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16/11/2006

Débat : le pape et l'économie / V.F. répond à P.A.C.

De quel libéralisme, de quel capitalisme parle-t-on ? Et qu'avait dit réellement Jean-Paul II dans l'encyclique sociale Centesimus Annus ? Réponse de V.F. au message de P.A.C. (mis en ligne ce matin, voir ci-dessous) ... et réponse de P.A.C. :



<<   A  P.A.C. :  vous dites qu'en France on ne cesse de faire le procès du libéralisme, mais de quel libéralisme parle-t-on ? Lorsque je parle de libéralisme, c'est au sens actuel.

J'aurais pu dire néolibéralisme, ou ultra-libéralisme, comme le font tant de gens.

Je prend cet extrait de Centesimus Annus trouvé selon vos références:

" Peut-on dire que, après l'échec du communisme, le capitalisme est le système social qui l'emporte et que c'est vers lui que s'orientent les efforts des pays qui cherchent à reconstruire leur économie et leur société ? Est-ce ce modèle qu'il faut proposer aux pays du Tiers-Monde qui cherchent la voie du vrai progrès de leur économie et de leur société civile ? La réponse est évidemment complexe. Si, sous le nom de 'capitalisme', on désigne un système économique qui reconnaît le rôle fondamental et positif de l'entreprise, du marché, de la propriété privée et de la responsabilité qu'elle implique dans les moyens de production, de la libre créativité humaine dans le secteur économique, la réponse est sûrement positive, même s'il serait peut-être plus approprié de parler d' 'économie d'entreprise' ou d' 'économie de marché', ou simplement d' 'économie libre'. Mais si par 'capitalisme' on entend un système où la liberté dans le domaine économique n'est pas encadrée par un contexte juridique ferme qui la met au service de la liberté humaine intégrale et la considère comme une dimension particulière de cette dernière, dont l'axe est d'ordre éthique et religieux, alors la réponse est nettement négative."


Cela définit exactement ce que je veux dire. Je suis capitaliste selon le premier sens de ce terme. Malheureusement, selon moi, actuellement, c'est plutôt le second sens qui domine la pratique économique mondiale.


Il faut une économie libre pour créer des richesses et les partager. C'est évident et on a vu ce que donne une économie dirigée (urss etc.). Mais on voit aussi ce que donne une économie capitaliste totalement libre de tout freins juridiques ou moraux. Paradoxalement, c'est la Chine, communiste politiquement, mais ultracapitaliste (du moins dans ses régions de l'est) économiquement, qui nous en montre les ravages :  sociaux, moraux, écologiques etc.


Vous dites qu'en France on ne cesse de faire le procès du libéralisme, mais est-ce en faire le procès quand on critique des décisions (abandons de filières, délocalisations par exemple) prises uniquement selon un aspect de rentabilité financière, et qui ignorent totalement d'autre critères ?


Il me semble, enfin, que Jean-Paul II a sévèrement critiqué cet aspect du libéralisme notament lors de ses voyages aux USA.

V. F.  >>

 

Commentaires

CULTE DE L'ECONOMIQUE

> "C'est là qu'intervient une tendance typiquement française : croire que la sphère publique peut et doit compenser les "excès" de la sphère privée. Tout prouve au contraire que ce sont les citoyens eux-mêmes qui doivent, selon la liberté et l'esprit d'initiative qui est le leur, intervenir pour corriger ce qui, dans la pensée, les lois et les structures économiques, n'est pas respectueux de la dignité humaine. Le livre de Henri Hude "Éthique et politique" (Editions universitaires, 1992) est éclairant en ce sens."

A partir de quelle légitimité un groupe de citoyens interviendrait dans des structures économiques ? La collectivité de citoyens délègue sa volonté à des élus qui expriment (plus ou moins) leur vision de société. Je ne crois pas du tout que ce que dit le pape dans Centesimus Annus est en contradiction avec le systéme démocratique.

Le problème vient plutot du culte de l'économique et de la chose, à la place du culte du principe de toute chose (Dieu et la création), bref on se déssèche sprirituellement. Nous adorons aujourd'hui la chose et la valeur monétaire de ce qu'elle représente, là est le principal problème, au delà du système économique (car le communisme aussi plaçait l'économique au dessus de l'homme).
Même l'enfant est vu du côté sentiment et désir avant d'être vu pour ce qu'il est, c'est à dire un homme en devenir, différent des parents et lié à eux par les liens de l'union spirituelle et corporelle au moment de sa conception (avec l'aide de Dieu).
C'est aussi peut être la conséquence d'une vision scientiste de l'homme qui est abordé comme un ensemble complexe mais totalement explicable.

