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18/01/2012

Nouveau livre de l'archevêque de Paris : la véritable vision (sociale, économique et politique) de l'Eglise catholique

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Quelle société voulons-nous ? (Pocket)

"On ne peut plus faire reposer notre système collectif sur des promesses de croissance permanente. On ne peut plus imaginer de préserver notre niveau de consommation en oubliant le reste de l'univers" :


 

Le cardinal André Vingt-Trois a publié de nombreux livres. Au seuil d'une campagne présidentielle, celui-ci répond à plusieurs questions : « L'Eglise a-t-elle quelque chose à dire sur les programmes qui seront présentés ? Doit-elle s'exprimer ? Peut-elle le faire sans briser le pacte laïc qui caractérise notre société française ? »

Ce livre intéressera tout le monde, car : a) ce que dit l'Eglise répond aux soucis de tout le monde ; b) ce qu'elle dit est tout à fait autre chose qu'une partie de ce qui circule sur la Toile sous pavillon catholique – souvent usurpé. Je conseille à tous de se procurer ce petit livre, qui contient, bien entendu, les positions de l'Eglise sur des questions comme celle de la bioéthique et de la défense de la vie. Mais pas seulement ! Acte officiel du président des évêques français, il ne s'en tient pas à parler des effets. Il remonte aux causes. Il met en perspective toutes les questions de société sans se focaliser seulement sur certaines d'entre elles. Et il aborde la question essentielle : l'origine, culturelle et économique, de la crise dans tous les domaines.

Voici quelques aperçus.

L'Eglise catholique, explique le cardinal, n'envisage la question politique que sous l'angle du bien commun :

 « Cette perception du bien commun et d'une solidarité entre les membres d'une nation dépasse de beaucoup la mission régalienne de redistribution financière. Elle se nourrit d'une capacité commune à se reconnaître solidaires, dans une nation, dans l'ensemble européen, et même à l'échelle de la planète en ce temps de la mondialisation et du souci écologique. »

On sait que les devoirs sociaux (politiques, économiques) du chrétien ne doivent pas être confondus avec des fantasmes, futuristes ou passéistes... À ce sujet, le cardinal explique :

 « 1. Il n'y a jamais eu d'âge d'or. Bien sûr, vos grands-mères et peut-être encore vos mères ou vos pères vous racontent que, dans leur jeunesse, tout allait beaucoup mieux, que tout le monde était chrétien, que tous allaient à la messe le dimanche, le sourire aux lèvres et le missel sous le bras. Mais nous savons bien que la réalité était moins idéale. L'étrangeté du Christ et celle de l'Evangile n'ont jamais été absorbées par aucune société ni aucune culture.

 2. Il n'y a jamais eu de coïncidence complète entre la foi chrétienne et un système social ou politique. Il ne suffit pas de dire que le Royaume de Dieu n'est pas de ce monde. Il faut encore comprendre qu'aucun royaume de ce monde ne peut être le Royaume de Dieu.[...]

6. La situation des chrétiens dans un monde professionnel dominé par les impératifs économiques est inévitablement une situation d'instabilité à surmonter. Quand je parle d'instabilité, je ne pense pas d'abord à celle de l'emploi, dont tout le monde sait qu'elle existe, mais à un décalage par rapport à tous les objectifs de rentabilité, par rapport à une adhésion sans faille à ces objectifs, par rapport au renoncement aux autres dimensions de la vie qui sont plus ou moins implicitement nécessaires si la réussite dans une carrière prime tous les autres projets. Le chrétien sait de source sûre que la réussite professionnelle n'est pas le critère du bonheur. »

 Et le cardinal pose « la question culturelle fondamentale, même si beaucoup feignent de ne pas la voir et de passer outre » :

 « ...comment faire évoluer notre système économique et social pour qu'il ne repose plus sur le seul dynamisme de la consommation dont les spirales n'ont été que trop dommageables ? On ne peut plus faire reposer notre système collectif sur des promesses de croissance permanente. On ne peut plus imaginer de préserver notre niveau de consommation en oubliant le reste de l'univers. Les récents débats des Nations-Unies ne peuvent pas rester une simple déclaration d'intentions généreuses. Ils doivent passer de plus en plus dans les décisions et les applications. »

 Il ajoute, citant les assemblées épiscopales des dernières années :

