08/05/2015
21 100 000 morts russes... oubliés par l'Occident de 2015
Médaille commémorative de la défense de Moscou.
1941-1945 disparaît du "devoir de mémoire" :
Sondage ICM : "43 % des jeunes Allemands, Britanniques et Français" pensent que la Seconde Guerre mondiale a été gagnée par les Etats-Unis seuls ; ils sont à peine plus de 12 % à savoir que l'armée soviétique aussi a "participé" à cette guerre.
Sondage Ifop : "Selon 54% des Français, les États-Unis sont le pays qui contribua le plus à la défaite du nazisme. En 1945, ils étaient 57% à préférer l'URSS."
Le mot "préférer" est extravagant : comme si les impressions subjectives étaient plus importantes que les faits !
Ceux-ci tiennent pourtant en deux chiffres : celui des pertes soviétiques (21 100 000 morts), et celui des pertes américaines (416 800 morts sur l'ensemble des fronts). Cette disproportion abyssale n'enlève rien au courage du GI, mais montre le rôle du combattant russe.
D'où le malaise des historiens devant la pétulance de nos médias ravis de voir "les chefs d'Etat et de gouvernement occidentaux" boycotter l'hommage qui sera rendu demain, à Moscou, à la lutte titanesque des soldats russes. Les politiciens de l'Ouest, qui n'hésitent pas à s'exhiber à Kiev* en compagnie d'épigones officiels des SS ukrainiens, font savoir qu'ils n'assisteront pas au défilé commémorant la victoire de 1945 sur le IIIe Reich...
On peut (dans certains cas on doit) rendre hommage à l'histoire d'un peuple étranger ; ça ne veut pas dire que l'on approuve la politique actuelle de son gouvernement. Ce genre de nuances constituait ce qu'on appelait naguère les relations internationales. Cet art n'a plus cours : pour punir M. Poutine de faire de la peine à M. Obama, nous zappons 21 millions de morts russes.
Voilà pourquoi les "jeunes Allemands, Britanniques et Français", formatés par la machine politico-médiatique, ne sauront pas ce qui s'est réellement passé durant la Seconde Guerre mondiale.
Quant au refrain de nos politiciens sur le "devoir de mémoire", on voit ce qu'en vaut l'aune... Notamment, ce matin, l'amphi de M. Hollande aux collégiens sur "l'importance de la transmission" : hymne (une fois de plus) à la transmission syncopée d'une mémoire défaillante. Qu'on ne s'étonne pas du résultat.
18:42 Publié dans Europe, Histoire, Russie-Ukraine-etc | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : histoire, russie, seconde guerre mondiale
Commentaires
PRÉFÉRENCES
> C'est vraiment lamentable. Mais guère étonnant quand on connaît le niveau de "culture" de nos "élites" et la mauvaise foi des politiques.
Et s'il est question de "préférer" : lors des bombardements, mes grands-parents préféraient quand c'était l'aviation britannique. Les avions volaient plus bas et ciblaient précisément les objectifs militaires (au prix de pertes plus importantes, étant plus exposés à la DCA). Les Américains bombardaient de plus haut et perdaient moins d'avions. C'était moins précis. Tant pis pour les civils. Dommages collatéraux. On ne fait pas d'omelette sans casser d'œufs n'est-ce pas ?
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Écrit par : Bernadette / | 08/05/2015
ABSTRACTION
> Depuis longtemps, nous partons dans un abstrait idéologique en parlant de "Nazi". Le Parti Unique qui a lancé et conduit ce désastre s'appelait Parti Ouvrier Allemand National-Socialiste, transposait à la lutte des races le messianisme de la lutte des classes et, Hitler l'a dit lui même, s'inspirait de la prise de pouvoir par Lénine. De ceci, on ne parle pas trop. "Nazi", c'est vague, extra-temporel.
On parle trop peu du financement de ce parti par des puissances financières américaines, ni du soutien de l'URSS au réarmement semi-clandestin de la République de Weimar.
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Écrit par : Pierre Huet / | 09/05/2015
RÉALITÉS
> Sans front à défendre à l'ouest, l'Allemagne aurait écrasé les Soviets. Sans front à l'est jamais le débarquement n'aurait été possible (et je ne parle même pas du fait pour les allemands de devoir suppléer aux faiblesses italiennes). Donc 1 partout, balle au centre ?
Non car les Soviets ont commencé la guerre aux côtés du Reich ; donc victoire aux américains ?