Où se cache la conscience du mystère de nos jours ?

Écrit par : prevalli | 17/11/2006

COMMENT CHANGER LES CHOSES ?

> Je suis entièrement d'accord avec vous, Pierre-Antoine, sur le principe de subsidiarité et le problème de l'Etat providence. Depuis la seconde guerre mondiale, nous avons, petit à petit, abandonné nos responsabilité à l'Etat: création de la sécurité sociale par nationalisation de caisses indépendantes, rôle de plus en plus envahissant de l'Education Nationale au près des familles, ANPE, etc. L'Etat, la loi doivent protéger les plus faibles mais doivent laisser les gens assumer ce qu'ils peuvent et doivent assumer et surtout libre de le faire. Par confort, paresse, solitude ou lacheté, nombre de nos concitoyens sont heureux de laisser les autres s'occuper de ce qu'ils devraient faire eux-même. Je le vois tous les jours dans mon établissement scolaire. Est-ce du à la culture et à la vision du monde matérialiste qui s'est développée depuis le "siècle des lumières" et la déchristianisation de la société qui s'en est suivi? Mais il ne faut pas oublier le rôle important que devraient avoir les syndicats et les associations selon Centesimus Annus (§15 par exemple). Malheureusement (histoire française oblige), eux aussi ont une vision du monde et de la société matérialiste voire marxiste. Comment changer cela? Comment répandre la doctrine sociale de l'Eglise tout en luttant contre le "matérialisme mercantile", pour qui tout est marchandise à vendre, ou l'Etat providence qui "cocoone" ses citoyens?

Écrit par : v.f. | 21/11/2006

"VAMPIRISER LES ENTREPRISES"

> Il faut arrêter de parler de tout ça comme si on était encore en 1950. La réalité de l'économie d'aujourd'hui, vous la trouvez à la une du Monde du 21 novembre : ce sont les fonds d'investissement qui rachètent en France des milliers d'entreprises pour les vampiriser : à chaque fois les actionnaires se sont considérablement enrichis, alors que les salaires et les investissements ont stagné. C'est l'économie financière contre l'économie réelle.

Écrit par : tribot | 21/11/2006

> "Vampiriser", vraiment ?

Écrit par : Ariane | 21/11/2006

VAMPIRISME : LE MONTAGE L.B.O.

> Le mot "vampiriser" n'est pas trop fort quand on sait que les fonds utilisent, pour racheter les entreprises, un montage financier intitulé LBO ("leverage buy out") : l'entreprise rachetée devra verser une partie de ses profits au remboursement de la dette d'acquisition plutôt qu'aux salaires... ou au réinvestissement. Le résultat est le dépérissement inéluctable de l'entreprise. C'est l'effet Dracula.

Écrit par : Géju | 21/11/2006

DANS LE MUR ?

> Dans Le Canard enchaîné du 15 novembre, un article de "choses vues" dans une vallée de Haute-Savoie où 12 000 ouvriers produisaient des pièces de haute précision pour les automobiles, avions, armement et matériel médical. Jusqu'à la mondialisation ultralibérale :
"Quand le soir, autour d'un bon jambon de pays, [Yves Bontaz] discute avec ses copains pédégés décolleteurs, tous sexagénaires, richissimes et prêts à vendre leur boîte aux fonds de pension (si ce n'est déjà fait), on sent bien que ça ne tourne pas rond. On va droit dans le mur, dit l'un. L'avance technologique nous sauve, mais pour combien de temps ? dit l'autre. On vend nous-mêmes notre technologie aux Chinois. Ils vont en construire, des bagnoles, par millions : sans nous ! Et les fonds de pension qui nous rachètent... Ils ne connaissent pas l'industrie, leur seule logique est financière, ils finiront par nous couler. Si ça continue, demain, la France va crever de faim... "

Écrit par : Dino Rapondi | 21/11/2006

PROXENETISME

> N'ayons pas peur des mots : le "leverage buy out" s'apparente au proxénétisme. On achète une entreprise, on lui fait rembourser les dettes qu'on a contractées pour l'acquérir, on la revend plus cher...à quelqu'un qui va également lui transférer sa dette d'acquisition...jusqu'à ce qu'elle ne puisse plus "tenir son rang" sur le trottoir. Alors là...
A mon sens, tout cela est très grave. Ce phénomène de vampirisation tend à anihiler le lien social (comme l'on dit), dans un pays où l'attachement (j'allais dire affectif) du salarié à son entreprise est de tradition. Mais, au-delà, il ne faut pas oublier qu'un pays sans tissu industriel n'a plus les moyens de sa souveraineté.

Cordialement,

F.

Écrit par : F. | 21/11/2006

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