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12/09/2013

"Simplicité et justice" : paroles de chrétiens sur l’écologie

Edité par le diocèse de Nantes, un livre sur les enjeux de l'écologie à la lumière de la tradition chrétienne :

 


Présentation du livre par ses auteurs

<< Le groupe Écologie, paroles de chrétiens du diocèse de Nantes a été chargé de conduire une réflexion sur les défis posés par la crise écologique mondiale. Sa méthode de travail, correspondant à une démarche du type « voir, juger, agir », a privilégié les apports de chacun des membres en fonction de leurs compétences, pour analyser la situation présente, mieux comprendre les défis auxquels nous sommes confrontés, essayer de les éclairer à la lumière de la pensée contemporaine et de la tradition chrétienne, et proposer quelques pistes d'action. Le groupe était composé d'une dizaine de personnes appartenant à différentes disciplines (scientifiques, économiques, juridiques, philosophiques, théologiques).

Sur la thématique de la crise écologique, de nombreux ouvrages existent, et nous n'avons nullement l'ambition de nous substituer aux experts nombreux qui s'expriment sur la question. Nous renvoyons d'ailleurs le lecteur aux nombreux essais, livres et textes de référence cités en fin de publication. L'originalité de notre démarche se situe ailleurs. D'une part, le travail inter-disciplinaire nous a permis un croisement de compétences et de regards, avec la forte volonté pédagogique de proposer une synthèse accessible à tous. D'autre part, des voix chrétiennes réfléchissent et s'expriment sur le sujet, mais il existe peu d'ouvrages de synthèse en langue française, notamment sur les prises de parole du Magistère catholique. Elles sont assez peu connues du grand public, et même de bon nombre de catholiques. Certaines parties de notre travail, notamment en matière éthique, sont donc assez originales.

Dans la structure de l'ouvrage, nous avons refusé une présentation thématique à base disciplinaire, pour privilégier ce regard synthétique et croisé. L'ouvrage se présente en 3 chapitres : Approches de la pensée écologique, Repenser aujourd'hui notre société, Vivre autrement.

Notre ouvrage se veut porte-paroles d'expressions diverses du monde chrétien (et pas seulement catholique). Nous avons d'ailleurs inséré dans l'ouvrage trois exemples d'expression de chrétiens ou de groupe de chrétiens sur des sujets d'actualité. Parole plurielle aussi parce que notre groupe est lui-même pluriel. Comme dans l'Église et dans la société, plusieurs sensibilités sont présentes quant à l'approche de la crise écologique, et des solutions proposées pour y faire face. L'ouvrage rend compte de cette diversité, avec une recherche de consensualité qui n'a voulu ni masquer les points de désaccord, ni déboucher sur un consensus mou. Une inflexion générale se dégage en effet de l'ouvrage, exprimée par le titre, Simplicité et Justice.

Ce titre peut sembler étonnant. Quel rapport avec l'écologie ? Au terme de notre démarche, ces deux termes nous ont paru résumer ce qui, au-delà du discours, nous paraissait converger vers la dimension propre, prophétique, du message chrétien face à la crise écologique. Il nous a semblé que toute notre tradition nous conduisait à faire le choix d’une vie plus simple, plus sobre dans un souci à la fois de préservation de notre planète mais aussi de justice vis à vis de tous ses habitants, nos frères. Ce positionnement ne fera sans doute pas l'unanimité, y compris parmi les catholiques. Il ne rend compte que de l'opinion des auteurs, même s'il rejoint assez largement le discours porté par le Pape François depuis son élection, ainsi que les engagements de plus en plus nombreux de groupes chrétiens assez variés.

Tous nos lecteurs ne partageront pas forcément cette option. Notre objectif est, au-delà de l'information et de la formation sur ces questions, d’alimenter la réflexion, de susciter le débat et de nourrir la recherche de pistes d’action bien concrètes.

 

Chapitre 1 : voir

 

Le premier chapitre traite de la pensée écologique sous ses aspects philosophique et théologique, puis aborde la dimension écologique des recherches menées dans les domaines économique, social et environnemental. Cette approche multi disciplinaire est caractéristique de l’écologie qui est, par définition, une approche systémique.

