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17/05/2007

En lisant le livre de Benoît XVI, « Jésus de Nazareth »

2/ Un diagnostic acéré, une lumière nouvelle :


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Malgré ce Jésus de Nazareth,  les journalistes persisteront-ils à  accuser  son auteur de « conservatisme » ?  Est-on « conservateur » si  l'on  combat  les  idées  dominantes  ?  Non...  Or  c’est ce que fait  le  livre  du  pape : il montre la facticité des images de Jésus inventées et installées  depuis le siècle dernier.  Il utilise les acquis des méthodes scientifiques d’investigation (histoire et exégèse), pour jeter une lumière nouvelle sur Jésus.

Le lecteur va de surprise en surprise : il découvre que le « Jésus de l’histoire » contient déjà le « Christ de la foi ».

Au chapitre 3, par exemple, le pape Ratzinger scrute les débuts des évangiles. Que sont les évangiles ? Beaucoup plus qu’une « bonne nouvelle », terme trop faible ! Le mot  « évangiles », c’est  (au Ier siècle) le nom officiel des messages des empereurs romains, actes  de souveraineté  censés transformer le monde. Si Jésus et les apôtres utilisent ce mot, c’est à dessein, avec toute sa force de percussion. Sens de ce détournement de vocable : celui qui sauve le monde, c’est Dieu, ce n’est pas César. 

Et quelle est la « nouvelle » portée par les évangiles ? C’est que « le Royaume est proche ».

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MAIS QU'EST-CE QUE LE ROYAUME ?

 

Ici, l’enquête de Benoît XVI devient acérée. Il renvoie dos à dos deux erreurs contraires :

a)  une certaine théologie triomphaliste du XIXe siècle qui assimilait le Royaume à l’Eglise (sur terre) ;

b) et, à l’inverse, les dérapages issus de la théologie libérale protestante (puis catholique) au XXe siècle : série de glissements qui ont voulu écarter « tout ce qui divise l’humanité » : écarter d’abord le Christ, puis Dieu, pour aboutir à l’idée que le Royaume n’est rien d’autre que l’union de l’humanité pour la paix ; la véritable mission « des religions » étant de se dissoudre dans ce programme, et de se mettre au service de pouvoirs séculiers.

Ce sont de fausses pistes, explique Benoît XVI : ceux qui les suivent sont obligés, « à partir de leurs critères, de contester une grande partie des paroles de Jésus […] et d’en infléchir d’autres dans leur sens, même s’ils doivent pour cela leur faire violence ».

Mais l’évangile résiste à ces entreprises d’instrumentalisation : « la réalité que Jésus appelle ‘‘Royaume de Dieu, Seigneurie de Dieu’’ est extrêmement complexe, et c’est seulement en l’acceptant dans sa totalité que nous pouvons nous approcher de son message et nous laisser guider par lui. »

Jésus dans les évangiles nous dit :

- que Dieu est,

- qu’il agit ici et maintenant,

- que le Royaume « tout proche » est à la fois le temps de la pénitence et de la joie,

-  que le Royaume, c’est Jésus lui-même au milieu de nous,

- que le Royaume « n’est pas là de par la simple présence physique de Jésus, mais qu’il l’est à travers son action dans l’Esprit Saint. En ce sens, c’est en lui et par lui que le Royaume de Dieu est présent ici et maintenant, qu’il est ‘‘tout proche’’… » 

Quand on a saisi cela, explique le pape, tous les faux problèmes théologiques disparaissent : l’opposition entre la communauté et l’individu, l’opposition entre la grâce et l’agir humain, etc.

Et pour saisir cela, il a suffi de se recentrer sur Jésus le Christ !

En lisant le livre du pape, nous comprenons aussi que la foi (la confiance) en Jésus-Christ est vraiment « signe de contradiction », aujourd’hui comme il y a deux mille ans.  C’est pour rejeter  cette confiance – consciemment ou inconsciemment – que se sont fabriquées les théories dérapantes du siècle dernier. Pourquoi ce rejet ? C’est une autre histoire.  

 

 

 