 « Le moment vient où nous devrons prendre en compte les limites des richesses à partager. Comment pouvons-nous aider nos contemporains à intégrer dans leurs attentes le fait que notre planète n'est pas un réservoir indéfini de consommation possible ? Ce qui est en cause, c'est la logique même de notre fonctionnement économique, dont le dynamisme repose sur l'expansion indéfinie des revenus et de la consommation. […] Beaucoup de nos contemporains commencent à comprendre qu'une société plus juste et plus respectueuse de son environnement est nécessaire. Ils comprennent aussi que l'usage plus raisonnable des biens de ce monde appelle à une révision courageuse de nos modes de vie. Il ne s'agit plus seulement de militer pour des thèses vaguement écologistes. Le moment est venu de réfléchir et de décider comment réduire la consommation toujours croissante au détriment de pays moins développés qui subissent les dommages de la nature... »

En novembre 2010, à Lourdes, le cardinal pressentait l'éclosion internationale du phénomène des « « indignés » : « ...il n'est donc pas vraiment étonnant que ce sentiment d'injustice, cette inquiétude pour l'avenir et l'anxiété des jeunes nourrissent des expressions de tension collective et parfois de violence. Une société démocratique suppose un pacte de confiance entre les partenaires, y compris quand ils divergent sur les solutions politiques à mettre en oeuvre. »

Un livre à lire d'urgence, pour aider autour de nous à se faire une idée exacte de la pensée catholique.

 

Cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris : Quelle société voulons-nous ? (Pocket, 2012).

 

Commentaires

> Merci pour l'info PP, je viens de le commander !
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Écrit par : Tangui / | 18/01/2012

MERCI AU CARDINAL

> Alléluia ! Un grand merci au cardinal André Vingt-Trois. Il met en lumière l'incompatibilité radicale entre la croissance de l'être chrétien, et notre adhésion à l'injonction de la croissance économique. Les masques vont tomber, fondre sous le feu de l'Esprit Saint, qui poursuit son oeuvre irrésistiblement...
Rendre grâce à Dieu dans d'hypocrites louanges pour mieux se cacher les crimes auxquels nous prenons part, camouflés dans des modes de vie apparemment si banals, n'est plus tenable.
Nos choix ne seront jamais purs ici-bas, mais on ne peut définitivement plus se mentir quant à celui qui se présente désormais clairement sous nos yeux, et qui nous appelle à convertir simultanément nos coeurs et nos modes de vie.
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Écrit par : Serge Lellouche / | 18/01/2012

OBJECTEUR

> Alléluia! Quelle bonne nouvelle! Jusque là, être objecteur de croissance était marginal au sein de l'Église catholique. Monseigneur Vingt-Trois montre que ce n'est désormais plus le cas.
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Écrit par : Mahaut / | 18/01/2012

EVOLUTION

> Belle évolution : je me souviens d'un temps pas si lointain où le cardinal, lors de la présentation à la presse de Caritas in Veritate, prenait bien soin de préciser qu'il ne pouvait nullement s'agir d'une incitation à la décroissance... Ni même d'une incitation à se poser la question.
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Écrit par : JG / | 18/01/2012

STIMULANT

> Merci pour ces extraits qui promettent une lecture stimulante et pleine d'espérance ! Je vais faire un saut cet après-midi chez Siloë, j'espère qu'ils l'auront.
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Écrit par : cristiana / | 18/01/2012

AVANT LES CRÊPES

> Je viens juste de jeter un oeil sur ce post, sans pour autant connaitre le contenu du livre en question, avant de repartir.
Avant de déguster les crêpes du mardi gras,un préambule pour préparer le carême...? Sous peu,je vais voir pour me procurer le livre.
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Écrit par : Stéphan / | 18/01/2012

@ à JG

> Le même cardinal ?! comme quoi les hommes d'Eglise sont bel et bien perméables à l'air du temps !
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Écrit par : Pierre Huet / | 20/01/2012

DECROISSANCE ?

> Ne sommes nous pas déjà en décroissance ? Je n'ai pas l'impression que ça aille très bien.
Mettre sobriété comme le suggère JB de Foucault dans son pacte civique est certes fort juste mais pour trouver de quoi faire bouillir les marmites dans les familles sera dans tous les cas de plus en plus une gageure.

GBA


[ De PP à GBA - La décroissance (disent les objecteurs de croissance), ce n'est pas quand ça va mal. C'est quand il y a "moins de biens et plus de liens", c à d quand on sort du modèle hystérique-consumériste pour inventer la sobriété heureuse... ]

réponse au commentaire

Écrit par : GBA92 / | 22/01/2012

@ GBA

> La décroissance n'est pas la récession. On ne peut parler de récession que dans le cadre d'un modèle économique fondé sur le productivisme. L'objection de croissance (ce terme est plus parlant que décroissance) refuse le modèle économique fondé sur le productivisme, le toujours plus et la consommation à outrance. L'objection de croissance n'est pas la misère.
______

Écrit par : Mahaut / | 23/01/2012

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