Non car en réalité les américains ont commencé par faire de commerce avec tout le monde (notamment exigeant que les paiements soient effectués en or), et ne sont entrés que tardivement en guerre, et d'abord dans le Pacifique.
Passer sous silence que les Soviets ont perdu 12,5% de leur population (170M. début 1939) est un peu énorme. Si les USA avaient perdu la même proportion d'homme, ce seraient plus 16 M. de GI qui seraient tombés au champ d'honneur... , 40 fois plus !
Au début des années 50 les français pensaient (à une légère majorité) que c'étaient les soviets qui avaient gagné... Toutefois, à l'époque le parti communiste pesait un autre poids. Mais depuis l'union soviétique a implosé, l'idéologie américaine, ou plutôt Wall Street a conquis le monde. Et bien souvent l'histoire est écrite par les vainqueurs.
Enfin Fabius ira quand même à Moscou mais sans assister au défilé, Ukraine oblige ... Un peu comme si M. Lavrov venait pour le 14 juillet en refusant d'assister au défilé (et encore nous sommes redevable à la Russie de son effort de guerre, l'inverse n'est pas vrai).
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Écrit par : franz / | 09/05/2015
> Plus que la comparaison des pertes soviétiques avec les pertes américaines, c'est celle des pertes de l'Axe sur le front de l'Est (5,5 millions) avec les pertes sur le front occidental (800 000 hommes) qui nous indiquent combien les Soviétiques ont cassé l'armée allemande et contribué à la victoire alliée.
Des bonnes sources ici : http://www.les-crises.fr/la-fabrique-du-cretin-defaite-nazis/
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Écrit par : Olaf / | 09/05/2015
MYARD
> Réaction forte et bienvenue d’un député inclassable (quoique UMP/Droite populaire) Jacques Myard*, qui fait assez souvent honneur à sa fonction sur les questions de défense et d’affaires étrangères.
Voici son communiqué de presse du 8 mai, à propos des commémorations russes de la Victoire de 1945 et de l’attitude de la France :
« 8/9 mai - Absence du Président de la République à Moscou : une faute !
« La France sera représentée le 9 Mai aux cérémonies de Moscou marquant la fin de la seconde guerre mondiale par son ministre des affaires étrangères Laurent Fabius.
« Le Président de la République boycotte en conséquence la Russie pour ce 70e anniversaire qui est pour les Russes une date forte, chargée sur le plan émotionnel et historique car elle est le symbole même de la résistance de tout un peuple qui a payé sa liberté au prix incroyable de 27** millions de morts. C'est le plus lourd tribut de cette guerre.
« C'est la grande guerre patriotique du peuple russe!
« Cette absence est une faute grave sans appel que la crise ukrainienne ne peut justifier en aucune manière, cette dernière crise est une crise régionale dont la responsabilité n'est pas imputable aux seuls pro-russes de Donbass et à Moscou. Ce n'est pas bleu blanc tant s'en faut, alors que lors de la seconde guerre mondiale la France libre a combattu avec le peuple russe le même ennemi!
« Ce refus de se rendre à Moscou est de la part de François Hollande une insulte à l'Histoire alors que Vladimir Poutine était venu le 6 Juin 2014 sur les plages de Normandie!
« A propos, Monsieur le Président de République connaissez vous l'opération BAGRATION que les forces russes ont lancé le 22 juin 1944 bousculant les troupes allemandes ce qui a d'autant affaibli les forces nazies à l'ouest et aidé les forces anglo-américaines pour notre libération ?
« A l'évidence la France n'a plus de politique étrangère indépendante, elle est engluée avec les ultras européens qui, contre toute raison, voient en Vladimir Poutine un nouveau Staline.
« Faire le voyage de Moscou avant d'aller à Cuba aurait été empreint d'une certaine symbolique historique unissant deux peuples qui se libèrent de la gangue du communisme, et n'aurait en rien été perçu comme un changement dans la position actuelle de Paris sur la crise urkrainienne.
« La Russie est un partenaire incontournable pour la France en Europe, il est inadmissible de lui faire un tel affront!
« Et comble d'ironie la Chancelière allemande Angela Merkel fera elle le voyage, certes le 10 Mai , mais elle ira bien à Moscou pour déposer une gerbe aux monuments aux morts! Cherchez l'erreur!
J'ai mal à ma France! Elle tourne le dos à l'Histoire donc à l'avenir! »
* Comme il se présente : « Député de la Nation, maire de Maisons-Laffitte, président du Cercle Nation et République »
** @ PP : 21 ou 27 millions ?
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Écrit par : Denis / | 09/05/2015
TÉLÉVISION
> Bien évidemment on nous repasse à longueur de temps des documentaires ou films sur le débarquement de Normandie mais très peu sur le front de l'Est.