Commentaires

COMPLEXE, HEUREUSEMENT

> « la réalité que Jésus appelle ‘‘Royaume de Dieu, Seigneurie de Dieu’’ est extrêmement complexe, et c’est seulement en l’acceptant dans sa totalité que nous pouvons nous approcher de son message et nous laisser guider par lui. »
Heureusement que c'est complexe. Et finalement, c'est extraordinairement beau de se préparer à entrer dans ce Royaume... en acceptant la main du Christ. Si nous savions avec une relative précision l'agencement, l'architecture du Ciel... cela laisserait entendre que nous devrions être - au moins certains d'entre nous - les créateurs de ce lieu... alors limité. C'est la tentation de la gnose qui veut posséder ce savoir.
En même temps, prenez la figure de l'ange présent dans le Ciel. Si les peintres - comme Fra Angelico, ou Giotto - avaient mis en scène de grands rectangles blancs pour dire: vous ne les voyez pas, je ne peux pas les donner à voir car ils n'ont pas de chair, mais il y a des anges là. Dur, dur de comprendre, et d'aider les chrétiens à mieux espérer, par l'art, le Royaume de Dieu. La matière fige, ouvre une fenêtre pour enfermer l'espace dans une pièce. Mais sans cette fenêtre visible, l'homme peine à dépasser ses quatre murs.
Le romantisme, le développement de l'impression (images pieuses, missels, journaux...) ont réussi à créer un art sulpicien, kitsch, qui a quelque part dénaturé l'image du Ciel... d'où schématiquement un refus ultérieur, avec une omniprésence de l'homme. Mais des enquêtes ont montré que ce même kitsch plaît aux humbles gens. Ces pauvres que l'Eglise a bien malmenés en refusant leur "religion populaire". Et l'Eglise, avec le temps qui passe, a enterré ces dévotions jugées fossiles, superstitieuses ou inconvenantes. Les plus jeunes ne les connaissant plus, nous avons déconnecté les jeunes générations de leur patrimoine. Celui qui aime cherche à connaître mieux et respecte. Celui qui ne peut pas connaître aura du mal à respecter et à aimer.
Merci au Saint Père de nous faire mieux connaître, respecter et aimer Notre Sauveur.

Écrit par : Paulo | 17/05/2007

"EVANGILE"

> Veuillez me pardonner, je n'ai évidemment pas encore lu le livre de Benoît XVI, mais je pensais que Evangile venait du grec "epangelia" qui désignait le message qu'annonçaient les ambassades venant des sanctuaires panhelléniques (Olympie, Delphes, Corinthe et Némée), c'est-à-dire la trêve sacrée pour les jeux qui rassemblaient la communauté grecque face aux dieux. Terme repris par les consuls romains puis par les empereurs après l'annexion de la Grèce et surtout après leur divinisation à l'image des souverains hellénistiques. ''Evangile'', au sens grec du terme, signifiant donc paix et concorde entre les hommes à la demande des dieux. Je croyais que c'est ce sens qu'avait retenu les "évangélistes" en reprenant ce terme pour le christianiser.

VF

[De PP à VF :
Sur l'évolution du sens de ce mot : « Le terme a reçu à l’époque une signification religieuse nouvelle, en rapport avec le culte impérial. Tant Philon que Josèphe sont témoins de cet emploi : ainsi l’élévation de Vespasien à la dignité d’empereur fait l’objet d’un "évangile" (Flavius Josèphe, "La guerre des Juifs", 4, 618). Plusieurs inscriptions hellénistiques en l’honneur d’un roi ou d’un empereur attestent que la signification salvifique du terme était bien répandue à l’époque du Nouveau Testament. » (Benoît Standaert, Dictionnaire encyclopédique de la Bible, Brepols 1987).]

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Écrit par : VF | 17/05/2007

> Un grand merci pour la présentation de ce livre que j'ai hâte de lire !

Écrit par : Flore | 17/05/2007

CARMIGNAC

> A signaler l' excellent travail de l' association Jean Carmignac dont les 20 derniers bulletins sont disponibles en ligne. Voici le lien:
http://www.abbe-carmignac.org/

Écrit par : froissart | 17/05/2007

L'EGLISE ET LES NATIONS

> Patrice, vous dites : " En lisant le livre du pape, nous comprenons aussi que la foi (la confiance) en Jésus-Christ est vraiment « signe de contradiction », aujourd’hui comme il y a deux mille ans. C’est pour rejeter cette confiance – consciemment ou inconsciemment – que se sont fabriquées les théories dérapantes du siècle dernier. Pourquoi ce rejet ? C’est une autre histoire. "
Ce rejet n'est que la conséquence du conflit entre une conception du monde issue des Lumières et la conception chrétienne. La Révolution a favorisé la prééminence de la première sur la seconde. La première a consacré le principe d'Etat Nation qui a dressé des barrières entre les peuples, engendrant la haine quand la seconde prêche l'amour du prochain.
Le message du Christ s'oppose à l'embrigadement des peuples pour les mener à s'entretuer. L'Evangile est un obstacle à l'hégémonie des Etats et aux guerres qu'elles engendrent.
Voilà peut-être la raison - la nécessité - pour les Etats modernes et leurs dirigeants de décrédibiliser, travestir ou adapter le message du Christ dans le sens de leurs intérêts.
Le livre du pape contribue un peu plus à souligner l'incompatibilité, l'opposition du principe d'Etat Nation au caractère universel du message du Christ.
Deux facteurs favorisent aujourd'hui le second sur le premier.
Le principe d'Etat Nation est mis en cause par la théorie du patriotisme constitutionnel (qui semble avoir su attirer l'attention de Benoît XVI).
Il est aussi remis en cause par l'évolution de l'économie. La mondialisation relègue les Nations à un rôle subalterne.
Ces facteurs sonnent le temps d'une époque qui aura duré deux siècles. Une époque qui aura vu l'émancipation des nationalismes, l'avènement de l'industrie, de l'ère technicienne, des guerres "modernes", des destructions massives. Les défenseurs du principe (moderne - mais mourant ) de Nation sentent le danger qui le menace et ils en deviennent d'autant plus virulents contre le message de l'Eglise, qui, elle, trouve de plus en plus d'écho.

