l'Espérance.

Écrit par : François T. | 30/03/2007

A NOUS

> Moi aussi je retrouve dans ce témoignage beaucoup de choses que j'ai vues ou entendues. Mais cela passe peu à peu. Je pense que c'est une génération, celle des années 70 et elle vieillit! A nous de reprendre les choses en main et de reconstruire ce qu'ils ont détruit. De toute façon, étant donné le peu de vocations, on va devoir s'y mettre. Quelquefois je me dis que cela fut nécessaire pour "purifier" les choses et mieux accueillir Vatican II avec tous ses fruits. Mais, en ce qui me concerne, la patience, la douceur et la charité furent vraiment mises à l'épreuve.

Écrit par : VF | 30/03/2007

EXODE

> je pense comme vf, c'est une génération qui comme dans l'exode doit finir dans le désert car elle n'a pas eu foi en Dieu.
En attendant Caleb et Josué piaffent...

Écrit par : catherine-anne | 31/03/2007

GRICIGLIANO

> Et bien moi, dans ma chapelle, ce n'est pas du tout comme cela. 100% des fidèles sont attachés aux enseignements de Rome. Tout le monde respecte Benoît XVI. Lorsque l'abbé transporte le Saint Sacrement, un enfant de choeur le précède en agitant la cloche et tous les fidèles sont à genoux.
La messe est servie par 30 à 40 enfants chaque dimanche, dans le choeur microscopique de la moitié de chapelle que l'évêque nous a attribué. L'autre moitié a été vendue par l'évêché il y a une dizaine d'années à un foyer de réinsertion sociale (qui bénéficie aussi du cloître alors que nous sommes serrés comme des sardines à chaque messe).
Si vous en doutez, venez vous rendre compte par vous même. C'est la chapelle Saint François, en plein Rennes.
Ah j'oubliais, notre bon abbé appartient à l'Institut du Christ Roi Souverain Prêtre ..... ceci explique probablement cela !

Écrit par : Arnaud | 31/03/2007

CRISE DE FOI

> La situation est certes... spéciale. Rien que tout à l'heure, une dame me racontait comment toutes ses amies, très actives dans leur jeunesse au sein de la JAC, étaient aujourd'hui minées par le culte de la réussite sociale. Toutes leurs familles ne pensent plus aujourd'hui qu'à se hisser socialement, qu'à faire de l'argent. Si vous ajoutez le refus de la culture chrétienne de la part d'élites (clergé et équipes de laïcs) qui jugent que ce n'est pas la peine de gêner les jeunes avec ce qu'ils ont eu tant de mal à oublier...
Concrètement, pour se préserver, l'"astuce" était pour moi de me "débrouiller". De lire, de comprendre l'histoire, pour mieux "relativiser" les mobiles de ces "enseignants" de l'Eglise. Le passage obligé était donc de me couper de l'Eglise: tout en continuant à m'approcher des sacrements, je devenais très critique sur toutes les homélies, toutes les publications. Cela en était même au point de prouver par a + b que le curé n'estimait pas libre l'être humain (cf un document sur la réconciliation où le péché était une pulsion).
Il en ressort deux dérives néfastes: ou bien rompre et tomber dans ce que l'étymologie nomme le schisme, en n'ayant de relation que par le biais du sacrement; ou bien être dégoûté et se laisser aller à la pensée sécularisante et relativiste de la majorité de nos concitoyens.
Difficile.
Pour en revenir à l'absence d'interventions défendant l'Eglise et sa morale, c'est presque logique. En caricaturant: les plus de 40 ans ont souhaité cette rupture pour vivre sans, les moins de 40 ans ne la comprennent pas car la société ne porte pas la morale chrétienne, et parce que les paroisses n'ont transmis aucune base de réflexion.
C'est comme du chocolat. Un homme de 50-60 ans qui en a fait une crise de foie, n'en donnera pas à ses petits-enfants. Après tout, qu'ils en aient ou pas, c'est pareil. Et aujourd'hui, il y a plein de produits de substitution. Ca leur évitera de vivre la même crise plus tard.

Écrit par : paulo | 31/03/2007

CHRETIENS PS ?

> Aujourd'hui dans le journal paroissial de la cathédrale et du centre ville d'un siège archiépiscopal du nord-ouest de la France : reportage sur les engagements politiques, et, bien entendu, portrait d'une militante "chrétienne" engagée au PS !
Quand on sait que le dit journal est édité dans le même diocèse que celui qui organise la réunion citée dans cette note, on s'interroge ! Qui relit ces publications, très largement diffusées ? Qui accepte une telle confusion entre l'engagement du baptisé et l'engagement dans un parti qui prend ouvertement et nettement position depuis des décennies en faveur d'une déshumanisation progressive de la société, qui promeut avortement, euthanasie, mariage et adoption homo, sans compter que sa philosophie matérialiste a été condamnée, et l'est toujours, par l'Eglise !
Il se trouve que je connais un peu la rédactrice en chef, donc je vais lui écrire et je sais que mon courrier sera lu. Mais si je devais m'adresser à l'archevêché, je n'aurais aucune réponse...

Écrit par : François | 06/04/2007

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