C'est encore pire pour les camps de concentration allemands par rapport aux camps soviétiques, pourtant plus anciens et plus meurtriers.
Or c'est bien l'impact des images qui crée l'opinion publique.
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Écrit par : Ludovic / | 09/05/2015
à Ludovic
> "les camps de concentration allemands par rapport aux camps soviétiques, pourtant plus anciens et plus meurtriers".
Non, on ne peut pas dire cela.
Comparer Auschwitz-Birkenau et le Goulag n'a pas de sens.
- Le Goulag fut l'extrapolation stalinienne du système tsariste de déportation. Monstrueuse par son ampleur et par l'irrationalité des arrestations, voulue pour faire vivre tout citoyen dans la peur et la dépendance psychique absolue envers le Sommet.
- Auschwitz-Birkenau (et Chelmno, Treblinka, Maidanek etc), c'était l'extermination industrielle du juif, décrété Alien et nuisible par origine biologique.
Les deux systèmes concentrationnaires n'ont donc pas entièrement le même but.
Cette différence de but crée une différence de nature.
Comparer leur nombre de morts n'a aucun sens pour cette raison.
Et pour une raison de durée car le Goulag soviétique a duré 70 ans, mais les KZ allemands douze ans seulement et les camps d'extermination allemands trois ans et trois mois ! Brièveté due non à un effondrement spontané du régime mais à sa défaite militaire. Si le régime nazi avait duré soixante ans de plus, on imagine le bilan.
Gardons-nous donc de faire une fausse comparaison qui se tourne apparemment à l'avantage du IIIe Reich ! Laissons ça à certains.
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Écrit par : amos / | 10/05/2015
@ amos
> L'extermination des Juifs, pour les nazis, avait une portée littéralement eschatologique. Il ne s'agissait pas de tuer "des Juifs", mais de tuer le Peuple élu. Symptomatique : il y a eu des débats au sein du parti nazi, à la fin de la guerre, sur le bien-fondé de la Solution finale. En substance : nous avons exterminé la majeure partie des Juifs d'Europe, ce qui est en soi une belle et bonne chose. Nous sommes même devenus experts en la matière : recenser, arrêter, déporter, gazer 700 000 Juifs hongrois en 3 mois (avec la réalisation des infrastructures supplémentaires nécessaires, ce en temps masqué, et en temps de guerre en plus), là faut vraiment être bon. Mais bon, cela a-t-il un sens ? Pendant que l'on extermine en Europe, partout où le Grand Reich ne peut pas (ou plus) intervenir (USA, Australie, Amérique latine, Afrique du Nord...) , hé bien les Juifs continuent - et continueront longtemps- à pulluler. Le débat a été tranché de la façon suivante : ce qui compte, c'est de tuer le centre intellectuel du judaïsme, qui se trouve en Europe de l'est. Sans ce centre intellectuel, le judaïsme crèvera... Le peuple élu disparaîtra.
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Écrit par : Feld / | 10/05/2015
@ amos (bis)
> Sur le thème d'un Reich victorieux, une excellente uchronie (un peu moins connue que "Le maître du Haut château" de Philip K. Dick) : "Fatherland", de Robert Harris. Qui se passe en 1962, au moment de la détente entre les deux blocs, celui de l'est étant bien sûr le bloc allemand. Le président des E-U est Joseph Kennedy, présenté comme un ami personnel du Führer (encore vivant, mais qui a laissé la place à Martin Bormann). L'dée de génie de l'auteur : faire de seconds couteaux du nazisme, ainsi que de personnages morts prématurément dans la réalité (Heydrich...), des acteurs de premier plan du Reich du début des années 60...
http://fr.wikipedia.org/wiki/Fatherland
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Écrit par : Feld / | 11/05/2015
PLUS FACILE
> Il est sûr qu'il est plus facile d'organiser des sorties scolaires sur les plages de Normandie qu'au bord de la Volga, d'ou une présence plus forte du souvenir américain.
Mais sur le fond, oui, c'est complètement déséquilibré.
@ Denis: j'ai apprécié la position de J. Myard sur d'autres sujets, comme la Syrie, qui lui a valu d'être qualifié de gugusse par le Petit Nicolas, ce qui est somme toute un compliment.
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Écrit par : Pierre Huet / | 11/05/2015
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