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20/05/2015

Robert Culat : "Méditations bibliques sur les animaux"

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Un livre nécessaire, profond et surprenant :


 

 

Parlant en 2014 des chrétiens écologistes, un prélat les accusait de ne pas « voir les choses dans une perspective eschatologique ». Il se trompait très étrangement  : l'eschatologie est la matrice de l'écologie chrétienne, comme le prouve la vaste oeuvre (philosophique et théologique) de Jean Bastaire qui inspira nombre de vocations d'écologistes catholiques. Une chaire porte d'ailleurs son nom à la Catho de Lyon.

L'écologie concerne toute la Création, homme inclus. Elle implique donc les relations de l'homme avec ses « frères  et soeurs » les animaux, comme disait François d'Assise. Et ces relations trouvent leur fondement dans l'Ancien et le Nouveau Testament : c'est ce que montre de façon érudite et vivante l'ouvrage que vient de publier (à l'Harmattan) le P. Robert Culat, aumônier des Français de Copenhague.

 

imagesZWFDGF1U.jpg« Je suis un simple chrétien, un prêtre diocésain qui aime fréquenter les textes bibliques », écrit l'e P. Culat dans son introduction – où il constate que le catholicisme français a longtemps snobé la dimension écologique de la responsabilité chrétienne... en dépit des efforts déployés en ce sens par les papes : « Au cours de mes sept années d'études au séminaire, en vue de devenir prêtre, je ne me souviens pas d'avoir eu un seul cours sur la question écologique, pourtant abordée régulièrement du point de vue chrétien depuis Jean-Paul II et cela jusque dans le très officiel 'Compendium de la doctrine sociale de l'Eglise' *... »

Le P. Culat se dit convaincu (et nous le sommes avec lui) de l'urgence de développer une solide théologie de la Création, « apte à répondre aux défis de notre temps dans le domaine écologique ». Ces défis touchent tous les aspects de la vie moderne : de la déshumanisation (par l'artificialisation capitaliste du vivant**) à l'épuisement des ressources naturelles ; et du changement climatique au sort fait aux animaux par notre économie.

« Etant donné que la Bible est au fondement de la civilisation judéo-chrétienne, on comprendra aisément l'importance de ce qu'elle affirme au sujet des animaux au regard de la situation qui est la nôtre aujourd'hui en Occident », écrit le P. Culat. Son livre s'intitule Méditations bibliques sur les animaux : le lecteur catholique français y découvrira des choses dont il a peu entendu parler à l'homélie du dimanche ! Pourtant « la manière dont nous nous comportons avec les animaux et avec notre environnement est déterminante pour le progrès spirituel de notre humanité... »

Ces vingt-quatre méditations commencent au livre de la Genèse, traversent toute la Bible (notamment les psaumes), et s'achèvent avec les épîtres de saint Paul. Il en ressort que nous sommes devenus « la crainte et la terreur des animaux » à cause de notre violence pécheresse, alors que le Créateur (Genèse 9:9-10) avait établi son alliance « avec vous et tous les êtres vivants qui sont autour de vous, les oiseaux, les animaux domestiques, toutes les bêtes sauvages... ». Quant à cacher la violence pécheresse sous le prétexte d'une « royauté de l'homme » qui lui donnerait tous les droits par délégation divine, c'est une hérésie ! En effet, souligne le P. Culat avec saint Paul, le centre de la Création voulue par Dieu n'est pas l'homme mais le Christ : « tout a été créé par Lui et pour Lui »  (Colossiens 1:16). « Seul le Christ est véritablement le Chef et le Roi de l'univers. L'homme ne fait que participer à cette royauté, comme dans la Genèse il participait à l'autorité de Dieu créateur... »

D'où la dimension eschatologique qui concerne la Création entière « criant sa souffrance », comme le dit saint Paul (Romains 8:19-22). Et la solidarité ultime de l'homme avec cette Création, devant Dieu qui l'en a institué responsable – ainsi que le dit clairement l'histoire de Caïn et que le martèlent les prophètes... C'est devant la perspective d'un salut cosmique que l'homme engage sa responsabilité : « le temps où seront renouvelées toutes choses (Actes 3,1) et où, avec le genre humain, tout l'univers lui-même, intimement uni à l'homme et atteignant par lui sa destinée, trouvera dans le Christ sa définitive perfection », selon le concile Vatican II.***

Cette responsabilité est la nôtre. Elle passe par une révision déchirante de notre style de vie, et par la mise en cause du système économique actuel : « Dans sa première lettre à Timothée saint Paul est très clair : “L'amour de l'argent est la racine de tous les maux” (6,10)... Tant que l'économie dominera toute notre échelle de valeurs, l'homme continuera à détruire sans vergogne la planète Terre et à torturer des milliards d'êtres sensibles. »

Telles sont les grandes lignes de ce livre, bref mais étonnamment riche en surprises et en pistes de réflexion, et qui se promène à travers la Bible et les écrits des saints – où l'on découvre beaucoup de tendresse envers les animaux. Par exemple l'ânesse et l'ange ridiculisant l'homme, dans l'histoire de Balaam (Nombres 22:22-35). Ou saint Philippe Neri (XVIe siècle) enseignant ceux qui s'offusquaient de le voir dire la messe en présence de son chat : « Un beau chat, qui est une créature de Dieu pleine de grâce et de distinction, rend gloire à Dieu par le fait même qu'il est dans l'ordre des choses voulues par le Créateur. »

 

 

Robert Culat

Méditations bibliques sur les animaux

(l'Harmattan, 136 p., 14,50 euros)

 

_______________ 

* Chapitre X : Sauvegarder l'environnement (n° 451-487).

** sujet de mon livret Cathos, écolos, mêmes combats ? (Peuple libre, mai 2015).

*** Lumen gentium, § 48.

 

 

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