Qwyzyx

[De PP à Q. - Tresmontant pensait comme vous là-dessus. Mais d'autres diront que le cadre national, à l'heure actuelle, est le seul sur lequel s'appuyer face au bulldozer de la mondialisation... Et que celle-ci s'en prend à lui en priorité... Vaste débat.]

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Écrit par : Qwyzyx | 18/05/2007

MONDIALISATION OU DESERTION

> Quelle protection ? La société du scandale ordinaire prospère, elle diffuse le mépris de la dignité humaine. La réponse au scandale d'Outreau révèle la faiblesse de la capacité d'indignation qui caractérise les hommes et leur justice : fascisme mou de l'indifférence, des apparences.
La mondialisation s'installe et prospère - comme l'islam - partout où disparaissent la réalité des principes qui devraient faire la force - la réalité - de l'Etat Nation.
L'Etat Nation ressemble de plus en plus à une caserne vide. La mondialisation ne serait-elle pas surtout le résultat d'une désertion ?

Écrit par : Qwyzyx | 18/05/2007

SONGEUR

> Etat-nation...C'est une expression qui m'a toujours laissé songeur. Qu'y-a-t-il de commun entre un Alsacien et un Corse? Entre un Basque et un auvergnat ou un Breton? Un état? Par contre, je crois que nous avons une patrie, une terre, plus ou moins vaste et modelée par nos ancêtres et à laquelle, personnelement, je me sens profondément attaché. C'est là-dessus, à la rigueur, que nous pouvons nous appuyer pour résister à la globalisation culturelle. ( Je dis résister car vouloir se protéger est illusoir ou utopique!). Mais je pense que, pour ce qui est des aspects moraux ou spirituels (ou anti-spirituels plutôt), nous devons nous appuyer sur le Christ et son vicaire.

Écrit par : VF | 18/05/2007

ETAT ET NATION

> Je crois que le problème est que l'Etat est de plus plus Etat et de moins en moins Nation.
L'Etat comme puissance ayant le pouvoir absolu (temporel et spirituel) écrase.
La Nation le dépasse (L'Etat devrait être à son service), c'est un peuple, une histoire, une culture propres à casser la mondialisation sans âme.

Écrit par : Ludovic | 18/05/2007

NE NOUS SOUMETS PAS À LA TENTATION

> Le Saint Père écrit dans son dernier livre sur le Christ que "Dieu accorde un pouvoir limité au mal. Tout d’abord pour nous punir de nos fautes...".
Je ne parviens pas à m'imaginer Dieu en train de punir, ne serait-ce que médiatement, en autorisant le mal à en assumer la tâche; Dieu qui a lui même enduré La punition suprême que méritait l'Humanité pour accéder à l'expiation. Je serais curieux et heureux de connaître votre sentiment sur le sujet.
Cordialement,
Bertrand Leblanc-Barbedienne


[De PP à BLB :

Le passage que vous évoquez se situe pages 187-188. Il s'agit d'un chapitre consacré à expliquer toutes les résonances du "Notre Père". Les paragraphes en question concernent la dermande : "Ne nous soumets pas à la tentation". C'est là qu'est mentionnée l'hypothèse dont vous parlez ; elle n'est pas de Benoît XVI, mais il la cite comme étant de saint Cyprien, qui l'évoque parmi plusieurs interprétations possibles. Si vous avez le livre entre les mains, vous avez constaté sa richesse et ses innombrables pistes positives ; on ne saurait l'identifier à l'hypothèse de saint Cyprien, qui occupe quinze lignes sur 428 pages, et qui n'est d'ailleurs pas pessimiste. Cyprien écrit : "Nous devons mettre entre les mains de Dieu nos craintes, nos espérances, nos résolutions, puisque le démon ne peut nous tenter qu'autant que Dieu lui en donne le pouvoir". Cette idée est intrinsèquement biblique, et on la trouve déjà dans le livre de Job.]

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Écrit par : Leblanc-Barbedienne | 19/05/2007

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