La partie philosophique prend le XIXe siècle comme point de départ avec les réactions des défenseurs de la nature face à la seconde révolution industrielle aux États-Unis et en France. Puis on aborde les courants contemporains, dans lesquels les penseurs chrétiens tiennent une place notable. On peut citer par exemple Jacques Ellul et Ivan Illich dans les années 1960, Jean-Pierre Dupuy ou Dominique Bourg actuellement. Mais le paysage est devenu complexe, et nous en proposons une lecture à partir d’une typologie en quatre types. L’écologie conservatoire, qui associe conservation sociale et environnementale, la croissance verte ou développement durable, la vie simple qui regroupe elle-même de nombreux courants comme l’écologie profonde, le biocentrisme ou la critique de la technologie et de la croissance. On trouve des chrétiens au sein de ces trois tendances. La 4e est l’écologie radicale, qui considère l’homme d’abord comme un prédateur, mais qui reste très marginale.

Le respect de la nature n’a pas pour autant commencé au XIXe siècle, non plus que sa dégradation… On cite souvent le texte de la genèse I « Soumettez la Terre » pour accuser le christianisme d’être à l’origine de la dégradation de l’environnement. Mais la Genèse c’est aussi le chapitre 3 qui nous demande de cultiver et garder le jardin d’Eden. Mais l’Ecclésiaste, autre livre de la Bible, affirme que « le sort de l’homme et le sort de la bête sont un sort identique… la supériorité de l’homme sur la bête est nulle car tout est vanité ». Nous nous appuyons sur les textes de St Paul, du théologien allemand Jurgen Moltmann, pour montrer que la théologie chrétienne de la création nous incite à contribuer à la création continue du monde, d’un monde meilleur pour les hommes et pour son environnement. Les propos du pape François s’inscrivent pleinement dans ces perspectives.

Enfin, cette première partie aborde la notion d’empreinte écologique. Nous nous posons la question de savoir si nous avons déjà dépassé les limites de notre planète. En faisant appel aux économistes nous mettons en évidence les limites des gains de productivité et de la croissance. Ceci nous amène à élargir la notion de limites à celles de nos ressources naturelles, dont le sol lui-même, l’atmosphère… les limites de l’endettement, de notre puissance en un mot. La complexité de notre monde l’épuise, ce qui nous conduit à nous interroger sur les solutions qui amèneraient une complexité encore plus coûteuse.

La recherche d’infini peut-elle être encore trouvée dans la croissance du PIB, ou par d’autres voies, dans lesquelles la recherche d’une plus grande justice sociale conforterait un plus grand respect de la nature ? A contrario un autre mode de développement est-il possible qui s’appuierait à la fois sur de nouveaux progrès technologiques et sur un approfondissement du lien entre les personnes ? Ce débat qui traverse la société, traverse aussi la communauté chrétienne.

 

Chapitre 2 : juger

 

Le second chapitre de l’ouvrage, intitulé « Repenser aujourd’hui notre société » (« juger » selon la démarche proposée) aborde trois sujets.

 

Le premier concerne la place qu’occupe la technologie dans notre société. Longtemps synonyme de progrès, la technologie, les technologies, ont connu au cours du dernier siècle sous l’emprise de la logique de marchés un développement devenu incontrôlable. On ne produit plus seulement pour augmenter le bien être (santé alimentation) des populations (soit dit en passant des seuls pays les plus développés) mais aussi, dans un énorme gaspillage de matières premières et d‘énergie, pour alimenter le marché en biens de consommation futiles contribuant ainsi à la crise écologique. Alors que certains proposent des solutions alternatives parfois radicales d’autres pensent que c’est grâce à des innovations technologiques dans un contexte mieux maîtrisé que nous trouverons des solutions aux problèmes que nous rencontrons. C’est sur cette difficile contradiction qu’a porté, à la lumière des écrits de plusieurs penseurs de notre temps tels que J. Ellul ou André Lebeau, l’effort de réflexion des scientifiques du groupe (physiciens biologistes industriels)

 

Le second sujet abordé s’intitule Démocratie et écologie. Rédigé par un juriste il dresse un historique de l’évolution du droit de l’environnement en France et en Europe. On voit dans ce sous-chapitre la conscience publique des problèmes écologiques prendre forme à travers une lente programmation de la politique de l’environnement depuis les années 1960 et au cours des 20 dernières années, sa traduction en termes de lois de plus en plus précises même si l’analyse critique à laquelle nous nous livrons dévoile encore de nombreuses insuffisances en particulier dans le domaine de leur application. Cette analyse critique se prolonge par une réflexion sur la recherche de principes de vie en commun et d’objectifs partagés, s’interroge sur ce que l’on entend par justice et fraternité, et fait finalement des propositions pour une « écopolitique » humaniste et chrétienne.

