13/10/2014
"La Ruche qui dit oui" : mais "oui" à qui ?
Un "système de grande surface camouflé", patronné par Xavier Niel et le patron de meetic ? Protestation des paysans bio :
<< LA RUCHE QUI DIT OUI... À QUI ?
Un nouveau “frelon” parisien exterminateur de la petite paysannerie continue ses ravages ! Depuis plusieurs années, des groupes de consom-acteurs-actrices se sont regroupés pour aider au maintien ou à l'installation de paysans (Amap¹, Acape², centres de réinsertion, etc.), mais depuis peu cette mouvance semble s'essouffler.
Par contre, de nouveaux moyens de distribution ont vu le jour, via internet, comme La Ruche qui dit oui ! Grâce à la médiatisation énorme dont a bénéficié cette nouvelle formule, l'engouement auprès de celle-ci a bien pris. En effet, la presse laisse supposer aux lecteurs qu'il s'agit de distribution de paniers en vente directe, alors que c'est une plate-forme logistique qui prélève près de 20 % du chiffre d'affaires aux paysans adhérents à ce système, dont :
– environ 10 % pour le gérant de une, voire plusieurs Ruches (comme à Saint-Nazaire) ;
– environ 10 % pour la “start-up” (°3) parisienne.
Ce fonctionnement ne permet donc pas aux petits paysans qui y adhèrent de dégager un revenu suffisant. Seules les très grosses exploitations agricoles (avec salariés) habituées à fournir les plates-formes des grandes surfaces peuvent tenir leur engagement, surtout pour les produits frais.
Ladite Ruche a un système identique aux grandes surfaces, qui consiste à faire du profit sur les producteurs en pressant sur les prix. Les petits paysans, ces dernières décennies, en ont payé les conséquences ; ils n'ont eu comme choix que de disparaître.
Installer et maintenir de jeunes paysan(ne)s en place avec ce système de Ruche capitaliste-pyramidale est impossible et loin de la solidarité active mise en place par les consom-acteurs-trices.
Des produits non bio en grande partie,
et pas si local que ça !
La plupart des fournisseurs de la Ruche sont des agriculteurs ou des artisans ou des commerçants non bio et, pour la Ruche, le local se situe dans un rayon de 250 km ! De plus, pas de contrat d'engagement fiable auprès des approvisionneurs. La loi de l'offre et de la demande conditionne les apports de marchandises auprès des consommateurs .
Qui se cache derrière les Ruches ?
Les patrons de La Ruche qui dit oui !, Xavier Niel (président de Free), Marc Simoncini (cofondateur du site de rencontres meetic. fr) et Christophe Duhamel (cofondateur du site marmitton.org) ont compris, au même titre que les patrons des grandes surfaces, l'intérêt de mettre en place un système similaire au Drive via internet³.
Cette “start up” laisse supposer qu'il s'agit d'une alternative d'achat aux grandes surfaces par un soutien aux agriculteurs, mais il n'en est rien ! Cette entreprise n'est qu'intermédiaire entre des fournisseurs et des “mangeurs” qui sont aussi dupés par une association de façade.
La seule similitude avec une ruche d'abeilles, c'est que les reines (ou plutôt les rois) s'engraissent et font leur miel sur le dos des ouvrier(ère)s (en l'occurrence les paysans) en engrangeant un chiffre d'affaires de 745 000 € en 2013 !
“Start up” bientôt cotée en Bourse ?
Le capitalisme a de beaux jours devant lui, aussi ne nous étonnons pas que cette “start up” forte de milliers d'adhérents cherche le profit à court terme et place en Bourse pour le bienfait de ses actionnaires !
Ce type de fonctionnement met en difficulté les solidarités entre les consommacteur-actrices et les paysan-nes en bio. Mais notre prise de conscience militante doit pouvoir s'appuyer sur des critères sociaux, humains et environnementaux pour contrer ce nouveau système marchand et capitaliste.
Cette “start up” est comparable à un frelon qui tue la dynamique des “vraies” ruches que sont les Amap, les Acape et autres formules solidaires avec les paysans du Nord comme du Sud.
Toutes et à tous, réagissons face à ce fléau, comme Benjamin Guilbaut l'a fait dès juin 2014, en alertant les amap dans un texte intitulé : "Attention... pourquoi les amap disent non à La Ruche qui dit oui !" http://www.amapbiodevant.fr/blog/actualites/reseau/attent...
Vous pouvez faire circuler l'info dans vos réseaux sociaux pour générer une contre-offensive avant qu'il ne soit trop tard pour la survie des petits paysans bio dont nous faisons partie.
Si vous connaissez des journaux alternatifs, vous pouvez leur demander de s'emparer de ce sujet afin de dénoncer les méthodes de ce grand groupe financier qui veut s'emparer de l'autonomie alimentaire et qui menace dangereusement les réseaux de distribution des petits paysans de France et d'ailleurs.
Hubert Morice
paysan bio cofondateur des Acape autogérées de Saint-Nazaire (44)
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¹ Amap : association pour le maintien de l'agriculture paysanne et bio.
² Acape : Alliance de consom-acteur-actrices, de paysan-nes et d'associations écologistes.
³ “La Ruche qui dit non !” >>
12:32 Publié dans Ecologie, Economie- financegestion | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : écologie, économie
Commentaires
OPPOSÉ
> Evidemment. Et d'ailleurs, même s'il ne s'agissait pas de Niel et compagnie, le fonctionnement de ce truc au nom ridicule est intrinsèquement opposé aux AMAP.
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Écrit par : JG / | 13/10/2014
SUCCURSALES
> Merdalors ! Encore une alternative qui n'en est pas une ?
Comme le gros et incontournable site de covoiturage que voilà : http://fr.wikipedia.org/wiki/BlaBlaCar
Après quelques années, la supercherie est découverte, et la déception est grande.
Mais la grande majorité des "utilisateurs" n'y voient aucun inconvénient, bien au contraire : "c'est pratique", "c'est plus sécurisé", "ces gens sont des pros", "tu ronchonnes à chaque fois que quelque chose marche", etc etc.
On va bientôt découvrir que le wwoofing est en fait une succursale de Monsanto ?
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Écrit par : PMalo / | 13/10/2014
> Merci de cette information précieuse.
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Écrit par : ludovic / | 14/10/2014
PAS D'ACCORD
> mouais, c'est une vue quand même très biaisée du truc. Oui la start up se rémunère mais c'est elle aussi qui assure toute la pub, rassure, entretient l'image de marque et ramène le client + fait point de vente près du client (stockage/distrib)...
Honnêtement je pourrais passer via cette start-up ou une autre mais ne me voit pas faire le tour des producteurs pour acheter tous mes produits.... Ca me prendrait tout mon we...
Sur rémunération des actionnaires. Niel, Simoncini et Marmiton n'ont qu'une faible part du capital. La grosse partie est détenue par les fondateurs.
Enfin, libre au producteur de faire sa vente en direct et d'assumer lui même les coûts de prospection and co, personne ne l'oblige. De mon point de vue, les 20% sur stockage + prospection ne sont pas chers payés => papa est-ce que tu ne serais pas prêt à filer 20% (au moins au départ) à une boîte / site qui t'apporterait des clients pour ton business de photographe ? t'évitant de faire le tour des traiteurs, ....
Pour info un groupon & co prend beaucoup plus...
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Écrit par : loïc / | 15/10/2014
Pour avoir côtoyé des activités logistique:
> le coût de 20% ne semble pas exorbitant.
Par contre, ce qui va plus gravement à l'encontre d'une agriculture familiale, ce sont les contraintes qu'exige le fonctionnement de ce type de plate-forme, où les manipulations sont multiples: fruits et légumes cueillis avant maturité pour supporter transport et manutention, robustesse des emballages, étiquetage spécifique, ponctualité des livraisons à la plate-forme etc.
Tout cela coûte très cher, est très contraignant, et s'accorde mal avec l'imprévu du vivant.
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Écrit par : Pierre Huet / | 15/10/2014
PAS D'ACCORD
> Je fournis 2 ruches près de chez moi et je m'inscris en faux sur tous les propos précédents : je fournis la ruche quand je le souhaite, il n'y a pas d'obligation de livrer, je dois être présent aux livraisons, mes produits sont les mêmes que ceux qui sont vendus chez moi, ni plus ni moins bio.
Je trouve que 20% c'est effectivement onéreux mais je majore le prix de mon exploitation de 15 % environ et l'argent est sur mon compte directement. Cela fait toujours moins chez pour le client que de venir chez moi ou me commander sur internet.En plus j'en profite pour livrer mes bons clients sans frais de port quand je vais fournir la ruche. Le consommateur s'y retrouve et moi aussi !
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Écrit par : Hey / | 27/10/2014
FORMULES
> Les deux formules sont, en effet, complémentaires et tant mieux s'il est possible de choisir. Dans ma ville, vient s'ajouter à l'offre, la formule des campaniers (fruits et légumes) et je connais des personnes inscrites sur les trois réseaux !
le seul point qui me chiffonne est que, lors de commandes à la Ruche, le montant prélevé est crédité vers un compte belge. J'ai posé la question du pourquoi ? et n'ai pas obtenu de réponse. Peut-être quelqu'un le sait-il ?
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Écrit par : le touzé estelle / | 10/12/2014
VENTE INDIRECTE
> Je pense que le compte belge est le compte de l'intermédiaire de paiement en ligne.
En fait, la Ruche machin qui prône la vente directe est une vente indirecte au niveau du transfert d'argent.
Le client paie via le site, une entreprise spécialisée dans le paiement en ligne (ça semble arriver sur un compte belge), ensuite cette entreprise vire l'argent à la ruche (et prend une part), puis la ruche verse l'argent au producteur et au gérant de la vente.
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Écrit par : mike / | 21/12/2014
INTERMÉDIAIRES
> Il est quand même dommage que cet article ne parle que de deux systèmes de circuits-courts actuels. Enfin quand je dis circuit-court, celui de la RQDO vous fait passer par Paris (la ruche "Mama" et le Luxembourg (en partie pour le paiement). De plus pour un circuit-court la RQDO rémunère en plus du producteur, trois intermédiaires :
- L’abeille locale qui fournit la majorité du travail et ce n’est que justice au vu du travail fourni.
- La ruche Mama qui fournit un site d’e-commerce.
- Une banque qui prélève sa dîme au passage.
Je trouve "beau" aussi le fait que pour acheter des légumes à un producteur situé à 5 km de chez moi, je doive rémunérer deux parasites situés à plus de 800 km de mon domicile.
Une AMAP a le mérite d’être un lien direct du producteur au consommateur.
Et si les contraintes de l’AMAP ne vous conviennent pas, il suffit d’utiliser de simples tableaux en ligne. Ils nous permettent depuis 7 ans de commander à des producteurs en local et en bio. Par contre, cela demande évidemment de se prendre par la main et de vouloir être acteur dans notre société.
C’est un point de vue partisan mais objectif je pense.
Roberto
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Écrit par : roberto / | 29/01/2015
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