 

Le troisième sous chapitre s’intitule « Pensée sociale de l’église et écologie ». Il explore les prises de position successives de l’église catholique sur la question écologique à travers les textes du magistère (encycliques, textes et discours des papes et des évêques). Cet important travail de recherche et de compilation a été réalisé par l’économiste du groupe qui prépare également une thèse en théologie. Ce travail montre, à côté et au sein d’une doctrine sociale de l’Eglise dont les médias se sont parfois fait l’écho, une prise de parole de plus en plus engagée et forte sur le contexte écologique. Je cite les sous titres de certains paragraphes pour donner une idée du contenu :

La dignité de la personne humaine : une écologie centrée sur l’homme

Le bien commun : la terre et ses richesses pour le bien de tous

La destination universelle des biens : la propriété n’est pas un droit absolu

La solidarité : une option préférentielle pour les pauvres élargie à la nature et aux générations futures.

La gratuité : réintroduire la logique du don dans un système marchandisé etc.

 

Chapitre 3 : agir

 

Le chapitre 3 débouche sur le « vivre », des propositions concrètes et accessibles à tous pour faire face à la crise écologique. Ce chapitre exprime clairement l'option de notre groupe en faveur de la simplicité et de la justice.

Le chapitre s'ouvre par une réflexion sur les limites de la justice et de la charité dans le contexte contemporain, qui doivent être élargies à tous les pauvres d'aujourd'hui, aux générations futures, et aussi à l'ensemble de la création. Ce qui nous conduit à énoncer 10 thèses pour la vie simple, et à développer dans la seconde partie, intitulée « le bonheur de la vie simple », notre option pour un mode de vie plus simple.

Ce mode de vie plus simple nous semble devenu un impératif social et écologique autant qu’un appel spirituel. Social pour mieux répartir les ressources limitées de notre planète. Écologique pour préserver nos ressources fossiles, la diversité du vivant, et limiter la dégradation du climat. Spirituel pour se dépouiller de l’inutile et du futile, pour prendre le temps de rencontrer, d’écouter, de prier et d’accéder à une forme de vie libérée et heureuse. Ce mode de vie plus simple ne peut constituer, pour un chrétien, une fin en soi. Il n'a de sens que lié au souci de l’autre, à la justice. Cette option pour la vie simple doit d'abord être un choix individuel, et nous donnons de nombreux exemples pour une vie plus simple. Nous pouvons modifier, chacun d’entre nous, nos modes d’achat, notre alimentation, nos déplacements, notre mode de vie plus globalement… Ces choix individuels sont nécessaires, mais pas suffisants. Ils s’intègrent dans une démarche collective, de nature politique.

La troisième partie du chapitre, « pour une liturgie plus écologique », s'adresse plus spécifiquement aux chrétiens, singulièrement à l'Église catholique. Rappelant la dimension spirituelle de la crise écologique, elle développe quelques propositions pour un indispensable travail de conversion. Ce travail suppose un changement de nos relations personnelles et communautaires à l'égard de Dieu, de la création, et de nos frères. Il doit s'incarner dans nos pratiques liturgiques, en redécouvrant des éléments déjà bien présents dans notre tradition, mais que le catholicisme occidental, sans doute devenu trop cérébral, a un peu oublié. Nous prenons appui sur la réflexion et l'expérience d'autres églises chrétiennes, qui ont sans doute mieux gardé que nous la dimension écologique et cosmique du message chrétien.

Conclusion :

L'ouvrage s'achève par un cri d'alarme, et par un appel.

Un cri d'alarme : face à l'urgence de la situation et aux limites de la planète, nous n'avons pas d'autre choix que la conversion. Une conversion de nature spirituelle, c'est à dire un choix fait non pas sous contrainte et par nécessité, mais dans la liberté, individuelle et collective.

Un appel : à l'Église et à nos frères chrétiens, pour qu'ils s'engagent davantage, par la parole et surtout par des actes concrets, à vivre plus sobrement, pour faire face aux crises écologique, économique et sociale que nous traversons. La vie simple nous semble un chemin pour la justice économique. Elle nous semble aussi un chemin pour une vie plus heureuse pour tous. >>

 

 

Simplicité et justice - édité par le Service diocésain de formation, 20 rue de la Gourmette, BP 31917, 44319 Nantes cedex 3, formdioc44 (a) free.fr tél 02 40 16 07 80. Prix de vente public : 8 € en librairie, 13 € par correspondance